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7 / 6.3.1

Le régime libre du financement par emprunt  (loi du 10 juillet 1965)
Jean-Pierre Mantelet   DES Droit Privé  ©

 

 

Dans sa version initiale, le statut de la copropriété ne comportait aucune disposition relative à la possibilité ouverte au syndicat des copropriétaires de souscrire un emprunt.

Il y a eu rapidement controverse à ce sujet.

Certains copropriétaires pouvaient légitimement faire valoir qu’ils étaient en mesure de financer les travaux décidés par l’assemblée et refuser de souscrire à un emprunt du syndicat.

A cet égard il faut reprendre en premier lieu deux principes du statut de la copropriété que nous considérons comme fondamentaux :

Le syndicat des copropriétaires est une personne morale juridiquement transparente

Le syndicat des copropriétaires est une personne morale dotée d’un patrimoine virtuel, exclusivement composée de créances et de dettes envers des tiers internes (les copropriétaires) et externes (les fournisseurs, les salariés, les organismes sociaux et fiscaux, etc…). A tout moment le total des dettes est égal au total des créances.  On parle alors d’un patrimoine de transit.

Il faut considérer que le syndicat ne saurait imposer à un copropriétaire l’obligation d’emprunter alors qu’il estime être en mesure de payer au comptant tout appel de fonds à venir pour la réalisation de travaux. Les prérogatives du syndicat sont limitées à la possibilité de décider la constitution de provisions pour travaux futurs dans les conditions prévues par l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965. Ce préfinancement anticipé est admissible.

Il en résulte qu’un emprunt du syndicat, au sens propre du terme, exige une décision d’assemblée prise à l’unanimité des copropriétaires.

 

Mais à l’époque on ne trouve aucune décision de jurisprudence en ce sens. La Cour de cassation n’a été amené à traiter des emprunts du syndicat qu’à propos de la nécessaire habilitation du syndic pour la souscription de l’emprunt et de l’obligation faite au banquier de vérifier soigneusement la régularit de cette habilitation.

Il aura fallu attendre la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 pour lire dans l’article 26-4 nouveau de la loi de 1965 que « l’assemblée générale ne peut, sauf à l’unanimité des voix des copropriétaires, décider la souscription d’un emprunt bancaire au nom du syndicat des copropriétaires … »

La législateur aurait pu se contenter de cette phrase. Il a cru devoir ajouter « …pour le financement de travaux régulièrement votés concernant les parties communes ou de travaux d’intérêt collectif sur parties privatives régulièrement votés, soit des actes d’acquisition conformes à l’objet du syndicat et régulièrement votés ». Il faudrait admettre que, pour des objets autres, l’assemblée pourrait décider un emprunt à la majorité de l’article 24, faute d’autre précision. Passons !

 

 

Les praticiens ont rapidement proposé des remèdes satisfaisants pour faciliter le financement des travaux ou autres opérations importantes.

 

La pratique la plus courante a été celle du groupement d’emprunts individuels auprès d’un même établissement financier réalisé avec le concours du syndicat, dont l’exemple type reste la formule « Copro 100 » d’Entenial, créée par le Comptoir des Entrepreneurs il y a plusieurs dizaines d’années.

La procédure habituelle est simple.

L’ordre du jour figurant dans la convocation à l’assemblée doit comporter une question distincte de celle relative aux travaux. La convocation doit être accompagnée d’un document d’information préalable et d’un projet de résolution.

Le document d’information établi par l’établissement  financier précise les modalités de l’emprunt et, le cas échéant, certaines obligations administratives incombant au syndicat. Elles concernent généralement les cas de mutation de la propriété d’un lot ou la survenance d’un événement susceptible d’affecter les garanties de remboursement.

Il précise l’autonomie de chacun des prêts consentis et l’absence de solidarité des copropriétaires en cas de défaillance de l’un des emprunteurs dans le remboursement. Les frais d’emprunt comportent une assurance à ce titre.

Il est accompagné d’un projet de résolution. Ce projet ne peut faire l’objet d’aucun amendement sauf accord de l’établissement financier.

 

La résolution a pour objet :

De conférer au syndic le pouvoir de recueillir l’accord des copropriétaires désireux d’emprunter et de participer à la constitution des dossiers individuels qu’il collectera pour les présenter ensuite à l’établissement financier.

D’imposer aux copropriétaires emprunteurs les modalités de l’emprunt figurant dans le document d’information. Cette adhésion est confirmée de plus dans les formules individuelles de souscription à l’emprunt.

D’imposer au syndicat le respect des obligations administratives sus-évoquées.

Compte tenu de la liberté qui est laissée aux copropriétaires d’adhérer ou pas à la proposition présentée, comme également de choisir un autre mode d’emprunt, la résolution peut être adoptée à la majorité simple de l’article 24. Il semble toutefois que le projet comporterait l’obligation de l’adopter à une majorité identique à celle nécessaire pour la décision d’effectuer les travaux. Cette exigence serait mal venue car dépourvue de justification cohérente.

 

Pendant de nombreuses années ce mécanisme a fonctionné de manière satisfaisante.

Notons une difficulté relative au recouvrement forcé des quotes-parts de remboursement du capital emprunté. Comme le privilège n’a été institué que pour permettre le paiement des charges, la Cour de cassation a jugé que sa garantie ne pouvait s’étendre à ce remboursement du capital emprunté.[1] . Cette solution s’appliquait aussi bien au syndicat lui-même qu’à un créancier subrogé.

Sur ce point encore il aura fallu attendre la loi du 22 mars 2012 pour lire dans le nouvel article 26-7 « qu’au regard du privilège prévu au 1° bis de l’article 2374 du Code civil, les sommes correspondant au remboursement de l’emprunt ainsi qu’au paiement des accessoires sont assimilées au paiement des charges et travaux ».

 

 

 

Curieusement, l’emprunt du syndicat n’est pas enregistré dans la comptabilité du syndicat. Pendant le temps courant de l’encaissement des fonds empruntés jusqu’au complet remboursement, on ne peut trouver sa trace dans la balance générale du syndicat.

Outre le caractère anormal de ce recel d’information, un inconvénient majeur est le risque pour le syndic d’omettre l’existence de cet emprunt dans un état daté ou dans la note complémentaire l’accompagnant.

 

 

L’article  10 de l’arrêté du 14 mars 2005 indique que « l’enregistrement comptable des emprunts se limite à traiter les flux de trésorerie correspondants. »

Les écritures sont les suivantes.

A réception des fonds empruntés, le compte 712 « Emprunt » est crédité par le débit du compte 51 « Banques, établissements financiers et assimilés » avec le libellé « Emprunt travaux ».

Ce mécanisme n’est pas satisfaisant. Nous estimons en effet que les comptes individuels des copropriétaires doivent comporter la trace des opérations effectuées, tant en ce qui concerne le coût des travaux qu’en ce qui concerne le financement par emprunt.

Les écritures nécessaires s’entendent aussi bien des appels de fonds effectués (il peut s’agir dans ce cas d’un appel unique ), que de la quote-part de l’emprunt imputée à chacun des copropriétaires.

 

Pour le traitement des annuités d’emprunt, l’arrêté impose les opérations suivantes :

1) Préalablement au paiement de l’annuité dont le montant s’entend du capital et des intérêts :

- le compte 450 « Copropriétaire individualisé » ou, s’il a été créé, le sous-compte 450-4 « Copropriétaire - emprunt » est débité par le crédit du compte 704 « Remboursement des annuités d’emprunts » ;

- le compte 450 « Copropriétaire individualisé » ou, s’il a été créé, le sous-compte 450-4 « Copropriétaire - emprunts » est crédité par le débit du compte 51 au moment du paiement par les copropriétaires des sommes appelées en couverture des annuités d’emprunt.

 

2) Au moment du paiement des annuités d’emprunt :

Le compte 661 « Remboursement d’annuités d’emprunt » est débité de la totalité du montant de l’annuité par le crédit du compte 51 « Banques ».

 

Pour le suivi de l’emprunt, l’arrêté indique :

Le montant des annuités restant dû à la clôture de l’exercice au titre de l’emprunt est porté sur l’état financier (annexe n° 1 du décret n° 2005-240 du 14 mars 2005 relatif aux comptes du syndicat des copropriétaires).

 

Ce dispositif ne permet pas aux copropriétaires de contrôler efficacement les opérations.

Il est vraisemblable que les syndics copropriétaires des immeubles importants prendront l’initiative d’enregistrer l’emprunt conformément aux règles de la comptabilité classique, en utilisant l’un des comptes du plan comptable. On voit mal quel reproche pourrait leur être fait à ce sujet.

 

 

Les tentatives de modernisation :

 

Nous avons trouvé dans le site Le Cercle Les Echos (http://lecercle.lesechos.fr) une contribution d’une nouvelle participante, Marie B. dont l’originalité ne saurait être négligée. L’auteure n’est ni une profane, ni une juriste. Son propos s’inscrit dans le contexte économique et financier du Grenelle II Copropriété.

Marie B.. note en premier lieu que, dans les copropriétés, la mise en œuvre des travaux imposés par ce dispositif exigera le recours à l’emprunt. C’est une évidence et l’observation peut être étendue à d’autres types de travaux laissés aux bons soins de copropriétaires, comme la réfection des couvertures.

Elle présente ensuite les groupements d’emprunts individuels de type COPRO 100 comme des emprunts toxiques, dont elle décrit les multiples défauts. Elle utilise pour ce type d’emprunt l’expression « emprunt collectif à adhésion individuelle » (ECAI) qui est admissible.

Elle suggère ensuite logiquement de recourir à l’emprunt du syndicat au sens classique du terme, sans s’attarder, il est vrai, à le décrire aussi finement que COPRO 100.

 

 

2 La tentation de l’Emprunt Collectif à Adhésion individuelle « E.C.A.I. »

Les promoteurs des projets de rénovation en copropriété, conseils syndicaux, syndics et accompagnateurs externes, sont confrontés à la recherche de solutions de financement accessibles à tous de manière à faciliter l’adhésion du plus grand nombre au vote des travaux.

Les solutions de financement privées comme les éventuelles aides et subventions sont fort disparates selon la situation individuelle de chacun ce qui crée des dissensions au sein de la collectivité et nuit à la capacité à « voter la même chose en même temps »

L’emprunt Collectif à Adhésion Individuelle, apparaît alors comme la solution fédératrice susceptible de rassembler tous les acteurs et de permettre à chacun de participer au projet. En effet les conditions d’adhésion au prêt (propriétaire à jour de ses charges et non interdit bancaire) sont beaucoup plus souples que celle d’un contrat individuel (conditions de ressources, assurances et garanties, éventuellement hypothèque). L’attrait est donc indéniable d’autant que le montant peut couvrir 100% des travaux votés en AG et que ce type de contrat ne fait pas appel à la solidarité entre copropriétaires l’organisme, se substituant, le cas échéant, au copropriétaire défaillant pour le remboursement de ses échéances. 

Marie B ne semble connaître ni les sources anciennes, ni l’histoire des ECAI. Elle fait erreur en indiquant qu’en cas de défaillance d’un copropriétaire dans le remboursement, l’organisme « se substitue » au défaillant. Les remboursements sont effectués par une assurance qui est subrogée dans les garanties dont bénéficie le syndicat des copropriétaires (hypothèque, privilèges, etc …) à l’encontre du débiteur.  La grande expérience des établissements financiers pratiquant les ECAI les met à l’abri des risques encourus par les confrères n’ayant pas cette pratique.

 

Les pièges du prêt collectif à adhésion individuelle

L’examen approfondi des conditions de mise en œuvre de ces E.C.A.I. et de leurs incidences, tant pour les « bénéficiaires » que pour le syndicat des copropriétaires, fait apparaître une situation moins idyllique.

L’illustration suivante est un cas d’école. Elle concerne une copropriété de 200 lots instruisant un projet de rénovation énergétique de 3 millions d’euros soit 15 000 € en moyenne pour un F3. La copropriété a une situation économique saine (< 1 % d’impayé), elle est gérée par un syndic professionnel. La simulation est faite sur un E.C.A.I. classique, le prêt COPRO 100 du CREDIT FONCIER présenté par nombre de syndics.   

 

La durée

La durée normale d’amortissement d’une rénovation énergétique globale est de 15 ans ou plus, sachant que la durée de « retour sur investissement » par les économies d’énergie est probablement supérieure. La durée raisonnable de l’emprunt serait donc de 15 ans pour un prêt bancaire classique, mais la durée maximale du prêt COPRO 100, (assorti du taux le plus élevé) est de 10 ans. Cela va donc augmenter le montant de chaque échéance.

 

3.2 Le taux

Le taux actuel annoncé du prêt COPRO 100 sur 10 ans est de 4,70%. Ce taux n’inclut pas le montant de la commission de caution. En réalité la trimestrialité demandée pour 1 000 € empruntés est de 33,43 €. Cela correspond à un taux réel de 6%. En comparaison un copropriétaire en situation financière normale et ayant de bonnes relations avec sa banque peut obtenir des concours sur 15 ans à un taux inférieur à 4%.

3.3 Le montant de remboursement

En intégrant ces deux facteurs, le montant trimestriel du remboursement pour un emprunt de 15 000 € sera bien différent selon le choix :

E.C.A.I  COPRO 100 sur 10 ans : (33,43 x 15)    501,45 €

Prêt bancaire 4% sur 15 ans    333,67  

 

JPM-COPRO : Les sommes empruntées pour la contribution à des travaux communs sont sans commune mesure avec celles empruntées pour l’acquisition du bien. La durée de dix ans est très suffisante dans la quasi totalité des cas. La préférence des emprunteurs va souvent vers cinq ans.

Il est bon de comparer les taux. Mais c’est le montant total des sommes mises à la charge de l’emprunteur, hors remboursement du principal, qu’il faut prendre en considération. Il faut donc prendre tous les postes dans un ECAI, mais aussi tous les postes dans un prêt bancaire notamment les frais d’assurance de l’emprunteur et ceux d’inscription des garanties prises par la banque.

Il faut en outre prendre en considération la simplicité de mise en place de l’ECAI et l’absence de garantie hypothécaire alors qu’elle est exigée par une banque. C’est le caractère collectif de l’ECAI qui permet au préteur ou à l’assureur de bénéficier des garanties du syndicat par le biais de la subrogation.

 

3.4 La dime syndic

Pour la mise en place de ce type de dispositif, le contrat de syndic prévoit des honoraires complémentaires (en sus de la gestion courante) avec deux niveaux de facturation :

• Une facturation forfaitaire initiale de 70 € TTC par lot pour l’ensemble des copropriétaires (soit 14 000 € TTC) correspondant à la mise en place de l’offre de prêt, la collecte et le traitement des adhésions.

• Une facturation annuelle de suivi, répartie entre les seuls adhérents, de 75€ TTC par opération (mouvement) sur le dossier de prêt.

Le coût de la gestion du dossier de prêt, est une véritable arme de dissuasion massive, au moins pour les copropriétaires « avertis ». Dans le cas de référence il représente environ 50% du montant annuel de prestation courante du contrat de syndic. Pour les copropriétaires comme pour les observateurs externes, la correspondance des charges est difficile à établir.

Le coût du suivi du dossier, difficile à prévoir, alourdit encore les charges des adhérents et creuse l’écart entre les deux solutions.

En résumé on peut constater que la solution E.C.A.I. profite :

• A l’organisme financier qui prête à taux élevé pour des risques « biens contrôlés »

• Au syndic qui, sous couvert de solution « fédératrice », prélève des commissions sans aucun risque et favorise le vote de travaux pour lesquels il percevra des honoraires importants.

 

JPM-COPRO :   Les indications relatives aux prétentions émises par les syndics figurent peut-être dans un contrat de syndic. Les diverses rémunérations pouvant être exigées par un syndic sont en fonction de ce qui a été accepté par l’assemblée générale qui l’a désigné. Il est vrai que certains contrats de syndic comportent des clauses très critiquables  à cet égard. Il appartient au conseil syndical et à l’assemblée de les discuter.

En ce qui concerne l’information initiale des copropriétaires, les prestations du syndic sont limitées à l’insertion d’une question dans l’ordre du jour et à la diffusion du projet d’emprunt présenté. La rémunération correspondante entre dans les frais de l’assemblée générale.

Par la suite, le syndic peut percevoir un honoraire au titre du traitement de chaque dossier d’adhésion à l’emprunt. Les prestations sont relativement modestes et la rémunération doit être fixé au temps passé forfaitisé, sans incidence du montant emprunté.

Dans le cas d’un ECAI, le suivi de l’emprunt est réduit à des interventions en cas de mutation de la propriété d’un lot. Ces prestations sont liées à la mutation et doivent être couvertes par l’honoraire particulier propre à l’opération de vente.

Dans la pratique, lorsque le projet de « contrat de syndic » a été soigneusement discuté par le conseil syndical puis l’assemblée générale, les honoraires sont très largement inférieurs à ce qui indiqué par l’auteure.

Dans le cas d’un emprunt du syndicat, les prestations imposées au syndic sont beaucoup plus importantes. Il doit en effet collecter les remboursements périodiques au même titre que les provisions sur charges, pendant toute la durée du prêt soit quinze années dans l’exemple traité.

 

4 Les conséquences de l’E.C.A.I.

4.1 La triple peine pour les « obligés »

Lorsqu’il est possible, le choix de chaque copropriétaire est donc évident.

En pratique il ne restera pour adhérer à l’E.C.A.I que les copropriétaires non éligibles aux prêts bancaires. Ils devront donc subir une triple peine : taux plus élevé, durée plus réduite et dîme récurrente du syndic.

C’est une véritable discrimination financière qui va accélérer et aggraver la plongée dans le surendettement des copropriétaires en délicatesse avec leur banque.

4.2 Le risque pour le syndicat : le leurre de la non solidarité

L’absence de solidarité du syndicat en cas de défaillance des copropriétaires « adhérents » est un leurre. En effet le copropriétaire qui ne pourra pas rembourser son emprunt ne pourra pas a fortiori rembourser ses charges de copropriété, dettes sur lesquelles la solidarité entre copropriétaires joue pleinement, et il faudra donc, dans un climat hostile, résoudre les difficultés prévisibles du syndicat, aggravées par cette forme d’emprunt.

 

JPM-COPRO :   Ces affirmations sont totalement infondées. Dans le cas d’un ECAI l’organisme préteur ne peut agir contre le syndicat en cas de défaillance d’un copropriétaire dans le remboursement. Il est vrai que le débiteur peut être également dans l’incapacité de payer ses charges courantes. Le syndic doit alors procéder au recouvrement judiciaire et l’on peut arriver à la solution extrême de devoir envisager la saisie immobilière du lot. Cette opération doit être menée de concert avec l’organisme prêteur et l’assureur.

La situation se présente de manière identique dans le cas d’un emprunt bancaire courant qui peut aussi être accompagné d’un défaut de paiement des charges courantes. Mais le syndicat doit alors payer néanmoins la totalité de l’échéance périodique de remboursement. Il doit faire son affaire ensuite du recouvrement de l’ensemble de ses créances sur le copropriétaire concerné.

 

4.3 La zizanie dans la collectivité

Lors des assemblées générales, les débats sur ces divergences d’intérêts sont de nature à freiner les décisions collectives et à accentuer les prises de décision absurdes. Notons par ailleurs que les incohérences législatives de la loi de 1965 ouvrent de larges boulevards aux contestataires pour remettre en cause, dans les prétoires, les décisions prises en AG.

4.4 L’échec du Plan Bâtiment Grenelle Chantier Copropriété

L’E.C.A.I., structurellement « divergent » n’est pas le bon « chausse-pied » pour faire accepter la prise de décision commune sur les travaux importants difficilement finançables dans la pratique. Le dispositif n’est donc pas adapté pour favoriser l’atteinte des objectifs du Plan Bâtiment Grenelle Chantier Copropriété.

 

JPM-COPRO : On voit apparaître ici le fondement réel de la contribution de Marie B. Il faut remanier complètement le statut de la copropriété en fonction des besoins prépondérants du Plan Bâtiment Grenelle Chantier Copropriété.

Nous avons déjà évoqué les propositions des fondateurs de Syndic + qui veulent transformer les syndicats de copropriétaires en sociétés immatriculées et déposant leurs comptes annuels.

En l’espèce, rien n’interdit d’utiliser un ECAI pour le financement de travaux effectués dans le cadre du Grenelle Chantier Copropriété. L’auteure ne fournit aucune indication précise à propos d’une incompatibilité réellement établie.

 

5 Le besoin : un emprunt réellement collectif à la personne morale « copropriété »

La problématique de la rénovation énergétique met bien en évidence les déficiences génétiques du statut de la copropriété, dans lequel le collectif est secondaire par rapport au droit de propriété individuelle.

Le problème de financement, pour les copropriétés encore solvables serait grandement simplifié par une approche collective, avec une réelle solidarité, autour d’une entité « copropriété » bénéficiant d’une effective personnalité morale. Elle aurait notamment une capacité d’emprunt auprès des banques et la capacité à recevoir les aides publiques attribuées collectivement et non individuellement. L’emprunt qui correspond à un investissement collectif sera alors remboursé de manière équitable par tous les copropriétaires pendant la durée d’amortissement (et donc transféré implicitement, sans formalité, en cas de mutation).

La gestion administrative serait considérablement allégée avec un seul emprunt et une ligne de charge financière par lot, pour le remboursement.

L’ensemble des dispositions préconisées pour la gouvernance, la gestion comptable et la prise en compte des travaux est décrit dans notre ouvrage « Sauvons les copropriétés - Ce qu’il faut changer ».

En complément, nos suggestions sur le projet de PTZ copropriété suggèrent des modalités pratiques de gestion de ces prêts de nature à favoriser les prises de décision favorables à l’atteinte des objectifs du Grenelle.

 

JPM-COPRO :  La loi du 10 juillet 1965 a eu le mérite de comporter le germe du droit individuel de copropriété. Il consacre la conception unitaire du régime moderne de la copropriété. Dupont ayant acquis le lot 15 est propriétaire du volume d’espace constituant la partie privative de lot. Propriétaire indivis des parties communes, il peut les utiliser et bénéficier des services communs.

Il exerce son droit de copropriété au sein d’une « communauté immobilière », - pour reprendre la traditionnelle expression  provençale. Il jouit des avantages que lui procure la charte commune et subit les contraintes qu’elle lui impose.

L’avenir de cette institution ? On le trouve dans des travaux universitaires tels que l’ouvrage de Florence Bayard-Jammes « La nature juridique du droit du copropriétaire immobilier » (LGDJ Paris 2003 Préface du Professeur D. Tomasin). Ils privilégient l’observation du fonctionnement banal de syndicats de copropriétaires banaux, sans négliger la survenance de pathologies spécifiques, ni l’étude des mesures préventives et des traitements réparateurs. Ils annoncent la réception par le  droit français, dans le projet de réforme du Code civil, de l’acte juridique collectif qui sera le support d’un droit spécifique des conventions et institutions collectives. Il sera alors possible d’exprimer toutes les richesses que recèle la loi du 10 juillet 1965 pour aboutir à une véritable transfiguration du statut de la copropriété.

 

Les bonnes intentions ne peuvent fructifier à l’insu du bon sens commun. « On ne peut se soulever en se tirant par les cheveux ». Cela vient de nous être rappelé utilement.

Traiter le problème du financement des travaux en restreignant l’étude aux « copropriétés encore solvables », c’est présenter de l’ensemble du secteur une image très abusivement réductrice.

Prôner sur tout cela « une approche collective, avec une réelle solidarité, autour d’une entité  copropriété  bénéficiant d’une effective personnalité morale » c’est nier dérisoirement la réalité incontestable du groupement des copropriétaires en une collectivité dotée de la personnalité morale. C’est aussi tenter d’introduire dans l’institution une dose d’angélisme en proclamant la nécessité d’une solidarité juridique et financière absolue, alors qu’elle serait  incompatible avec la sauvegarde du patrimoine propre à chacun des copropriétaires.

 

On commence seulement à comprendre les conditions dans lesquelles sont réalisés les travaux de « requalifications » de certains quartiers, aux frais des contribuables locaux, régionaux, voire nationaux pour une grande part. On est tenté d’y voir une sympathique solidarité parfois assombrie par la revente rapide d’un lot fortement revalorisé par les travaux de réhabilitation. C’est bien le copropriétaire aidé qui empoche la plus-value.

 

En conclusion, à propos de l’emprunt du syndicat :

Il n’y a d’emprunt du syndicat qu’en vertu d’une décision prise à l’unanimité des voix de tous les copropriétaires.

Dans ce cas le service de l’emprunt est assuré par le syndic pendant la durée du remboursement.

En cas de défaillance d’un copropriétaire dans le remboursement du prêt, le syndicat doit payer néanmoins l’intégralité de la somme venue à échéance. Ce qui impose aux autres copropriétaires de consentir une avance pour couvrir l’impayé de leur consort.

Il est possible de remédier à ces inconvénients. Ces remèdes ont un coût.

 

Il est donc bien évident que l’emprunt collectif à adhésion individuelle présente depuis un bon demi-siècle des avantages appréciés par les copropriétaires, les syndics et les entrepreneurs eux-mêmes. On ne voit pas pourquoi il y aurait lieu de recourir à un autre type d’emprunt présentant des inconvénients manifestes.

 

 

Le projet de loi Warsmnn

Faut-il enfin rappeler qu’à ce sujet M. Warsmann a déposé le 28 juillet 2011 une proposition de loi qui n’est pas dénuée d’intérêt. Elle est partiellement critiquée à propos du cautionnement solidaire exigée par ce qui serait l’article 26-7 nouveau de la loi. Le texte est reproduit ci dessous dans la mesure où il concerne les syndicats de copropriétaires.

 

Simplification du droit du logement, de l’aménagement
et de la construction

Article 80

 

 

I. – La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :

 

 Après l’article 26-3, sont insérés des articles 26-4 à 26-8 ainsi rédigés :

 

« Art. 26-4. – L’assemblée générale ne peut, sauf à l’unanimité des voix des copropriétaires, décider la souscription d’un emprunt bancaire au nom du syndicat des copropriétaires pour le financement soit de travaux régulièrement votés concernant les parties communes ou d’intérêt collectif sur parties privatives, soit des actes d’acquisition conformes à l’objet du syndicat et régulièrement votés.

« Toutefois, par dérogation au premier alinéa, l’assemblée générale peut, à la même majorité que celle nécessaire au vote soit des travaux concernant les parties communes ou d’intérêt collectif sur parties privatives, soit des actes d’acquisition conformes à l’objet du syndicat, voter la souscription d’un emprunt bancaire au nom du syndicat des copropriétaires au bénéfice des seuls copropriétaires décidant d’y participer.

« Les copropriétaires qui décident de participer à l’emprunt doivent notifier leur décision au syndic en précisant le montant de l’emprunt qu’ils entendent solliciter, dans la limite de leur quote-part des dépenses. À peine de forclusion, la notification au syndic doit intervenir dans le délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée générale pour les copropriétaires opposants ou défaillants, et, pour les autres copropriétaires, à compter de la tenue de l’assemblée générale.

 

« Art. 26-5. – Le contrat de prêt conclu en application de l’article 26-4, conforme aux conditions générales et particulières du contrat de prêt jointes à l’ordre du jour de l’assemblée générale, ne peut être signé par le syndic avant l’expiration du délai de recours de deux mois prévu au deuxième alinéa de l’article 42.

 

« Art. 26-6. – Le montant de l’emprunt mentionné à l’article 26-4, qui ne peut excéder le montant total des quotes-parts de dépenses des copropriétaires décidant d’y participer, est versé par l’établissement bancaire au syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic.

« Seuls les copropriétaires bénéficiant de l’emprunt sont tenus de contribuer :

« – à son remboursement au syndicat en fonction du montant pour lequel ils participent à l’emprunt, et selon la grille générale établie pour la répartition des quotes-parts de dépenses selon les principes prévus aux articles 10, 10-1 et 30 ;

« – au paiement au syndicat des intérêts, des frais et des honoraires y afférents, en fonction du montant pour lequel ils participent à l’emprunt et selon la grille spécifique établie pour la répartition des accessoires.

 

« Art. 26-7. – Le syndicat des copropriétaires est garanti, en totalité, sans franchise et sans délai de carence, par un cautionnement solidaire, après constat de la défaillance d’un copropriétaire bénéficiant de l’emprunt mentionné à l’article 26-4 pour les sommes correspondant à son remboursement ainsi qu’au paiement des accessoires.

« Le cautionnement solidaire ne peut résulter que d’un engagement écrit fourni par une entreprise d’assurance spécialement agréée, par un établissement de crédit ou une institution mentionnée à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier.

« Au regard du privilège prévu au 1° bis de l’article 2374 du code civil, les sommes correspondant au remboursement de l’emprunt ainsi qu’au paiement des accessoires sont assimilées au paiement des charges et travaux. Après mise en œuvre de la caution, celle-ci est subrogée de plein droit dans l’exercice du privilège du syndicat des copropriétaires prévu au même 1° bis.

 

 

 

Mise à jour

21/03/2013

 

 

 

 



[1]  Cass civ 3e  15-05-2002 Administrer août-septembre 2002 53 note Capoulade