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Circulaire du 7 juillet 2011 relative à la qualité du droit

JORF n°0157 du 8 juillet 2011  Texte n°2

NOR: PRMX1118705C

 

 

Note JPM 13/07/2011

Nous avons connaissance ce jour d’un incident parlementaire susceptible d’apporter un éclairage nouveau à la circulaire et à nos observations.

Il s’agit du rejet du texte du projet de loi sur la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles (3 mars 2011) par la commission mixte parlementaire (CMP). Le projet bénéficiait de la procédure accélérée. Cet incident a eu lieu le 7 juillet 2011.

La CMP s’est offusquée de « l'introduction de chapitres entiers à la veille de la réunion. Ce projet de loi est devenu un texte à tiroirs, une voiture-balai de fin de session »

La Commission se réunira ultérieurement pour examiner le texte.

 

Vous trouverez ci dessous :

La circulaire

Nos commentaires

 

* * *

 

Paris, le 7 juillet 2011

 

Le Premier ministre à Monsieur le ministre d’Etat, Mesdames et Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les secrétaires d’Etat

 

A la qualité de la règle de droit s’attachent des enjeux déterminants pour l’attractivité de notre système juridique et pour notre compétitivité économique. La sécurité juridique, la prévisibilité du droit et la simplification de règles inadaptées ou dépassées sont des attentes régulièrement exprimées par nos concitoyens et nos entreprises.

 

Chaque projet de norme nouvelle doit ainsi être soumis à un examen de nécessité et de proportionnalité aussi circonstancié que possible, au regard de ses effets prévisibles et des exigences de stabilité des situations juridiques. Son élaboration doit en outre être l’occasion d’un réexamen du bien-fondé des règles qu’il est prévu de modifier et de la cohérence d’ensemble de la réglementation correspondante.

 

D’importants progrès ont été accomplis en ce domaine, sous l’effet notamment de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 et de la révision générale des politiques publiques. Ils ont été qualifiés de « changement qualitatif majeur » par le récent rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques intitulé « Mieux légiférer en France ».

 

Au nombre de ces avancées figurent la réalisation d’une étude d’impact à l’appui de chaque projet de loi et des textes réglementaires concernant les entreprises et les collectivités territoriales, l’adoption régulière de trains législatifs de simplification, la diversification des méthodes de consultation sur les projets de réglementation, une nette amélioration des résultats obtenus dans l’application des lois et la transposition des directives européennes.

 

Ces progrès doivent être non seulement consolidés mais amplifiés. Je souhaite qu’ils le soient selon deux axes d’effort principaux.

 

D’une part, le pilotage de la production normative doit se perfectionner, de manière à mieux assurer l’application des lois et la mise en œuvre des réformes. L’organisation de chaque département ministériel doit à cet effet être adaptée pour permettre, en relation étroite avec le secrétariat général du Gouvernement, une programmation précoce des différentes étapes du cheminement des textes identifiés comme prioritaires et un suivi dynamique de ce cheminement.

 

D’autre part, l’intervention de règles de droit nouvelles doit être plus systématiquement subordonnée à l’examen de critères tirés des principes de proportionnalité et de cohérence de l’ordonnancement juridique. Il est en particulier nécessaire de tirer les conséquences des nouvelles règles de partage de l’ordre du jour parlementaire, en veillant à laisser à l’écart des projets de loi toute disposition à caractère réglementaire. La démarche d’évaluation doit donner lieu dans chaque ministère comme au niveau interministériel à une mutualisation des méthodes et des ressources disponibles. La pratique, en cours d’expérimentation, qui consiste à accompagner la publication d’un décret d’une notice expliquant en des termes accessibles à la généralité des citoyens l’objet et la portée du texte ainsi que ses conditions d’entrée en vigueur, a fait ses preuves. Elle doit être généralisée à l’ensemble des décrets réglementaires.

 

Je vous demande de veiller à la mise en œuvre des instructions détaillées en annexe de la présente circulaire, qui remplace les circulaires des 26 août et 30 septembre 2003 relatives à la qualité du droit. Le respect de ces disciplines est de la responsabilité première du ministère à l’origine d’un projet de règle nouvelle.

 

 

A N N E X E S

 

A N N E X E I

 

PILOTAGE DE L’ACTIVITÉ NORMATIVE

 

Organisation du pilotage par département ministériel

 

La production normative est devenue un exercice sous forte contrainte :

 

― elle doit assurer le respect d’échéances diverses : priorités politiques définies par le Gouvernement, échéances de transposition des directives, respect du délai raisonnable pour l’application des lois et du délai d’habilitation pour l’adoption des ordonnances, dates communes d’entrée en vigueur pour les textes concernant les entreprises...

 

― elle doit en même temps se plier à un ensemble de disciplines destinées à mieux maîtriser le volume et l’impact des règles nouvelles : consultations préalables à caractère généraliste ou spécialisé, notamment celle, désormais fréquente, du commissaire à la simplification et de la commission consultative d’évaluation des normes applicables aux collectivités locales ; réalisation d’études et de fiches d’impact...

 

Un ministère ne peut concilier ces différentes contraintes s’il n’est pas doté d’un dispositif de pilotage robuste.

 

Concrètement, il lui faut disposer d’une structure centrale de coordination, qui maîtrise la vision d’ensemble des échéances et connaisse l’état des textes à leurs différents stades d’élaboration :

 

― en interne, elle a une mission d’alerte sur le respect des différents délais et peut en outre aider les services producteurs de textes à mieux maîtriser les contraintes procédurales (par exemple en construisant un calendrier des consultations requises) ;

 

― vers l’extérieur, elle est l’interlocuteur des autorités et services en charge de la programmation interministérielle.

 

Cette fonction revient normalement à la direction des affaires juridiques du ministère. D’autres formes d’organisation sont possibles, en fonction des spécificités ministérielles. Mais quel que soit le choix retenu, il est nécessaire qu’il existe une structure unique compétente pour l’ensemble du ministère, placée sous l’autorité du haut fonctionnaire chargée de la qualité de la réglementation. Et il faut que son responsable puisse accéder à l’ensemble des informations relatives à la production normative du ministère cheminant dans le système d’organisation en ligne des opérations normatives (SOLON).

 

Pour indispensable qu’elle soit, cette centralisation n’est pas suffisante. L’expérience montre qu’elle ne peut atteindre son objectif s’il n’existe pas, dans chaque service producteur, une conscience et une connaissance suffisantes des contraintes et des écueils de la production normative.

 

Enfin, il arrive fréquemment ― c’est l’une des faiblesses manifestes de notre organisation ― que la responsabilité de la production d’un texte ne soit pas pleinement assumée d’un bout à l’autre de la chaîne conduisant à sa publication. Il en résulte de fréquents « temps morts », un projet de texte restant en consultation dans un autre ministère ou en suspens après la consultation du Conseil d’Etat, sans qu’aucune autorité précisément identifiée se sente en charge de son sort.

 

C’est la raison pour laquelle le dossier accompagnant chaque projet de texte devra désormais faire apparaître l’identité du fonctionnaire de la direction productrice, de préférence du rang de sous-directeur ou de chef de bureau, qui sera « responsable » du projet d’un double point de vue : il pourra certifier que les préoccupations de qualité de la production juridique ont été prises en compte ; il vérifiera la pertinence de la programmation ; il devra, directement ou par l’intermédiaire de son directeur, faire les diligences requises s’il apparaît que le projet de texte subit des retards injustifiés. C’est lui que les services du Premier ministre (secrétariat général du Gouvernement ou secrétariat général des affaires européennes) ou la structure centrale de coordination alerteront en cas de détection d’une difficulté ou d’un retard.

 

Cette responsabilisation des directions productrices doit être regardée comme le corollaire nécessaire de la grande dispersion de la production normative qui caractérise le système français, par opposition aux États dotés de services spécialisés.

 

Procédure de programmation des textes prioritaires

 

La programmation des décrets d’application des lois, des mesures nationales d’exécution des directives européennes et de l’entrée en vigueur des textes concernant les entreprises est arrêtée par les services du Premier ministre selon les procédures définies, respectivement, par les circulaires des 27 septembre 2004, 29 février 2008 et 23 mai 2011.

 

La conjonction des contraintes évoquée plus haut fait que ce travail de programmation doit être réalisé de manière plus précoce que ce n’était jusqu’ici l’usage.

 

En pratique, la programmation des décrets d’application des lois sera désormais engagée dès le stade de la mise au point de la rubrique de l’étude d’impact du projet de loi en dressant la liste prévisionnelle. Les directions responsables seront identifiées lors de la réunion de relecture du projet de loi précédant l’inscription à l’ordre du jour du conseil des ministres. Cette programmation sera actualisée si l’impact des évolutions que connaîtra le texte lors de la discussion parlementaire le justifie.

 

Le suivi de sa mise en œuvre donne lieu à actualisation régulière sur le portail interministériel de la qualité et de la simplification du droit.

 

Dispositions relatives au recueil des contreseings

 

Les retards pris dans la procédure d’élaboration des décrets au stade du recueil des contreseings sont un problème identifié de longue date. Ils sont d’autant moins acceptables qu’ils obligent ensuite fréquemment à déclencher des procédures d’urgence pour respecter des échéances de publication liées à des contraintes politiques ou juridiques.

 

En droit, il convient de rappeler que la fonction du contreseing est de permettre au ministre contresignataire, qui n’a pas la qualité de coauteur du décret, de s’assurer que ses services sont prêts à le mettre en œuvre. Il s’y ajoute que le recueil de certains contreseings ne procède pas d’une exigence constitutionnelle, mais d’un souci de bonne administration, dont il serait paradoxal qu’il soit cause de retards injustifiés. Enfin, une large part des textes soumis au contreseing sont le résultat d’un travail interministériel et il n’y a donc pas lieu de reprendre leur examen au fond au stade du contreseing.

 

Ces délais inutiles doivent être abrégés, en appliquant les règles suivantes pour les décrets nécessaires à l’application d’une loi ou à la transposition d’une directive :

 

― pour les décrets en Conseil d’Etat, sauf divergence signalée au secrétariat général du Gouvernement dans la semaine qui suit l’examen du texte par le Conseil d’Etat, un délai maximum d’un mois devra être respecté entre la date de délivrance de la minute du Conseil d’Etat et la date de signature du texte ;

 

― pour les décrets simples ayant fait l’objet d’un arbitrage ou d’un accord interministériel matérialisé par le compte rendu d’une réunion interministérielle, le même délai courra à compter de la date de diffusion du compte rendu ou de la dernière consultation nécessaire.

 

Le secrétariat général du Gouvernement est chargé de revoir avec les bureaux des cabinets les opérations de recueil des contreseings, afin qu’elles soient compatibles avec ces règles.

 

Il lui est par ailleurs demandé de veiller à la bonne hiérarchisation de la production réglementaire des ministères, et de traiter prioritairement les textes présentant un enjeu politique ou juridique.

 

A N N E X E I I

 

DISCIPLINES À SUIVRE DANS L’ÉLABORATION

 

DE PROJETS DE RÉGLEMENTATION

 

En sus des règles énoncées par le guide pour l’élaboration des textes législatifs et réglementaires (accessible sur la page d’accueil de Légifrance), sont à respecter les obligations suivantes, que les hauts fonctionnaires chargés de la qualité de la réglementation ont la responsabilité de promouvoir au sein de leur département ministériel dans l’exercice de leurs missions de pilotage de la production normative, de conseil aux services rédacteurs, voire de supervision d’actions de formation.

 

Respect du partage entre les domaines de la loi et du règlement

 

L’élaboration de l’étude d’impact d’un projet de loi doit être l’occasion d’accorder une attention particulière au respect du partage entre les domaines respectifs de la loi et du règlement opéré par les articles 34 et 37 de la Constitution.

 

Si nécessaire, le secrétariat général du Gouvernement ajuste en conséquence, avec l’accord de mon cabinet, les projets de texte en cours d’élaboration, y compris au stade de la mise au point préalable à la saisine du Conseil d’Etat.

 

Exigences d’évaluation préalable

 

L’analyse de la nécessité, de la proportionnalité et des effets prévisibles des règles de droit nouvelles est une méthode à laquelle l’administration doit s’attacher dans l’élaboration de toute norme législative ou réglementaire. Pour les projets de loi, elle s’effectue selon les méthodes définies par la circulaire du 15 avril 2009 relative à la procédure législative et, pour les projets de texte réglementaire, selon les méthodes fixées par la circulaire du 17 février 2011 relative à la simplification des normes concernant les collectivités territoriales et les entreprises ainsi que par la circulaire du 23 mai 2011 relative aux dates communes d’entrée en vigueur des normes concernant les entreprises.

 

Chaque département ministériel a la responsabilité de développer dans son champ de compétence les ressources utiles à ces travaux. Le secrétariat général du Gouvernement anime le réseau de ces pôles ministériels de ressources.

 

Consolidation des projets de texte législatifs et réglementaires

 

Seule est de nature à garantir la correcte rédaction d’un projet de texte modificatif et à prévenir les risques de malfaçon la pratique consistant pour le rédacteur à élaborer conjointement ce projet et la version du ou des textes modifiés en résultant.

 

Dans l’hypothèse où un projet de texte modifie un texte existant, son élaboration doit donner lieu à la mise au point d’un document faisant apparaître les dispositions qu’il s’agit de réformer dans leur version résultant du projet, sous la forme de modifications apparentes. Ce document sera actualisé tout au long du cheminement du projet de texte et constituera une base de travail pour le travail inter services et interministériel.

 

Composition des dossiers de saisine du Conseil d’Etat et du secrétariat général du Gouvernement

 

Sous peine de report de l’instruction, les dossiers des projets de décret soumis à l’examen du Conseil d’Etat ou transmis au secrétariat général du Gouvernement en vue de leur publication comprennent :

 

― une fiche recensant l’ensemble des consultations obligatoires et mentionnant la date à laquelle il y a été ou sera procédé, à laquelle sont joints les avis rendus ou, à défaut, les lettres de saisine des organismes consultés ;

 

― une fiche présentant les conditions d’application outre-mer du projet de texte et les consultations qui s’en déduisent ;

 

― une fiche exposant le raisonnement tenu quant à la nécessité de mesures transitoires et leurs modalités ;

 

― pour les projets de décret modifiant les textes en vigueur, la version consolidée du texte modifié en faisant apparaître les modifications en corrections apparentes ;

 

― en cas de transposition de directive, un tableau de concordance entre les dispositions de droit de l’Union à mettre en œuvre et le droit national établi suivant le modèle figurant dans le guide pour l’élaboration des textes législatifs et réglementaires ;

 

― dans l’hypothèse où le projet créerait ou réformerait une commission consultative, l’étude de nécessité prévue par l’article 2 du décret n° 2006-62 du 8 juin 2006 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif. L’étude fait apparaître avec précision l’adéquation de ce projet avec les termes de la circulaire du 8 décembre 2008 relative à la modernisation de la consultation, en prenant appui sur la base de données des instances existantes régulièrement actualisée par le secrétariat général du Gouvernement et consultable sur le portail interministériel de la qualité et de la simplification du droit.

 

Production d’une notice explicative à l’appui des décrets réglementaires

 

La publication des décrets réglementaires, d’une part, et de certains arrêtés réglementaires, dont ceux concernant les entreprises, d’autre part, s’accompagne d’une notice explicative, c’est-à-dire d’un document synthétique destiné à éclairer le lecteur du Journal officiel de la République française sur la portée du texte nouveau. La notice se substitue au rapport de présentation, hors les cas où celui-ci est prévu par les textes, comme dans le cas des rapports de présentation des ordonnances.

 

Une notice n’est ni un support de communication ni un commentaire juridique : sa seule vocation est de donner une information fiable et accessible sur la nature et la portée des mesures susceptibles d’intéresser directement les destinataires des textes. Sa mise au point est l’occasion pour l’administration qui en a la charge de faire l’effort, dès le stade de son élaboration, de se placer du point de vue de ces derniers pour apprécier les effets qu’ils en percevront.

 

La notice doit éclairer ses destinataires sur la portée du texte. Il est préconisé de la concevoir comme un document court (une demi-page).

 

La rubrique « Objet » caractérise, en un nombre limité de mots-clés, l’objet du texte. Sa mise au point ne dispense pas le rédacteur de prêter une attention particulière à l’intitulé du texte qui est un élément déterminant pour sa compréhension.

 

La rubrique « Entrée en vigueur » indique si les règles nouvelles affectent des situations en cours. Elle détaille, le cas échéant, les mécanismes d’entrée en vigueur différée ainsi que, s’il y a lieu, le calendrier des mesures transitoires. Dans le cas où l’entrée en vigueur du texte est régie par la règle de droit commun de l’article 1er du code civil, il est indiqué : « Le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication. »

 

La rubrique « Notice » doit être rédigée dans une langue d’usage courant. Elle doit être compréhensible pour un public qui, tout en prêtant intérêt à la réforme, n’est pas nécessairement par avance averti de ses tenants et aboutissants. Au cas où plusieurs catégories de destinataires sont potentiellement concernées (professionnels, particuliers, ...), la rédaction doit être conçue pour être accessible au public le moins averti.

 

Cette rubrique doit exposer de manière précise et concise l’objet de la réforme emportée par le texte. En cas de texte modificatif, on s’attachera à y faire apparaître la portée des innovations que celui-ci emporte.

 

La rubrique « Références » précise que le texte modifié peut être consulté sur Légifrance (exemple : « le texte modifié par le présent décret peut être consulté, dans sa rédaction issue de cette modification, sur le site Légifrance [http://www.legifrance.gouv.fr] »). Le cas échéant, elle donne la référence des normes de rang supérieur (directives, lois) dont le texte fait application (exemple 1 : « Le présent décret est pris pour l’application de l’article x de la loi n° xxxx-xx du 00/00/xxxx. » ; exemple 2 : « Le présent décret met en œuvre l’article x de la directive xxxx-xx du 00/00/xxxx. »).

 

François Fillon

 

 

commentaires

 

En écrivant : « A la qualité de la règle de droit s’attachent des enjeux déterminants pour l’attractivité de notre système juridique et pour notre compétitivité économique. La sécurité juridique, la prévisibilité du droit et la simplification de règles inadaptées ou dépassées sont des attentes régulièrement exprimées par nos concitoyens et nos entreprises. », le Premier Ministre annonce une remise en ordre de portée générale et un « souffle » nouveau.

Nous retenons surtout 

La sécurité juridique

La prévisibilité du droit

Sans nier l’intérêt de la simplification de règles inadaptées ou dépassées

 

Il y a sans nul doute dans la circulaire des recommandations judicieuses aux ministères pour  l’établissement des projets de loi et des textes réglementaires. Nous laissons aux spécialistes le soin de les commenter. Nous recherchons dans la circulaire ce qui peut manifester un souci de remédier à certains vices de la « production des textes » qui polluent le « droit » depuis plusieurs décennies.

A cet égard, nous resterons dans le domaine du statut de la copropriété. C’est un bon exemple. On connaît aussi bien la grande qualité de la loi du 10 Juillet 1965 que son vice principal : l’oubli total de dispositions transitoires propres à permettre son application harmonieuse aux copropriétés nées antérieurement. Il aura fallu attendre trente-cinq ans (Loi du 13 décembre 2000) pour voir apparaître la procédure d’adaptation établie par l’article 49 dont le caractère impératif a été immédiatement contesté, faute d’avoir été clairement précisé. L’adaptation était limitée aux modifications législatives intervenues après l’établissement du règlement de copropriété.

Six années encore (Loi du 13 décembre 2006) auront été nécessaires pour que l’adaptation puisse concerner  légalement les modifications réglementaires ! Il reste néanmoins difficile, - et de fait impossible -, de modifier une base de répartition de charges devenue contraire aux dispositions de l’article 10 al. 1.

On connaît bien aussi toutes les misères faîtes à la loi du 10 juillet 1965 depuis sa promulgation.

 

Notre domaine présente la particularité d’être placé sous les tutelles conjointes du Ministère de la Justice du Ministère du Logement. Conjointe ne veut pas toujours dire en harmonie.

Le Ministère du Logement avait sans nul doute vocation à traiter l’établissement du carnet d’entretien de l’immeuble. C’est pourtant le Ministère de la Justice qui a établi le texte du décret n° 2001-477 du 30 mai 2001, sauf erreur de notre part.

En revanche des textes purement juridiques ou comptables nous sont venus du Ministère du Logement.

Ainsi pour le  décret et l’arrêté du 14 mars 2005, précisant le régime de la comptabilité des syndicats de copropriétaires, sur lesquels nous reviendrons plus loin. C’est en effet le Ministère du Logement qui a publié sur son site un Guide, vite oublié d’ailleurs. Le texte de l’article 14-3 avait été préparé au Ministère de la Justice, ce qui explique sans doute les contradictions majeures évoquées plus loin.

Pour certaines questions écrites, les Parlementaires choisissent le Ministère destinataire en fonction de la réponse qu’ils souhaitent obtenir. Il arrive que les services de l’Assemblée nationale ou du Sénat rectifient le trajet souhaité.

Pour illustrer ces observations, nous évoquons deux exemples. L’un concerne le Livret A des syndicats de copropriétaires, l’autre concerne la généralisation du compte séparé.

 

Les mésaventures du Livret A des syndicats de copropriétaires

Le meilleur mode de placement des réserves d’un syndicat est le livret A. Il bénéficie de la défiscalisation à hauteur de 76 500 €.

La Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME) a permis à toutes les banques d’ouvrir des livrets d’épargne à compter du 1er janvier 2009. Mais une bévue dans la rédaction du texte définissant les personnes éligibles à l’obtention d’un Livret A a entraîné l’élimination des syndicats de copropriétaires !

Lors de la discussion (Sénat 1ere lecture) de la loi Boutin de Mobilisation pour le logement n° 2009-323 du 25 mars 2009 le Groupe communiste républicain et citoyen a défendu un amendement n° 306 tendant au rétablissement de la situation antérieure.

Madame Boutin, Ministre du Logement et de la Ville, s’est opposée à l’adoption de l’amendement en déclarant notamment à l’un des intervenants :

« Monsieur Le Cam, je voudrais vous faire remarquer que le syndicat de copropriétaires est une personne morale transparente qui ne peut détenir des fonds. Il convient de s'interroger sur le destinataire final des intérêts qui seraient produits par ce compte d'épargne majoré.

C’est finalement Madame Lagarde, Ministre des Finances, qui a fait insérer dans la Loi portant réforme du crédit à la consommation du  21 juin 2010 l’article 60 modifiant à cet effet l’article L. 221‑3 du code monétaire et financier et ainsi restitué aux syndicats de copropriétaires l’éligibilité.

 

Si Comité de pilotage il y a, il serait souhaitable de remédier à cette situation et  maintenir chacun des deux ministères dans son domaine de compétence, tout en fixant les modalités de coordination appropriées. Il est souhaitable que les questions parlementaires sur une question purement juridique soient adressées au Ministère de la Justice tandis que celles à coloration technique iront au Ministère du logement.

Pour les premières, en fonction de l’actualité présente, on peut citer celles relatives à la suppression de la dispense d’ouverture d’un compte séparé.

Pour les secondes, on peut citer une grande partie de ce qui concerne Grenelle II pour les copropriétés, en ce compris les modalités de financement. L’exécution dans les parties privatives de travaux décidés par l’assemblée peut poser des problèmes juridiques. Voilà un sujet de concertation.

 

Les mésaventures du compte bancaire séparé ouvert au nom du syndicat

L’article 18 de la loi de 1965, modifié par la loi SRU du 13 décembre 2000, établit le principe du dépôt des fonds constituant la trésorerie syndicale dans un compte bancaire séparé ouvert au nom du nom du syndicat. Le but de cette sage mesure est d’assurer la sécurité de ces fonds et la maîtrise permanente des copropriétaires sur la trésorerie. Malheureusement, l’article 18 comporte une dérogation sous la forme d’une dispense de l’obligation d’ouvrir un compte séparé que peut accorder l’assemblée au syndic.

L’Association des Responsables de copropriété fait à juste titre campagne pour la suppression de cette dispense. Elle a cru devoir inciter les parlementaires à déposer des rafales de questions écrites censées peser sur le Gouvernement pour obtenir satisfaction.

C’est dans ce cadre que M. Jean-Pierre Marcon, Député ( UMP - Haute-Loire ) a posé le 05/04/2011 un Question écrite n°  104070 à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Il a éprouvé certainement une cruelle déception à la lecture de la réponse  du 21 juin 2011.

On constate avec effarement que M. Marcon et le Secrétariat d’État occultent l’existence du Projet de loi modifiant la loi n° 65557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et réformant l'activité de syndic de copropriété diffusé le 10 juin 2010 et modifié en novembre 2010.

M. Marcon souhaitait manifestement, dans le cadre de la campagne menée par l’ARC, obtenir une réponse favorable à la suppression de la dispense et à la généralisation impérative du compte séparé. Il a pensé pouvoir l’obtenir du Ministère du Logement, réputé plus à l’écoute des associations de consommateurs que la Chancellerie.

Un coup pour rien !

Le secrétariat d’État au logement répond qu’« il semble ressortir des enquêtes menées récemment par diverses associations de consommateurs et de copropriétaires que l'ouverture d'un compte séparé est assez peu pratiquée, les syndics professionnels obtenant généralement la dispense d'ouverture d'un tel compte et l'autorisation de déposer les fonds reçus au nom et pour le compte du syndicat des copropriétaires sur le compte unique ouvert au nom du syndic.

Dans ces conditions, le secrétariat d'État en charge du logement est favorable à ce que, lorsque la dispense de compte séparé a été votée par l'assemblée générale, le syndic doive ouvrir un sous-compte au nom du syndicat des copropriétaires. ». Grossière erreur juridique ! Le rédacteur de la réponse ignore que le recours à un sous-compte du compte unique du syndic n’apporte aucune sécurité financière aux copropriétaires.

 

Nous reproduisons ci-dessous la question et la réponse.

 

Texte de la question

M. Jean-Pierre Marcon appelle l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement, sur les problèmes rencontrés par nos concitoyens avec certains syndics de copropriété. En fait, ce sont près de huit millions de Français qui sont copropriétaires. À plusieurs reprises des abus de la part de certains syndics de copropriété ont été mis à jour. Ainsi, le compte bancaire séparé, normalement obligatoire dans toute copropriété, n'est que très rarement ouvert. Lorsque c'est le cas, on assiste à une augmentation des honoraires des syndics qui peut aller jusqu'à plus de 20 %, augmentation dont on comprend mal la justification. Or il s'avère pourtant que seul le compte bancaire séparé offre à la fois la sécurité juridique et la transparence nécessaire dans la gestion des fonds de la copropriété. On comprend mal les réticences de certains professionnels. Ces derniers auraient pourtant tout à gagner en offrant à leurs clients la plus grande transparence. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures que le Gouvernement entend prendre en vue d'encadrer plus strictement les syndics de copropriétés et de rendre obligatoire car nécessaire le compte séparé, sans possibilité de dispense.

 

Texte de la réponse

 

La loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) a modifié la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis pour imposer aux syndics l'ouverture d'un compte séparé au nom de chaque syndicat de copropriétaires, sauf dispense accordée par l'assemblée générale lorsque le syndic est un professionnel soumis à la loi Hoguet. Toutefois, il semble ressortir des enquêtes menées récemment par diverses associations de consommateurs et de copropriétaires que l'ouverture d'un compte séparé est assez peu pratiquée, les syndics professionnels obtenant généralement la dispense d'ouverture d'un tel compte et l'autorisation de déposer les fonds reçus au nom et pour le compte du syndicat des copropriétaires sur le compte unique ouvert au nom du syndic. Dans ces conditions, le secrétariat d'État en charge du logement est favorable à ce que, lorsque la dispense de compte séparé a été votée par l'assemblée générale, le syndic doive ouvrir un sous-compte au nom du syndicat des copropriétaires.

 

Nous devons signaler que le Ministère a répondu dans des termes strictement identiques ) à la question posée la 7 avril 2001 sous le n° 17798 par Madame Terrade (CRC-SPG), sénatrice.

 

Revenons au contenu de cette importante circulaire.

Elle  indique :

« Chaque projet de norme nouvelle doit ainsi être soumis à un examen de nécessité et de proportionnalité aussi circonstancié que possible, au regard de ses effets prévisibles et des exigences de stabilité des situations juridiques. Son élaboration doit en outre être l’occasion d’un réexamen du bien-fondé des règles qu’il est prévu de modifier et de la cohérence d’ensemble de la réglementation correspondante. »

Dans notre domaine les errements et revirements de jurisprudence se sont multipliés depuis 1965. Citons au hasard quelques exemples :

Il aura fallu l’arrêt rendu le 9 avril 2008 par la Cour de cassation pour savoir ce qu’est un « compte bancaire séparé ». Auparavant les Juges du fond ont admis comme « comptes séparés » des comptes individualisés, des sous-comptes du compte unique du syndic et autres formules manifestement contraires au vœu mal exprimé du législateur.

Au nom de l’ordre public invoqué par l’article 43 des clauses légitimes de règlements de copropriété antérieurs à 1965 ont été déclarées non écrites dans un premier temps puis ressuscitées par la suite.

Le délai prévu par l’article 42 alinéa 2 pour l’action en contestations des décisions de l’assemblée a été appliqué strictement dans un premier temps, puis de manière laxiste et hasardeuse. On est maintenant revenu à l’effet « couperet » du délai. Mais on continue de parler d’une « action en nullité de l’assemblée » qu’on rechercherait vainement dans la loi de 1965.

Ces incertitudes font injure à la sécurité juridique comme à l’exigence de stabilité des situations juridiques.

 

Pour en venir à des réformes récentes, on peut citer une « rustine » relative à la rémunération des syndics professionnels.

Le régime des honoraires sur travaux a été modifié par l’insertion de l’article 18-1-A dans la loi de 1965 (loi n°2009-323 du 25 mars 2009 art. 17) ainsi conçu :

« Seuls les travaux mentionnés à l’article 14-2 et votés par l’assemblée générale des copropriétaires en application des articles 24, 25, 26, 26-3 et 30 peuvent faire l’objet d’honoraires spécifiques au profit du syndic. Ces honoraires sont votés lors de la même assemblée générale que les travaux concernés, aux mêmes règles de majorité. »

En admettant pour les besoins du débat l’existence d’un contrat de syndic, toute convention synallagmatique doit préciser les obligations réciproques des parties et notamment le prix ou le salaire, à défaut les modalités précises de leur établissement.

L’article 18-1-A a le mérite incontestable de clairement déterminer les catégories de travaux pour lesquels le syndic peut prétendre à une rémunération spécifique.

Mais en interdisant l’insertion dans le contrat de syndic des modalités de détermination de cette rémunération et en la renvoyant à une décision ultérieure de l’assemblée, l’art. 18-1-A viole les règles élémentaires du droit. Tout se passe comme si un patron embauchait un salarié en lui indiquant que le montant de son salaire lui sera indiqué ultérieurement.

On se gausse alors de « Chaque projet de norme nouvelle doit ainsi être soumis à un examen de nécessité et de proportionnalité aussi circonstancié que possible, au regard de ses effets prévisibles et des exigences de stabilité des situations juridiques » ! L’expérience montre que les copropriétaires ont perdu le bénéfice du plafonnement des honoraires sur travaux qui figurait dans les contrats de syndic. Tel professionnel qui indiquait couramment un taux de 4 % réclame maintenant 5 % pour se ménager une marge de discussion. Mais il lui arrive d’obtenir les 5 % réclamés !!!

 

Venons-en aux textes réglementaires, c’est à dire les décrets d’application.

Il résulte de l’article 64 du décret (Hoguet) du 20 juillet 1972 que le syndic professionnel est dispensé de tout mandat écrit. Sa qualité de syndic résulte exclusivement d’une décision de désignation émanant de l’assemblée générale. La preuve de cette désignation est constituée par le procès-verbal de l’assemblée. Il est ainsi le représentant légal du syndicat et son mandataire social.

Le mandat social est étranger au contrat de mandat du Code civil.

La loi du 10 juillet 1965, à ce jour encore, ne fait pas mention du contrat de syndic.

L’article 29 du décret du 17 mars, à la suite de sa modification par le décret du 27 avril 2004, précise pourtant le contenu du contrat de mandat de syndic

Comment un décret d’application peut-il traiter d’un « contrat de mandat du syndic » qui n’existe pas dans le texte fondateur, modifié des dizaines de fois depuis sa promulgation ? A-t-on voulu éviter le débat juridique à propos de ce contrat ?

 

L’article 14-3 de la loi précise notamment :

« Les charges et les produits du syndicat, prévus au plan comptable, sont enregistrés dès leur engagement juridique par le syndic indépendamment de leur règlement. L’engagement est soldé par le règlement. ».

L’engagement juridique est généré par l’envoi d’un ordre de service ou la signature d’un marché de travaux.

Le décret et l’arrêté du 14 mars 2005 ne respecte que très partiellement le principe de la comptabilité d’engagement juridique édicté par l’article 14-3.

 

On se plait alors à constater que la circulaire traite du « Respect du partage entre les domaines de la loi et du règlement », rappelant à ce sujet  les articles 34 et 37 de la Constitution.

 

On peut reprocher respectueusement à la circulaire de garder le silence à propos de la qualité de la rédaction des textes, du respect de la langue française et du souci de la terminologie, relèverait-elle du jargon de la matière.

Dans bien des cas, chez nous, la désignation d’un acte ou d’un document exige une ligne entière. On peut citer à ce propos :

« L’avance constituant la réserve prévue au règlement de copropriété » pour ce que tout copropriétaire appelle justement le « fonds de roulement ».

« L’avis indiquant le montant de la somme exigible et l’objet de la dépense » pour « appel de fonds », observation étant faite que l’expression omet l’obligation d’indiquer le mode de calcul du montant réclamé.

« Les charges constatées pour les travaux et opérations exceptionnelles » pour charges exceptionnelles.

«  L’emprunt du syndicat auprès des copropriétaires ou de certains d’entre eux » pour pallier une insuffisance de trésorerie, observation étant faite qu’il ne peut s’agir juridiquement d’un emprunt, mais d’une cotisation comme c’est le cas pour tous les appels de fonds décidés par l’assemblée.

 

On trouve de joyeux exemples dans l’arrêté de M. Novelle du 19 mars 2010,  :

« Les opérations effectuées par les administrateurs d’immeuble ou syndics de copropriété qui figurent dans le tableau annexe relèvent de la gestion courante. Cette annexe énumère la liste minimale des prestations incluses dans le forfait annuel »

« les documents et décisions de justice relative à l’immeuble dont les délais de contestation ne sont pas révolus »

Un mois seulement plus tard le décret n° 2010-391 du 20 avril 2010 a contredit l’arrêté sur certains points.

 

On ne peut donner un meilleur exemple des difficultés de coordination entre les Ministères.

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

13/07/2011