Travaux affectant les parties communes

Lot boutique - Nouvelle location avec changement d’activité

ratification de travaux non autorisés

Ratification implicite de travaux non énoncés (non)

 

 

Cassation  civile 3e 28 mars 2007                                                  Cassation

Cour d’appel de Versailles (4e chambre) 12-12-2005

N° de pourvoi : 06-11947

 

 

 

 

Sur le moyen unique, qui est recevable :

 

Vu l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 ;

 

Attendu que ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ;

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X..., propriétaire depuis 2000 d’un lot de copropriété à usage de box qui subissait des fuites d’eau provenant d’une laverie automatique exploitée dans un lot situé au-dessus, a assigné la SCI Notre Dame (la SCI), propriétaire, afin que soit supprimée la canalisation d’évacuation des eaux usées de la blanchisserie, laquelle l’avait fait installer par la société Atec en 1995 pour se raccorder après percement de la dalle au collecteur général implanté en partie haute du box sans avoir sollicité l’autorisation du précédent propriétaire ni de la copropriété ;

 

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande, l’arrêt retient que l’assemblée générale du 25 mars 1996 avait ratifié les travaux réalisés par la SCI d’aménagement d’un conduit d’air de 300 millimètres de diamètre avec dépassement de la terrasse de 30 centimètres permettant l’exploitation d’une laverie automatique, que le local commercial disposait en tout et pour tout d’un lavabo et d’un WC, qu’il en résultait que le syndicat des copropriétaires avait accepté l’installation d’une laverie automatique alors que l’ancienne boutique ne comportait pas d’évacuation appropriée correspondant à celles spécifiques nécessaires à une telle exploitation qui contient plusieurs machines à laver et qu’il résultait de ces différents éléments que le syndicat des copropriétaires avait implicitement autorisé les travaux de raccordement de la laverie au réseau commun de l’immeuble ;

 

 

Qu’en statuant ainsi, alors que l’autorisation accordée à un copropriétaire d’effectuer à ses frais des travaux affectant les parties communes de l’immeuble placé sous le régime de la copropriété, qui ne peut être implicite, doit être donnée par une décision de l’assemblée générale des copropriétaires, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

 

PAR CES MOTIFS :

 

 

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 décembre 2005, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée ;

 

Condamne la SCI Notre Dame aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la SCI Notre Dame à payer à M. X... la somme de 2 000 euros ; rejette la demande de la SCI Notre Dame et de M. Y..., ès qualités ;

 

 

 

Commentaires :

 

Il faut tirer de nombreux enseignements, juridiques et pratiques, de cette décision. La réalisation de travaux d’aménagement de boutiques, à l’occasion de la location avec changement d’activité, est à l’origine de nombreux soucis pour les copropriétaires de l’immeuble concerné. Les professionnels en portent la responsabilité, qu’il s’agisse des nouveaux locataires ou des professionnels immobiliers ayant participé à l’opération.

 

En l’espèce, la SCI Notre Dame a donné à bail une boutique de blanchisserie, mais pour l’activité nouvelle de laverie automatique.  Il a été procédé, sans autorisation préalable de l’assemblée des copropriétaires, à la l’installation d’une canalisation d’évacuation des eaux usées de la blanchisserie raccordée après percement de la dalle au collecteur général implanté en partie haute du box de M. X., autre copropriétaire, situé sous la boutique. Ce box subissait des fuites d’eau provenant de la canalisation.

 

M. X. avait donc demandé la suppression de cette canalisation installée irrégulièrement.

Il avait été débouté par la Cour d’appel de Versailles. Celle ci avait retenu :

- que l’assemblée générale du 25 mars 1996 avait ratifié les travaux réalisés par la SCI d’aménagement d’un conduit d’air de 300 millimètres de diamètre avec dépassement de la terrasse de 30 centimètres permettant l’exploitation d’une laverie automatique

- que le local commercial disposait en tout et pour tout d’un lavabo et d’un WC

- que le syndicat des copropriétaires avait accepté l’installation d’une laverie automatique alors que l’ancienne boutique ne comportait pas d’évacuation appropriée correspondant à celles spécifiques nécessaires à une telle exploitation qui contient plusieurs machines à laver

- qu’il résultait de ces différents éléments que le syndicat des copropriétaires avait implicitement autorisé les travaux de raccordement de la laverie au réseau commun de l’immeuble

 

En d’autres termes : les copropriétaires réunis en assemblée ne pouvaient ignorer

- que l’exploitation d’une laverie automatique exige une installation d’évacuation des eaux importante

- que la boutique n’était pourvue que d’un lavabo et un W-C et, par conséquent, que d’une installation de vidage modeste.

On suppose que la Cour d’appel admettait la nécessité d’assurer la prévention des fuites, mais elle refusait de déclarer irrégulière l’installation, compte tenu de la décision de ratification prise par l’assemblée.

 

 

C’est fort justement, à notre avis, que la Cour de cassation a cassé cet arrêt en condamnant tout particulièrement la notion d’autorisation implicite. Les différents aménagements affectant les parties communes de l’immeuble doivent être précisés. Il en est de même pour les modalités de réalisation des aménagements. Le cas échéant, des plans doivent être visés pour prendre valeur contractuelle.

Ces préconisations applicables à la demande d’autorisation préalable s’appliquent a fortiori à une demande de ratification postérieure.

 

Les règles relatives à l’information préalable des copropriétaires sur la nature et le contenu des décisions qu’ils sont invités à prendre doivent recevoir ici leur pleine application. Le bailleur et son locataire (ou candidat locataire) doivent prendre l’initiative spontanée de cette information. Le syndic doit y veiller et exiger des informations complémentaires s’il y a lieu. Il peut légitimement provoquer l’avis d’un technicien après avis du conseil syndical. Il doit enfin fournir aux copropriétaires, à partir du dossier présenté, des informations complètes et accessibles à des profanes, ainsi que l’avis du technicien. Dans la mesure de ses propres connaissances, et en vertu de son obligation de conseil, il doit attirer l’attention des copropriétaires, sur des risques juridiques ou techniques.

 

Il existe donc, dans le cas de conclusion d’un bail commercial exigeant l’exécution de travaux préalables à la mise en route de l’activité commerciale, des obligations strictes incombant respectivement

Au candidat locataire

Au copropriétaire bailleur

A l’agent immobilier contribuant à la réalisation de l’opération

Au syndic et au conseil syndical lorsqu’il est saisi de la question.

 

Le candidat locataire doit être en mesure de faire connaître au copropriétaire bailleur le détail des aménagements nécessaires à son exploitation, notamment de ceux exigés par la réglementation propre à son activité (par exemple la ventilation de la salle et de la cuisine pour un restaurant). Il est fréquent qu’une demande d’autorisation de travaux soit formulée après le début de la mise en activité à la suite d’uns inspection administrative. Cette pratique dénonce soit un recel d’information lors de l’entrée dans les lieux, soit l’incompétence professionnelle du locataire.

Le copropriétaire bailleur doit exiger la communication de cette liste et déterminer les formalités exigées par les besoins du candidat locataire. Il peut solliciter à cet effet l’assistance du syndic.

L’administrateur de biens et/ou l’agent immobilier doivent contribuer à ces vérifications et apprécier, compte tenu de l’immeuble et des exigences du candidat locataire, la faisabilité de l’opération.

Nous avons indiqué plus haut les tâches qui incombent au syndic.

Le rôle du conseil syndical demeure secondaire. Ses membres ne sont pas réputés avoir les connaissances des professionnels. Mais l’expérience montre que c’est souvent du conseil syndical que viennent les observations les plus pertinentes.

 

On peut reprocher à certaines juridictions une approche quelque peu laxiste de ces difficultés.

On peut aussi reprocher à certains professionnels immobiliers une préférence marquée pour le bouclage rapide et rémunérateur d’un dossier boiteux.

 

 

 

 

 

Mise à jour

24/06/2007