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Les états généraux des professions immobilières

 

 

La FNAIM (Fédération nationale de l'immobilier) et l'UNIS (Union des syndicats de l'immobilier) ont décidé d'organiser des « États Généraux des professions immobilières ». Objectif :  « dans un esprit constructif d'ouverture », proposer un « nouveau cadre équilibré tendant à réformer l'exercice de leurs professions régies par la loi du 2 janvier 1970.

Il s’agit en fait de contrer les projets de loi successifs présentés par le Gouvernement.

Le SNPI (Syndicat national des professions immobilières) s’est retiré de l’« intersyndicale ». Or, si le SNPI admet n’être pas représentatif des syndics de copropriété, il n’en va pas de même pour les agents immobiliers indépendants qui constituent le « gros » de ses adhérents.

Le site Universimmo présente une étude consacrée aux « Etats Généraux des professions immobilières », aux modalités de leur mise en œuvre, - une série d'auditions et de rencontres -, et aux objectifs poursuivis. Nous conseillons vivement à nos visiteurs la consultation de cette étude :

http://www.universimmo.com/actu/uniactu00x.asp?Article_Code=610

 

Le débat impose quelques affirmations plus raides.

 

Les professions immobilières n’ont en commun que l’objet de leurs activités : le patrimoine immobilier français relevant du droit privé. Elles comportent des activités civiles et des activités commerciales qui doivent être soigneusement distinguées.

L’activité de syndic de copropriété est de nature civile. (Voir Cass. civ. le 11-07-1988)

Elle s’étend à l’administration d’institutions collectives voisines (notamment les associations syndicales) et à la gestion des immeubles ou parties communes qui leurs sont liés.

Un syndic de copropriété peut exercer son activité sous une forme libérale ;

Les rapports qu’entretient une société commerciale exerçant l’activité de syndic de copropriété avec les syndicats mandants relèvent du droit civil.

 

L’activité d’entremise est de nature commerciale.

Par un arrêt du 17 juin 2009 (08-13833) la 3e Chambre de la Cour de cassation vient encore de rappeler que « le mandat d’entremise donne pouvoir au mandataire de mettre en vente l'immeuble et de trouver acquéreur, sans autorisation d'accepter une offre d'achat ni de conclure la vente ».

Il s’agit des agents immobiliers.

 

L’activité de gestion locative est classiquement considérée comme étant de nature commerciale, ce qui est contestable.

Cette qualification est fondée sur l’article L 110-1 al. 6 qui qualifie d’acte de commerce « toute entreprise de fournitures, d'agence, bureaux d'affaires, établissements de ventes à l'encan, de spectacles publics ; »

Elle s’appuie sur un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 4 juin 1971.

A cette même époque, l’activité de syndic de copropriété était également considérée comme une activité commerciale sur les mêmes fondements que dessus.

Contrairement à l’avis émis par la Chancellerie, la Cour de cassation, par un arrêt du 11/07/1988 (JCP 1989 II 21267 note Cadiet) a reconnu le caractère civil du mandat de syndic et la possibilité pour un avocat d’exercer l’activité.

Le Cour d’appel de Rennes (08/04/1987 GP 1987 2 587) a pareillement jugé « que le syndic, mandataire des copropriétaires, n'est qu'un agent d'exécution accomplissant des actes civils; que l'exercice habituel de cette activité ne saurait en modifier la nature; qu'ainsi un conseil juridique peut adjoindre à son activité celle de syndic de copropriété sans pour autant devenir un commerçant ». 

 

Dans sa conception traditionnelle, l’activité de gestion immobilière pourrait, à notre avis bénéficier d’une évolution identique de la jurisprudence. Une lecture attentive de l’article L 110-1 du Code de commerce conduit à penser que les actes de gestion immobilière ne peuvent s’insérer entre les ventes à l’encan et les spectacles publics.

 

On retrouve ainsi la distinction tout aussi traditionnelle entre :

Les administrateurs de biens (syndics de copropriété et gestionnaires locatifs) dont les activités sont de nature civile

Les agents immobiliers dont les activités sont de nature commerciale

Dans le passé, la CNAB (Confédération nationale des administrateurs de biens) était « ressentie » comme un Ordre professionnel qui interdisait à ses membres les activités marchandes.

 

Nous n’entendons pas occulter les problèmes juridiques qui apparaissent lorsque des actes civils par nature sont effectués par une personne commerçante. Nous voulons surligner la nature civile des actes de gestion immobilière, et faire valoir que la distinction que l’on trouve dans la loi Hoguet entre la gestion immobilière et l’entremise présente une cohérence fondamentale que l’on n’avait pas soupçonnée jusqu’à présent.

 

Il est vain de vouloir doter d’un statut général identique des professionnels libéraux et des professionnels commerçants.

La proposition Coudray de 1950 tendait à la constitution d’une Chambre nationale des administrateurs de biens. Le régime des professions concernés était sans nul doute calqué sur celui des Ordres. M. le Conseiller Capoulade (Les Professions immobilières Ed. Actualité Juridique 1974) a jugé qu’il était d’inspiration corporatiste.

La proposition Taillade de 1951 portait statut des professions d’agent immobilier, de mandataire en fonds de commerce et de négociant en biens. Elle prévoyait la création d’une carte professionnelle, des conditions de moralité et la constitution d’une Chambre de discipline

 

Le législateur a doté les professions immobilières de la loi n° 60-580 du 21 juin 1960 dont le décret d’application n° 65-226 n’a été publié que le 25 mars 1965.

Cette première tentative a généré des travaux de recherches et finalement deux propositions de loi concurrentes :

Celle de M. Cousté (06/12/1967 Doc. Parl. AN n° 563 et 17/07/1968 n° 183) prévoyait un Ordre national des agents immobiliers, mandataires en fonds de commerce, administrateurs de biens et syndics, sans prendre en considération le particularisme de chacune de ces branches. Elle ne comportait aucun disposition relative à la garantie financière. Elle était vouée à l’échec.

Celle de M. Hoguet qui s’est présentée initialement sous la forme d’une proposition (11/07/1968 Doc. Parl. AN n° 68) « tendant à instituer une carte professionnelle d’agent immobilier et de mandataire en fonds de commerce ». L’auteur a précisé qu’il n’envisageait pas la création d’un statut mais d’une réglementation.

Les travaux parlementaires ont considérablement amélioré le projet initial de M. Hoguet. Nous mentionnerons seulement que le domaine d’application du nouveau régime a été étendu « à la gestion immobilière ». Mais le « mécanisme Hoguet » a été conçu pour les agents immobiliers et pour eux seuls.

La loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 (dite loi Hoguet) a été complétée par le décret n° 72-678 du 20 juillet 1972.

 

La loi Hoguet a eu pour objectif principal la réglementation de l’activité des agents immobiliers. On trouve occasionnellement dans la loi et le décret des mentions portant adaptation du régime aux syndics de copropriété. L’activité de syndic est donc assujettie à cet encadrement réglementaire qui se soucie peu de certaines de ses spécificités.

On ne peut négliger les effets bénéfiques du régime Hoguet.

Mais il est resté figé pendant 35 ans. Pendant ce temps le parc immobilier collectif  a évolué tant par le nombre des immeubles que par leur volume et la complexité de leur organisation. Le monde des syndics professionnels a été bouleversé par l’intrusion des groupes financiers qui ont absorbé un grand nombre de cabinets indépendants. Des poursuites judiciaires bienvenues ont accéléré ce mouvement.

 

La « commercialisation » rampante de l’activité de syndic de copropriété est un fait aussi regrettable qu’incontestable.

Elle a une incidence sur le comportement des professionnels et leur manière d’exercer l’activité mais elle n’affecte pas les règles fondamentales du statut de la copropriété qui continuent à s’appliquer indifféremment à tous les syndics, professionnels ou non, rémunérés ou non.

Le principe de la gestion des fonds syndicaux par le truchement d’un compte bancaire séparé ouvert au nom du syndicat des copropriétaires, désormais proclamé par l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, a fait disparaître une particularité propre aux syndics professionnels. La possibilité de dispense ouverte par le texte n’est qu’une mesure technique relevant d’un opportunisme prétendument économique. Les avatars récents et la prohibition de l’utilisation des « comptes reflets » pour la rémunération des fonds déposés sur un compte unique ouvert au nom du syndic devraient la faire disparaître ainsi que les inconvénients majeurs qu’elle a pu générer.

Cette disparition pourrait inciter les banquiers à se contenter à l’avenir de démarcher les syndics pour cumuler les comptes séparés, quitte à conserver par ailleurs des activités d’entremise dans le secteur immobilier marchand.

 

Les États généraux des professions immobilières ne posent pas clairement les problèmes propres à l’activité de syndic de copropriété.

 

Le premier est certainement celui de la formation des syndics eux-mêmes et des conditions d’accès à la profession. Dans le régime Hoguet, l’accès à la profession s’entend de la délivrance de la carte !

L’article 11 du décret du 20 juillet 1972 est, à ce jour, ainsi conçu :

« Sont regardées comme justifiant de l’aptitude professionnelle requise pour obtenir la carte professionnelle prévue à l’article 1er les personnes qui produisent :

« 1° Soit un diplôme délivré par l’Etat ou au nom de l’Etat, d’un niveau égal ou supérieur à trois années d’études supérieures après le baccalauréat et sanctionnant des études juridiques, économiques ou commerciales ;

« 2° Soit un diplôme ou un titre inscrit au répertoire national des certifications professionnelles d’un niveau équivalent (niveau II) et sanctionnant des études de même nature ;

« 3° Soit le brevet de technicien supérieur professions immobilières ;

« 4° Soit un diplôme de l’institut d’études économiques et juridiques appliquées à la construction et à l’habitation. »

 

Un diplôme, d’un niveau égal ou supérieur à trois années d’études supérieures après le baccalauréat et sanctionnant des études économiques ou commerciales, serait-il « délivré par l’Etat ou au nom de l'État », ne peut justifier une compétence pour l’administration des syndicats de copropriétaires et la gestion de leurs immeubles. On ne peut admettre une telle présomption de compétence que pour les études juridiques, et sous réserve qu’elles aient porté sur les matières du droit privé.

On peut en dire autant pour le diplôme et le titre visés au 2°.

Le diplôme de l’institut d’études économiques et juridiques appliquées à la construction et à l’habitation était et reste encore l’une des formations adéquates.

Le brevet de technicien supérieur professions immobilières a suscité de grands espoirs. Le niveau de compétence qu’il procure reste incertain mais cette voie ne peut être négligée.

 

Compte tenu de la complexité croissante du statut de la copropriété et des régimes voisins, le socle de la formation des syndics ne peut être que juridique. Son « sol dur », - pour reprendre le jargon des bâtisseurs -, est nécessairement un certain niveau de culture générale, incluant la qualité de l’expression écrite et orale, des relations humaines, de la moralité et de l’éthique.

Le socle des connaissances juridiques en droit privé facilite l’étude du droit de la copropriété et des régimes voisins, une bonne pratique de l’interprétation des textes nouveaux et de la jurisprudence. Les syndics sont alors en mesure, sans nécessité d’être des jurisconsultes exégètes, de discuter d’égal à égal avec des techniciens du droit et a fortiori, lors des assemblées générales, avec des copropriétaires initiés à ces matières, ce qui n’est pas le cas actuellement, sauf rares exceptions. Dans la pratique ils sont en mesure au moins de détecter les pièges que recèlent des situations complexes et, le cas échéant, de présenter des solutions adéquates.

L’éventail des connaissances complémentaires et indispensables est très large : techniques du bâtiment, comptabilité, informatique, etc

La formation des syndics professionnels exige donc des enseignements complémentaires dont le niveau doit les porter au niveau des grandes professions comme celles d’avocat, notaire ou architecte dans un autre domaine.

Le régime actuel de l’accès à la profession de syndic ne comporte aucune disposition en ce sens.

 

Ces observations s’appliquent pareillement aux « gestionnaires » salariés des cabinets dès lors qu’ils assument la quasi-totalité des fonctions dévolues au syndic employeur, et notamment la tenue des assemblées générales et les relations avec les copropriétaires, membres ou non du conseil syndical. Faut-il ajouter qu’ils ont vocation à devenir exploitants ou dirigeants de sociétés dédiées ? A ce seul titre, ils doivent justifier d’une formation identique.

 

L’évidente nécessité d’une évolution des conditions d’accès à la profession est connue depuis longtemps. Les instances professionnelles n’ont pas pris parti à cet égard. Elles ne présentent pas de propositions claires et cohérentes. C’est regrettable

Il faut néanmoins rappeler qu’elles ont contribué à la mise en place du BTS et à l’amélioration de la formation continue des salariés.

 

Un autre problème se présente sous la forme d’un bloc indissociable : Gestion financière des syndicat ; rémunération du syndic ; inventaire des prestations et respect des règles de la libre concurrence.

Nous ne nous étendrons pas sur ces points traités de manière exhaustive ici comme ailleurs.

Nous maintenons que la généralisation impérative de la gestion financière par compte séparé devrait mécaniquement provoquer la résorption des conflits affectant gravement la sérénité des relations entre les syndics professionnels et leurs mandants.

A cet égard la position des organisations professionnelles est incompréhensible. Celle des pouvoirs publics l’est tout autant.

 

Nous ne saurions conclure sans évoquer le sort des collaborateurs salariés des cabinets, à tous les niveaux.

Les dirigeants de l’École supérieure des professions immobilières (ESPI) ont signalé à plusieurs reprises le désintérêt des étudiants pour la branche « gestion des copropriétés ».

Les contraintes sont multiples : amplitude incontrôlable des horaires de travail, modicité relative des salaires, relations conflictuelles parfois aiguës tant avec les copropriétaires qu’au sein des cabinets, assujettissement disciplinaire à des procédures ou pratiques contestables voir manifestement illégales sont le lot de maints gestionnaires.

Il est d’intérêt commun, pour les employeurs comme pour les copropriétaires, de remettre de l’ordre dans tout cela.

 

« Bon vent » aux États généraux !

 

 

 

 

Mise à jour

19/03/2011