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Rémunération du syndic

Honoraires dits de mutation

Fixation par l’assemblée générale

Inopposabilité de la décision au copropriétaire vendeur

 

Texte de l’arrêt et commentaires

 

Cassation civile 3   11 octobre 2005                    

Cassation partielle

N° de pourvoi : 04-17178

 

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Lyon, 17 mai 2004), rendu en dernier ressort, que M. X..., Mmes Y... et Z... ont vendu des lots dont ils étaient propriétaires indivis dans un immeuble en copropriété ; que par déclaration au greffe, ils ont demandé la mainlevée de l'opposition que le syndic, la société Galyo, aurait faite entre les mains du notaire chargé de la vente et la condamnation du syndicat à leur restituer certaines sommes indûment payées ; qu'ils ont réclamé des dommages-intérêts tant au syndicat des copropriétaires qu'au syndic et reconventionnellement le syndicat a demandé leur condamnation au paiement d'une certaine somme ;

 

Sur le premier moyen qui est recevable :

Vu l'article 1165 du Code civil ;

 

Attendu que pour débouter M. X... et Mmes Y... et Z... de leur demande en restitution d'une certaine somme mise à leur charge par le syndicat au titre des frais de mutation de leurs lots, le jugement retient que ces frais ont été prévus au titre des honoraires pour prestations particulières du contrat du syndic, contrat voté par une assemblée générale de copropriétaires non contestée ;

 

Qu'en statuant ainsi, alors que les décisions d'assemblée générales ne régissent pas les rapports entre chaque copropriétaire et le syndic, pris personnellement, le tribunal a violé le texte susvisé ;

 

Et sur le deuxième moyen :

Vu l'article 1165 du Code civil ;

 

Attendu que pour condamner M. X... et Mmes Y... et Z... au paiement d'une certaine somme au titre de travaux, le jugement retient qu'aux termes du contrat de vente des lots de copropriété, l'indivision X... s'engageait envers les acheteurs à prendre en charge le coût des travaux décidés avant le jour de la vente, et que le syndic a pu réclamer aux vendeurs le coût de ces travaux auxquels ils resteront en dernier lieu tenus ;

 

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher à quelle date les appels de fonds relatifs aux travaux considérés étaient devenus effectivement liquides et exigibles et alors que le syndicat est un tiers au contrat de vente, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

 

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le troisième moyen qui ne serait de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté M. X... et Mmes Y... et Z... de leurs demandes en mainlevée de l'opposition et en restitution de la somme de 580,37 euros au titre de la provision du 4ème trimestre 2001, le jugement rendu le 17 mai 2004, entre les parties, par le tribunal d'instance de Lyon ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Villeurbanne ;

 

Condamne le syndicat des copropriétaires du 26, 28, 30 chemin de la Creuzette et la société Galyo, ensemble, aux dépens ;

 

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires du 26, 28, 30 chemin de la Creuzette et la société Galyo, ensemble, à payer à M. X... et Mmes Y... et Z..., ensemble, la somme de 2 000 euros ;

 

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires 26, 28, 30 chemin de la Creuzette et de la société Galyo ;

 

 

Commentaires :

 

Il faut en terminer avec la controverse relative aux « honoraires de mutation » réclamés par les syndics professionnels pour l’établissement de l’état daté et de la note de renseignements à adresser au notaire  !

Le problème posé est simple.

L’établissement de ces documents exige des diligences significatives et sensiblement alourdies au fil des temps. Il engage la responsabilité du syndic en cas d’erreur.

La légitimité de cette rémunération a été reconnue dès l’époque de la taxation des honoraires. On peut se référer sur ce point à l’arrêté préfectoral du 30 juillet 1974 (BMO Paris 6 août 1974) et aux arrêtés suivants. La prestation est classée dans les « services susceptibles d’être rendus en dehors de la gestion collective de la copropriété ». Les honoraires sont alors librement débattus entre les parties.

A cette époque le contrat de syndic n’existe pas. Les honoraires sont fixés en fonction d’un barème conforme aux arrêtés, soumis aux assemblées générales. Dans la pratique les honoraires exceptionnels sont indiqués dans le barème, y compris ceux concernant les prestations en cas de mutation.

De nos jours, le classement de ces prestations dans la catégorie exceptionnelle a été confirmé dans le rapport du Conseil national de la consommation du 18 février 1997, constatant l’accord sur ce point des consommateurs et des professionnels. Ce point doit donc être tenu pour acquis.

 

Les tensions actuelles entre les copropriétaires « consommateurs » et les syndics proviennent d’une dérive  incontestable dans la détermination des honoraires désormais libérés. La gestion des fonds de mandants par compte bancaire unique reste pratiquée par un grand nombre de professionnels. Ils ont la possibilité de réduire le montant des honoraires de gestion courante car ils perçoivent et conservent, - de manière parfaitement légale -, la rémunération des fonds déposés octroyée par le banquier.

Les professionnels pratiquant la gestion par comptes bancaires séparés ouverts aux noms des syndicats administrés sont ainsi désavantagés lorsqu’ils sont mis en concurrence avec leurs confrères. Ils ont du s’aligner peu à peu. Pour assurer l’équilibre financier de leur activité, ils n’ont eu qu’une solution : multiplier le nombre des prestations exceptionnelles et en alourdir la rémunération. Finalement tous les professionnels ont suivi la même pratique et l’on peut affirmer qu’à ce jour les honoraires de gestion courante pratiqués par les syndics sont très sensiblement insuffisants alors que les contrats de syndics comportent des listes effarantes de prestations exceptionnelles lourdement tarifées.

 

L’obligation absolue d’ouvrir un compte bancaire séparé pour chaque syndicat administré semble être l’unique remède propre à remédier à cette situation malsaine et de plus contraire aux principes élémentaires de la libre concurrence.

 

Pour revenir aux « honoraires de mutation », les syndics professionnels font figurer dans les contrats proposés :

1.      des honoraires imputables au vendeur, pour l’établissement de l’état daté et de la note de renseignements et diverses autres prestations ;

2.      des honoraires imputables à l’acquéreur, pour constitution de nouveau dossier, ouverture d’un nouveau compte, modification du fichier, etc.

Pour cadrer strictement le commentaire, nous précisons qu’à notre avis la prétention d’imposer à l’acquéreur des honoraires de mutation est dépourvue de fondement pratique (les prestations sont très modestes) et juridique (absence incontestable de lien et d’information préalable).

Reste le problème des honoraires qui demeureraient à la charge du vendeur, qui fait l’objet de l’arrêt relaté.

 

Dans cette affaire la Cour de cassation a été amenée à statuer sur les différentes rubriques d’une opposition à paiement de prix de vente d’un lot de copropriété, dont la mainlevée avait été demandée au Tribunal d’instance de Lyon.

La décision rendue en dernier ressort le 17 mai 2004 est antérieure au décret du 27 mai 2004 qui a modifié celui du 17 mars 1967.

L’opposition portait en premier lieu sur « une certaine somme mise à leur charge par le syndicat au titre des frais de mutation de leurs lots ». Il est indiqué  que « ces frais ont été prévus au titre des honoraires pour prestations particulières du contrat du syndic, contrat voté par une assemblée générale de copropriétaires non contestée ».

En général, c’est le syndic qui, de sa propre initiative, insère dans le compte du vendeur les « honoraires pour dossier de mutation » qu’il réclame, de fait, directement au vendeur. L’arrêt décrit ici une procédure différente puisque c’est le syndicat qui aurait mis la somme litigieuse à la charge du vendeur. Compte tenu de la confusion qui règne habituellement dans ce genre de pratique et dans les travaux qui en traitent, on doit s’interroger sur le mécanisme réellement utilisé.

Au visa de l’article 1165 du Code civil, la Cour de cassation fait valoir que « les décisions d'assemblée générales ne régissent pas les rapports entre chaque copropriétaire et le syndic, pris personnellement », pour juger finalement que le copropriétaire vendeur ne peut être tenu à supporter seul le coût d’une prestation du syndic entrant dans le cadre des prestations exceptionnelles figurant au contrat de syndic. D’où résulte le mal-fondé de l’opposition de ce chef.

 

La solution n’est pas satisfaisante pratiquement.

Elle est juridiquement contestable.

Il est conforme aux exigences de la publicité des prix et de l’information préalable des consommateurs que le coût de cette prestation soit porté à la connaissance des copropriétaires, quel qu’en soit le régime juridique (obligation directe à l’égard du syndic, ou imputation comme charge individuelle d’une dépense payée par le syndicat).

On voit mal les syndics négocier avec les copropriétaires vendeurs, à l’occasion de  chaque opération, la rémunération d’une prestation légalement obligatoire et pour laquelle il n’existe aucune possibilité de mise en concurrence. Enfin la meilleure façon de fixer raisonnablement le coût de la prestation est de soumettre la proposition du syndic à l’agrément de l’assemblée générale.

Dans le passé, les honoraires de mutation étaient réglés directement par le notaire au syndic. Ils étaient finalement mis à la charge de l’acquéreur comme tous les autres frais de la vente. Les litiges étaient pratiquement inconnus.

Les difficultés sont apparues avec la pratique du contrat de syndic, en marge du statut de la copropriété, dans lequel il a été intégré par l’article 29 du décret du 17 mars 1967 modifié par le décret du 27 mai 2004. On a vu plus haut comment le conflit s’est envenimé.

 

Sur le plan juridique, la Cour de cassation reprend ici, au visa de l’article 1165 du Code civil, l’argument classique. Les décisions d'assemblée générales ne régissent pas les rapports entre chaque copropriétaire et le syndic, mandataire du syndicat seulement.

Il est vrai que le syndic est le mandataire social du seul syndicat. Il est vrai aussi qu’il n’existe aucun rapport juridique direct entre les copropriétaires et les fournisseurs du syndicat. Pourtant les copropriétaires contribuent à la rémunération des fournisseurs dans les conditions prévues par l’état de répartition des charges. Rien ne peut s’opposer à ce que cet état prévoie l’imputation de la rémunération litigieuse du syndic au débit du vendeur de lot comme charge individuelle.

Le syndicat des copropriétaires est une institution collective dont le régime s’inspire nécessairement des règles du Code civil mais exige des solutions spécifiques. Ainsi la substitution est interdite au syndic alors qu’elle est permise au mandataire classique.

Dans le même ordre d’idées, on reconnaît au syndicat des copropriétaires une relative transparence juridique qui permet par exemple à un fournisseur impayé d’agir directement contre les copropriétaires, chacun pris pour sa quote-part. Il faut étendre son domaine d’application à la détermination des honoraires revenant au syndic pour des prestations légales profitant à un ou plusieurs copropriétaires seulement.

Plus généralement, il est maintenant évident que le corset de certaines dispositions du Code civil cède de toutes parts face aux régimes divers des institutions collectives privées. Le remaniement de la classification des actes juridiques figurant dans le récent projet de réforme du Code civil fait enfin apparaître les actes juridiques collectifs. C’est un signal heureux.

 

De toute manière il faut en terminer avec cette querelle indigne et fixer clairement le régime des honoraires dus au syndic pour l’établissement de l’état daté et de la note de renseignements. Les rôles des juridictions sont suffisamment encombrés pour qu’elles n’aient pas à se pencher périodiquement sur une question aussi mesquine.

 

Un mot encore à propos de la seconde rubrique litigieuse.

L’acte de vente comportait une clause par laquelle le vendeur s’engageait à supporter la charge des travaux votés avant la signature de l’acte mais non encore réalisés. Le syndic a cru devoir faire opposition pour obtenir le paiement des fonds en question. Le tribunal d’instance a validé cette demande.

La Cour de cassation lui reproche de n’avoir pas recherché à quelle date les appels de fonds relatifs aux travaux considérés étaient devenus effectivement liquides et exigibles.

On pourrait penser que la Cour de cassation a appliqué les règles nouvelles des comptes entre vendeur et acquéreur à une affaire antérieure au nouveau régime.

On peut aussi penser qu’elles ne sont pas nouvelles mais qu’elles sont enfin écrites clairement dans un décret !

Elles ont, en tout cas,  le mérite de la clarté.

 

 

 

Mise à jour

 

07/04/2015