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reconduction des contrats

Syndicat de copropriétaires

Obligation d’information prévue par l’art. 136-1 C. Cons.

Personne morale bénéficiaire (oui)

 

 

 

Cour de cassation - Première chambre civile  23 juin 2011  (10-30.645)

Sur opposition à injonction de payer (Juridiction de proximité 13e arrdt de Paris)

Cassation

 

 

 

 

Sur le moyen unique  :

Vu l’article L. 136-1 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires de l’immeuble ... à Paris (le SDC) a conclu avec la société Somainnet, un contrat d’entretien prenant effet le 2 août 2004, pour une durée d’un an, reconductible de plein droit à l’expiration de chaque période ; que par lettre recommandée du 30 juin 2008, son syndic, la société Pargest, faisant application des dispositions susvisées, a informé la société Somainnet de la résiliation de ce contrat au 1er août 2008 ; qu’estimant cette résiliation irrégulière, celle-ci a demandé paiement de factures pour les mois suivants ;

Attendu que pour accueillir cette demande, la juridiction de proximité, saisie à la suite de l’opposition formée à l’encontre de l’injonction de payer qu’avait obtenue la société Somainnet, s’est bornée à énoncer que le SDC, qui est une personne morale, ne pouvait se prévaloir de l’article L. 136-1 du code de la consommation qui "vise exclusivement les personnes physiques" ;

Qu’en se déterminant ainsi alors que les personnes morales ne sont pas exclues de la catégorie des non-professionnels bénéficiant des dispositions susvisées, applicables à la reconduction des contrats concernés, dès lors que le délai imparti au prestataire de services par le premier alinéa pour donner l’information requise n’avait pas commencé à courir à la date d’entrée en vigueur de l’article 33 de la loi du 3 janvier 2008, la juridiction de proximité qui, en l’absence de mention de la durée du préavis déterminant, en l’espèce, le point de départ du délai précité, n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale ;

 

PAR CES MOTIFS  :

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 1er décembre 2009, entre les parties, par la juridiction de proximité de Paris 13e ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Paris 14e ;

 

 

commentaires

 

L’article L 136-1 du Code de la Consommation modifié par la loi Chatel n°2008-3 du 3 janvier 2008 (art. 33) est ainsi conçu :

« Le professionnel prestataire de services informe le consommateur par écrit, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu'il a conclu avec une clause de reconduction tacite.

« Lorsque cette information ne lui a pas été adressée conformément aux dispositions du premier alinéa, le consommateur peut mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la date de reconduction. Les avances effectuées après la dernière date de reconduction ou, s'agissant des contrats à durée indéterminée, après la date de transformation du contrat initial à durée déterminée, sont dans ce cas remboursées dans un délai de trente jours à compter de la date de résiliation, déduction faite des sommes correspondant, jusqu'à celle-ci, à l'exécution du contrat. A défaut de remboursement dans les conditions prévues ci-dessus, les sommes dues sont productives d'intérêts au taux légal.

« Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice de celles qui soumettent légalement certains contrats à des règles particulières en ce qui concerne l'information du consommateur.

« Les trois alinéas précédents ne sont pas applicables aux exploitants des services d'eau potable et d'assainissement. Ils sont applicables aux consommateurs et aux non-professionnels.

 

Les syndicats de copropriétaires peuvent-ils, se présentant comme consommateurs, invoquer le bénéfice de l’article L 136-1 ?

 

L’arrêt reproduit apporte la  réponse de la Cour de Cassation dont l’espoir apparaissait dans la réponse ministérielle faite à M. Jeanjean le 7 juin 2005, que nous avons publiée en son temps. Nous ne pouvons mieux faire que de la reproduire également.

Elle évoque la controverse frontale entre la jurisprudence européenne et les premières décisions de la jurisprudence française apparue depuis la promulgation de la loi Chatel. ( Voir 2-3-3 en V )

 

Question N° : 62019  de M. Jeanjean Christian

Réponse publiée au JO le : 07/06/2005 page : 5983

 

Texte de la QUESTION :

 

M. Christian Jeanjean attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer sur l'application de la loi n° 2005-67 du 28 janvier 2005 dite de protection des consommateurs. Cette loi applicable au 28 juillet 2005 permet aux consommateurs, d'échapper au piège des contrats reconductibles par tacite reconduction. Il lui demande dans quelle mesure cette loi peut s'appliquer aux syndicats de copropriété. –

Question transmise à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation.

 

Texte de la REPONSE :

 

La loi n° 2005-67 du 28 janvier 2005 tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur ne concerne que les consommateurs. Son article L. 136-1 introduit dans le livre Ier du code de la consommation renvoie explicitement à la notion de consommateur, en visant les contrats passés entre les consommateurs et les prestataires de service. Les consommateurs en tant que personnes physiques sont donc les principaux bénéficiaires de ces dispositions.

La Cour de justice des Communautés européennes, à la suite d'une question préjudicielle relative au champ d'application de la directive du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives, a consacré, dans un arrêt du 22 novembre 2001, la notion de consommateur entendue strictement comme une personne physique qui conclut un contrat avec un professionnel. Cette interprétation recueille l'approbation d'une bonne partie de la doctrine et a la faveur de nombreux praticiens du droit qui mettent en corrélation la finalité consumériste de ces textes et leurs destinataires naturels.

Toutefois, tant la jurisprudence de la Cour de cassation que la notion de consommateur contenue dans les différents textes consuméristes autorisent une acception plus large de la notion de consommateur lorsqu'une personne morale, par référence à l'absence d'un lien direct existant entre le contrat passé avec une activité commerciale, se trouve dans une situation comparable à celle rencontrée par un consommateur, personne physique. C'est en ce sens que s'est déterminée la cour d'appel de Paris (arrêt non confirmé par la Cour de cassation) pour reconnaître précisément à un syndicat de copropriété le bénéfice des dispositions de l'article L. 114-1 du code de la consommation (relatif à la faculté pour le consommateur de demander la résolution du contrat non exécutoire par le professionnel dans le délai contractuellement fixé), lui reconnaissant ainsi la qualité de consommateur.

Ainsi, et sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux, la loi du 28 janvier 2005 visant à renforcer la protection du consommateur a également vocation à s'appliquer aux contrats passés par les syndicats de copropriété, mandatés par des propriétaires, au demeurant personnes physiques, avec les professionnels prestataires de service.

 

Les professionnels ont tenté de contourner l’évolution de la jurisprudence française en prétendant qu’il fallait faire une distinction entre les syndicats administrés par des syndics professionnels et ceux administrés par des syndics non-professionnels. Ces derniers seuls auraient pu bénéficier de la protection accordée par la loi Chatel. Il était déraisonnable d’envisager une telle distinction.

 

On peut considérer que l’arrêt ci dessus met un terme à la controverse.

En retenant « que les personnes morales ne sont pas exclues de la catégorie des non-professionnels bénéficiant des dispositions susvisées », la Cour de cassation semble même se référer à une solution déjà acquise.

C’est un peu surprenant car il faut rappeler l’arrêt rendu  le 02/04/2009 (voir l’arrêt) par la même Première chambre à propos d’un Comité d’entreprise en litige avec une société de prestations de services. On lit :

« Qu’en statuant ainsi, alors que le texte susvisé, qui s’applique exclusivement au consommateur, ne concerne que les personnes physiques, le juge a violé le texte susvisé par fausse application ; »

 

On peut toutefois craindre théoriquement une intervention future de la juridiction européenne.

En l’état, les syndicats de copropriétaires peuvent se prévaloir de l’article L 136-1.

 

 

 

 

 

Mise à jour

29/06/2011