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Comptabilité du syndicat

Imputation des excédents et insuffisances (art. D 6-2)

Champ d’application de l’art. 6-2

Indemnité d’assurance après sinistre (oui)

 

Voir nos observations critiques et l’évocation du rôle de l’engagement juridique dans ce type d’opération.

 

Cassation civile 3E    19 décembre 2012

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris, du 8 février 2011

N° de pourvoi: 11-17178

 

 

 

 

Donne acte au syndicat des copropriétaires du 1 cité Riverin à Paris du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la société Generali IARD ;

 

Sur le moyen unique :

 

Vu l’article 6-2 du décret du 17 mars 1967 ;

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 8 février 2011), que la société Itraco était propriétaire de plusieurs lots du bâtiment A et des lots 29 et 30 constituant le bâtiment B dans un immeuble en copropriété assuré par la société Generali IARD, qu’à la suite de la rupture de canalisations communes, le bâtiment B s’est effondré et a dû être démoli, qu’au vu du rapport d’expertise judiciaire rendu à la demande de la société Itraco, le syndicat des copropriétaires du 1 cité Riverin (le syndicat) a assigné la société Generali en paiement d’une certaine somme au titre du coût des travaux de remise en état de la cour et de la valeur des lots 29 et 30 rachetés par le syndicat à la société Itraco ; que celle ci a assigné le syndicat et la société Generali en indemnisation de ses divers préjudices et remboursement des frais d’expertise judiciaire, que ces deux procédures ont été jointes ;

 

Attendu que pour condamner le syndicat à payer à la société Itraco la somme de 36 675, 86 euros en remboursement de sa quote-part dans les travaux de confortation et de reconstruction de la copropriété, l’arrêt retient que le remboursement de la somme versée par la société Generali au syndicat en exécution du jugement déféré, devait être effectué au profit des copropriétaires ayant payé ces travaux et ne sauraient profiter aux copropriétaires ayant cette qualité à la date du remboursement, ce qui constituerait un enrichissement sans cause ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors que le trop perçu sur provisions qui apparaît après la mutation à titre onéreux de lots de copropriété est porté au crédit de celui qui est copropriétaire lors de l’approbation des comptes, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné le syndicat des copropriétaires du 1 cité Riverin 75010 Paris à payer à la société Itraco la somme de 36 675, 86 euros en remboursement de la quote-part de celle-ci dans les travaux confortatifs et de reconstruction de la copropriété, l’arrêt rendu le 8 février 2011, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

 

Condamne la société MJA en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Itraco aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société MJA en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Itraco à payer au syndicat des copropriétaires du 1 cité Riverin 75010 Paris la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société MJA ;

 

 

Commentaires :

 

L’article 6-2 du décret du 17 mars 1967 est en passe de ravir à l’article 42 al. 2 de la loi du 10 juillet 1965 sa qualification de « féroce couperet ». Il est ainsi rédige :

 

Article 6-2 Créé par Décret n°2004-479 du 27 mai 2004 - art. 5

« A l’occasion de la mutation à titre onéreux d’un lot :

1° Le paiement de la provision exigible du budget prévisionnel, en application du troisième alinéa de l’article 14-1 de la loi du 10 juillet 1965, incombe au vendeur ;

 

2° Le paiement des provisions des dépenses non comprises dans le budget prévisionnel incombe à celui, vendeur ou acquéreur, qui est copropriétaire au moment de l’exigibilité ;

 

3° Le trop ou moins perçu sur provisions, révélé par l’approbation des comptes, est porté au crédit ou au débit du compte de celui qui est copropriétaire lors de l’approbation des comptes. »

 

On ne compte plus les incidents générés par l’application de ce texte pourtant simple et clair.

Ils trouvent majoritairement leur origine dans la tardiveté, les insuffisances ou la mauvaise exploitation de l’état daté, mais aussi dans les pratiques inappropriées  de certains notaires croyant utile de régler une fois pour toutes les comptes entre le vendeur et l’acquéreur à la date de la signature de la vente.

La pratique inappropriée consiste à affecter d’un prorata temporis la provision sur charges courantes du trimestre en cours à la date de signature de l’acte et à mettre à la charge de l’acquéreur la quote-part postérieure à la vente. Par ailleurs il est précisé dans l’acte que les comptes entre le vendeur et l’acquéreur sont ainsi définitivement apurés.

Or, même en l’absence d’affaires particulières exigeant un traitement spécifique, il arrive fréquemment que l’acquéreur se retrouve quelques mois plus tard, après l’assemblée ayant approuvé les comptes, avec une insuffisance plus ou moins importante à payer, rattachée pour partie, voire en totalité, sur la période antérieure à la signature de la vente.

Il serait donc prudent de laisser à l’acquéreur au moins le bénéfice de la totalité de la provision payée par le vendeur sur le trimestre en cours et, mieux encore, de préciser la possibilité d’un apurement postérieur après l’approbation des comptes.

 

La situation est plus délicate encore lorsqu’il existe une affaire importante  en cours comme une instance judiciaire ou la vente d’une partie commune par exemple. Nous laissons à part l’existence de travaux importants car il ne s’agit pas alors d’un événement exceptionnel.

Un cas fréquent est tout simplement que l’existence de l’affaire n’est pas signalée au notaire. Le syndic est alors le principal responsable. Pour autant le vendeur n’est pas à l’abri d’une action judiciaire.

Dans ce genre d’incident le notaire doit lui-même être prudent. Il ne doit pas se contenter des informations qui lui sont fournies et on lui reproche parfois, compte tenu notamment de la personnalité des parties, - notamment l’acquéreur -, de n’avoir pas cherché à mieux s’informer.

 

Mais la question primordiale, dans le cadre de ce commentaire, est celle relative au sort d’une indemnité d’assurance revenant aux copropriétaires, et plus particulièrement du sort de la quote-part liée au lot vendu par exemple.

 

 

Il doit être bien entendu que l’article 6-2 régit exclusivement :

La provision sur charges courantes (art. 14-1 de la loi) exigible à la date de la signature

Les provisions sur travaux exceptionnels (art. 14-2 de la loi) exigibles à la date de la vente

Le trop ou le moins perçu sur provisions (des art. 14-1 et 14-2 de la loi) révélé par l’approbation des comptes

 

Le syndic doit veiller à fournir au notaire des indications précises sur des opérations particulières pouvant ou non échapper aux dispositions de l’article D 6-2.

Ainsi dans le cas de la cession d’une partie commune (la loge par exemple) décidée avant la vente d’un lot mais non encore réalisée à la date de signature de la vente du lot.

D’une part le contenu du bien vendu est modifié par la vente de la loge

D’autre part il faut veiller à ce que la quote-part du prix de la cession revienne au vendeur dans les conditions prévues par l’article 16-1 ;

Il est encore possible que les parties soient convenues de dispositions différentes dont mention doit être faite dans l’acte et portée à la connaissance du syndic si besoin est.

 

En l’espèce la société Itraco était propriétaire de plusieurs lots du bâtiment A et des lots 29 et 30 constituant le bâtiment B dans un immeuble en copropriété assuré par la société Generali IARD.

À la suite de la rupture de canalisations communes, le bâtiment B s’est effondré et a dû être démoli

Au vu du rapport d’expertise judiciaire rendu à la demande de la société Itraco, le syndicat des copropriétaires du 1 cité Riverin (le syndicat) a assigné la société Generali en paiement d’une certaine somme au titre du coût des travaux de remise en état de la cour et de la valeur des lots 29 et 30 rachetés par le syndicat à la société Itraco

La société Itraco  a assigné le syndicat et la société Generali en indemnisation de ses divers préjudices et remboursement des frais d’expertise judiciaire, que ces deux procédures ont été jointes.

La société Selafa MJA  intervient en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Itraco.

 

La Cour d’appel a condamné le syndicat à payer à la société Itraco la somme de 36 675, 86 euros en remboursement de sa quote-part dans les travaux de confortation et de reconstruction de la copropriété

Elle a retenu que le remboursement de la somme versée par la société Generali au syndicat en exécution du jugement déféré, devait être effectué au profit des copropriétaires ayant payé ces travaux et ne sauraient profiter aux copropriétaires ayant cette qualité à la date du remboursement, ce qui constituerait un enrichissement sans cause

 

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel.

Elle juge « Qu’en statuant ainsi, alors que le trop perçu sur provisions qui apparaît après la mutation à titre onéreux de lots de copropriété est porté au crédit de celui qui est copropriétaire lors de l’approbation des comptes, la cour d’appel a violé le texte susvisé »

 

La lecture des moyens incite à s’interroger sur le bien fondé de cette affirmation compte tenu des faits de la cause.

 

Le liquidateur fait valoir que la somme de 36. 675, 86 € a été versée par la société ITRACO à la copropriété au titre de sa quote-part dans les travaux confortatifs de reconstruction.

Le syndicat des copropriétaires indique qu’à la suite du paiement effectué par la société GENERALI en vertu de l’exécution provisoire du jugement, il a procédé à la répartition de la somme perçue entre les copropriétaires qui étaient effectivement copropriétaires au moment de l’appel de charges du 3e trimestre 2008, et que la société ITRACO qui n’était plus copropriétaire, ne pouvait y prétendre.

 

La Cour d’appel a jugé « que la SELAFA MJA fait pertinemment valoir que le remboursement de la somme versée par la société GENERALI au syndicat des copropriétaires en exécution du jugement déféré doit être effectué au profit des copropriétaires ayant payé ces travaux et ne saurait profiter aux copropriétaires ayant cette qualité à la date du remboursement, ce qui constituerait un enrichissement sans cause »

 

L’argument fondé sur un enrichissement sans cause est ici d’une grande faiblesse. Force est de reconnaître qu’au sens du Code civil il existe une « cause » dans chacun des dossiers.

 

Il nous semble qu’en réalité la quote-part de l’indemnité versée par l’assureur Générali n’entre pas dans le champ d’application de l’article 6-2 du décret du 17 mars 1967.

Il ne s’agit pas d’un excédent entre les provisions versées dans les conditions prévues par l’article 14-2 de la loi de 1965 et le coût des travaux effectués, révélé par l’approbation des comptes d’un exercice.

Il s’agit du paiement d’une créance qui aurait dû sans doute faire l’objet d’un engagement juridique par le syndic ce qui aurait certainement évité le litige.

Ces  constatations suffisent à écarter l’application de l’article 6-2.

 

De plus l’instance en cours justifiait l’insertion dans l’acte de vente d’une clause garantissant les droits de la société ITRACO. Il est vrai qu’une telle clause est inopposable au syndicat. On peut s’interroger sur le caractère peut être trop absolu de cette inopposabilité.

 

Cet arrêt devrait générer des débats fructueux.

 

 

Voir également

La note de M. Yves Rouquet ( « Mutation à titre onéreux de lots: sort du trop-perçu sur provisions » )au Recueil Dalloz, n°2, 17 janvier 2013, Actualité / droit civil, p.88, note Yves Rouquet.

Et la note de M. Christian Atias  dans la revue Annales des loyers et de la propriété commerciale, rurale et immobilière, n°1-2013, janvier 2013, p. 59.

 

 

 

 

 

 

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

 

 

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires 1 cité Riverin

 

 

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné le syndicat des copropriétaires du 1, cité Riverin à payer à la société ITRACO la somme de 36. 675, 86 € en remboursement de la quote-part de celle-ci dans les travaux confortatifs et de reconstruction de la copropriété ;

 

 

AUX MOTIFS QUE « la SELFA MJA, [ liquidateur judiciaire d’ITRACO ]contestant le jugement qui a rejeté cette demande, sollicite le remboursement de la somme de 36. 675, 86 € versée par la société ITRACO à la copropriété au titre de sa quote-part dans les travaux confortatifs de reconstruction ; que le syndicat des copropriétaires réplique que la SELAFA MJA ne peut réclamer le remboursement de la quote-part de la société ITRACO dans les travaux en cause, relatifs aux parties communes, et auxquels chaque copropriétaire doit participer ; qu’à la suite du paiement effectué par la société GENERALI en vertu de l’exécution provisoire du jugement, il a procédé à la répartition de la somme perçue entre les copropriétaires qui étaient effectivement copropriétaires au moment de l’appel de charges du 3e trimestre 2008, et que la société ITRACO qui n’était plus copropriétaire, ne pouvait y prétendre ; qu’au surplus, la société ITRACO n’a réglé qu’une somme de 18. 780, 12 € et ne démontre pas le versement de la somme de 36. 675, 86 € qu’elle allègue ; mais considérant que la SELAFA MJA fait pertinemment valoir que le remboursement de la somme versée par la société GENERALI au syndicat des copropriétaires en exécution du jugement déféré doit être effectué au profit des copropriétaires ayant payé ces travaux et ne saurait profiter aux copropriétaires ayant cette qualité à la date du remboursement, ce qui constituerait un enrichissement sans cause ; qu’il résulte des documents produits que la société ITRACO a versé la somme de 36. 675, 86 € au titre desdits travaux ; qu’en effet, la SELAFA MJA communique une opposition faite le 12 novembre 2001 par le syndic de la copropriété entre les mais de la SCP X...- Y..., notaire, pour un montant de 370. 106, 88 francs, ultérieurement ramené à 244. 000 francs, ainsi qu’une lettre du 8 février 2002 de la société ITRACO adressée au syndic faisant état d’un trop versé de 5. 951, 61 € et un chèque du syndic du 15 février 2002 à l’ordre de la société ITRACO en remboursement de ladite somme de 5. 951, 61 € ; que la société GENERALI qui a déjà effectué ce règlement, ne saurait être condamnée une seconde fois à y procéder ; qu’il convient donc, infirmant le jugement déféré, de condamner le syndicat des copropriétaires à verser à la SELAFA MJA la somme de 36. 675, 86 € » ;

 

 

1°) ALORS QU’une contradiction entre les motifs et le dispositif du jugement équivaut à un défaut de motif ; qu’en condamnant le syndicat des copropriétaires du 1, cité Riverin au profit de la société ITRACO tout en visant, dans ses motifs, une condamnation au profit de la SELAFA MJA, la Cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;

 

 

2°) ALORS QUE l’action fondée sur l’enrichissement sans cause ne saurait permettre au demandeur d’éluder l’application de la règle normalement applicable à la situation considérée ; qu’en condamnant le syndicat des copropriétaires sur le fondement de l’enrichissement sans cause, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée par ses conclusions (signifiées le 26 octobre 2010, p. 11, al. 3), si les règles de la copropriété ne réservaient pas le versement d’un éventuel crédit aux seuls membres d’une copropriété au jour de la date de ce versement, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1371 du Code civil et des principes régissant l’enrichissement sans cause ;

 

 

3°) ALORS QU’en cas de mutation d’un lot de copropriété, le trop perçu éventuel de provision sur les charges révélé par l’approbation des comptes est porté au crédit de celui qui est copropriétaire lors de cette dernière ; qu’en jugeant que le remboursement de la somme versée par la compagnie GENERALI IARD au syndicat des copropriétaires du 1, cité Riverin en exécution du jugement devait être effectué au profit des copropriétaires ayant payé ces travaux et ne saurait profiter aux copropriétaires ayant cette qualité à la date du remboursement, la Cour d’appel a violé l’article 6-2 du décret du 17 mars 1967 ;

 

 

4°) ALORS QU’en toute hypothèse, le succès de l’action fondée sur l’enrichissement sans cause suppose l’enrichissement du défendeur ; qu’en condamnant le syndicat des copropriétaires du 1, cité Riverin au profit de la société ITRACO après avoir constaté que le remboursement des sommes versées par l’assureur ne saurait profiter aux copropriétaires ayant cette qualité à la date du remboursement sauf à constituer un enrichissement sans cause, ce dont il résultait que ce n’est pas le syndicat des copropriétaires du 1, cité Riverin, défendeur à l’action, qui s’était enrichi mais les copropriétaires, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales s’évinçant nécessairement de ses propres constatations, violant ainsi l’article 1371 du Code civil ensemble les principes régissant l’enrichissement sans cause.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

29/03/2013