Travaux urgents décidés par le syndic

Ratification a posteriori  d’une décision du syndic

Nécessité d’une assemblée immédiatement convoquée 

 

 

Cassation  civile 3   1 février 2005                                                                Cassation partielle

N° de pourvoi : 03-19787

Cour d’appel de Versailles (4e chambre civile)     15/09/2003

 

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X... épouse Y..., propriétaire de lots dans la Résidence La Montgolfière, a sollicité l’annulation de résolutions de l’assemblée générale des copropriétaires du 31 mars 1999 statuant sur les comptes 1998 ;

 

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

 

Attendu que Mme X... n’ayant pas soutenu devant les juges du fond que les décisions concernant les dépenses afférentes aux emplacements de stationnement devaient être votées par une assemblée particulière, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et, partant, irrecevable ;

 

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

 

Attendu qu’ayant constaté que la dernière nomination de Mme X... au conseil syndical remontait à l’assemblée générale du 16 avril 1996 et que le mandat des membres du conseil syndical était de trois ans, la cour d’appel, qui en a souverainement déduit que son mandat arrivait à expiration en 1999, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

 

Mais sur le deuxième moyen :

 

Vu l’article 37 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, ensemble l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

 

Attendu que pour débouter Mme X... de sa demande en annulation de la résolution n° 2, l’arrêt retient que c’est dans son total pouvoir d’appréciation que l’assemblée générale a aussi ratifié les dépenses relatives aux travaux urgents décidés par le syndic ;

 

Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui avait été demandé, si des travaux urgents avaient été ratifiés par une assemblée générale immédiatement convoquée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute Mme X... de sa demande en annulation de la résolution n° 2 de l’assemblée générale des copropriétaires du 23 mars 1999, l’arrêt rendu le 15 septembre 2003, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties, dans l’état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Amiens ;

 

Condamne le syndicat des copropriétaires de la Résidence La Mongolfière aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires de la Résidence La Mongolfière à payer à Mme X... épouse Y... la somme de 2 000 euros ;

 

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires de la Résidence La Mongolfière ;

 

 

Commentaires :

 

Si l’on s’en tient aux indications très sommaires de l’arrêt, le syndic a décidé d’effectuer des travaux considérés comme urgents sans autorisation préalable de l’assemblée générale ;

Il a sollicité la ratification de cette initiative à l’occasion d’une assemblée générale ultérieure (vraisemblablement l’assemblée annuelle) ; l’assemblée s’est prononcée en faveur de la ratification.

Une copropriétaire a demandé l’annulation de différentes décisions prises par cette assemblée générale. Elle a obtenu satisfaction pour la ratification litigieuse.

Note 16/04/2007 : Voir aussi l’arrêt postérieur du 17/01/2007. (Voir l’arrêt) L’allusion qu’il comporte à la ratification implicite générée par l’approbation des comptes de l’exercice incite à penser qu’elle vise la présente affaire. Cela démontrerait, une fois de plus, qu’il est difficile de commenter un arrêt de la Cour de cassation sans disposer de l’arrêt d’appel ! C’est pourquoi nous avons demandé une copie de cet arrêt.

 

 

On peut se demander

- si la Cour de cassation s’est bornée à sanctionner l’arrêt rendu en ce qu’il ne contenait pas de réponse à un argument explicitement soulevé devant la Cour d’appel de Versailles,

- ou si vraiment elle a condamné la ratification d’un excès de pouvoir du syndic en raison de son caractère tardif, contraire aux dispositions de l’article 37 du décret du 17 mars 1967.

 

Nous ne traiterons que cette seconde question.

Les praticiens savent que l’article D 37 est facilement invoqué pour justifier l’exécution de travaux qui ne présentent pas toujours l’urgence qui en justifie le particularisme. Souvent invoqué, il est  rarement respecté quant à la nécessité de convoquer rapidement une assemblée générale des copropriétaires.

Ces irrégularités ne relèvent pas toujours d’un laxisme coupable.

Dans de nombreux cas l’ensemble des travaux nécessaires est réalisé lors de l’intervention technique urgente. Ainsi pour le remplacement d’un élément important du système de production d’eau chaude sanitaire défaillant en plein hiver. Les occupants sont alors plus soucieux du remplacement immédiat que de la convocation d’une assemblée générale. Dans ce cas le syndic ne peut mettre à l’ordre du jour que la ratification de ce qu’il a fait avec, on peut le souhaiter, le plein accord du conseil syndical. L’expérience montre que ce genre d’assemblée est peu fréquenté et qu’il est de plus reproché au syndic d’avoir engagé inutilement les frais d’une assemblée générale.

On admet habituellement que l’assemblée peut refuser de ratifier les dépenses engagées ainsi par le syndic et que sa responsabilité peut alors être mise en cause. Il faut ajouter que, dans cette hypothèse, le syndic peut demander la vérification judiciaire de l’opportunité de ses diligences. La confusion s’accroît quand on constate qu’un arrêt ancien de la Cour de cassation a admis que le syndic pouvait passer outre à un refus de l’assemblée générale [1] Des décisions pénales ont été rendues dans le même sens.

 

Le mécanisme de l’article D 37 est adapté à des cas particuliers tels que d’importants dommages à une toiture du fait d’une tempête. Les premiers travaux ont pour objet la mise hors d’eau et l’assemblée est ensuite convoquée pour prendre les décisions nécessaires à la réfection de la toiture.

 

Mais l’observation juridique principale concerne la condition d’immédiateté de la ratification. La Cour d’appel a judicieusement fait référence au total pouvoir d’appréciation de l’assemblée générale. C’est qu’ici, l’assemblée générale convoquée immédiatement en vertu de l’article D 37 a pour objet principal de prendre des décisions à exécuter et d’ouvrir les crédits nécessaires à la réalisation des travaux de réparation.

Il est bien certain qu’un copropriétaire peut refuser de payer un appel de fonds pour travaux urgents en l’absence de décision préalable de l’assemblée. Mais une irrégularité ou un excès de pouvoir du syndic peut faire l’objet d’une ratification lors de l’assemblée annuelle appelée à approuver les comptes. La condition d’immédiateté apparaîtrait alors comme une condition ajoutée au texte, s’il s’agit bien d’une ratification.

 

Il est donc difficile en l’état de tirer des enseignements précis de cette décision qui devait pourtant être relatée.

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

17/04/2007

 

Révision
17/04/2007

 



[1] Cass. civ. 3e  29/10/1969 GP 1970 I 229 note Morand