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Copropriété  prescription des actions

Modification de locaux existants avec utilisation du COS commun

Action réelle fondée sur le droit de l’urbanisme

Prescription de 10 ans (art. 42)  (non)

Nécessité d’une autorisation de l’assemblée (oui)

 

 

 

Cour de cassation chambre civile 3    Audience publique du 10 janvier 2001

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris , du 29 octobre 1998

N° de pourvoi: 99-11607

Cassation.

 

Premier président :M. Canivet, président., président

 

 

 

Sur le premier moyen :

 

Vu l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 ;

 

 

Attendu que les actions personnelles, nées de l’application de la loi fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, entre les copropriétaires, se prescrivent par un délai de dix ans ;

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 29 octobre 1998), que M. X..., propriétaire d’un lot dans un immeuble en copropriété, dont les deux seuls autres lots appartenaient à la société Arthème Y..., qui les a aménagés en bureaux, reprochant à cette société d’avoir illicitement modifié la destination de parties privatives, et utilisé le coefficient d’occupation des sols (COS) de tout l’immeuble, et d’avoir indûment annexé des parties communes l’a assignée en rétablissement des lieux en leur état antérieur ;

 

Attendu que pour retenir qu’était acquise la prescription en ce qui concerne la modification des locaux du rez-de-chaussée et des deux premiers étages compris dans les lots appartenant à la société Arthème Y..., l’arrêt retient que, si les transformations opérées à ces trois niveaux sur des locaux à usage de dépôt de livres et de magasins, à l’effet de leur donner un usage de bureaux, ont utilisé les droits à construire attachés à l’immeuble réglementé par le COS, ces modifications ont été réalisées entre 1966 et 1976 ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors que la réalisation par un copropriétaire de modifications dans l’utilisation de locaux existants ayant une incidence sur le COS constitue l’exercice d’un droit accessoire aux parties communes, et que l’action fondée sur un tel droit exercée par M. X... contre un autre copropriétaire est dès lors une action réelle née de la réglementation de l’urbanisme, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

 

Et sur le deuxième moyen :

 

Vu l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 ;

 

Attendu que le syndicat peut agir conjointement ou non avec un ou plusieurs copropriétaires en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble ;

 

Attendu que pour déclarer irrecevable l’action de M. X... tendant à la condamnation de la société Arthème Y... à remettre les locaux des troisième et quatrième étages dans leur état antérieur aux travaux réalisés, l’arrêt retient que c’est de façon régulière que cette société a conféré un usage de bureaux à l’ensemble de ses locaux situés dans les lots 2 et 3 anciennement à usage de magasin et d’habitation ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors que le droit à transformation de l’usage d’un appartement lorsqu’il est limité par un COS calculé sur le sol, partie commune de l’immeuble, est un droit accessoire à une partie commune, que ce droit ne peut être exercé qu’après autorisation de l’assemblée générale et qu’un copropriétaire peut agir en justice pour obtenir la restitution aux parties communes de ce qu’un autre copropriétaire s’est indûment approprié, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

Et sur le troisième et le cinquième moyens, réunis :

 

Vu les articles 15 et 42 de la loi du 10 juillet 1965 ;

 

Attendu que le syndicat peut agir conjointement ou non avec un ou plusieurs copropriétaires en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble ; que les actions personnelles nées de l’application de la loi fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis entre des copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat se prescrivent par un délai de dix ans ;

 

Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes en restitution de parties communes, l’arrêt retient, d’une part, que l’action en démolition de l’emprise en surplomb de 1,75 mètre carré sur la courette au niveau du premier et du deuxième étages est prescrite par application de l’article 42 de la loi de 1965, les actes constitutifs de cette emprise remontant à une période antérieure à 1971 et, d’autre part, que la cour est, selon le règlement de copropriété, à l’usage exclusif de la société Arthème Y... et que M. X... n’a pas caractérisé l’intérêt légitime à agir à raison d’un préjudice personnel éprouvé dans la jouissance ou la propriété des parties communes ;

 

Qu’en statuant ainsi, après avoir constaté la création d’un escalier ayant une emprise sur deux niveaux de 1,75 mètre carré sur la courette intérieure et l’extension des bureaux de la société Arthème Y... sur une certaine superficie de la cour commune, alors, d’une part, que la construction de l’escalier en surplomb de la courette a pour effet de priver l’ensemble des copropriétaires de la jouissance d’une fraction de parties communes et que l’action ayant pour but de restituer aux parties communes ce qu’un autre copropriétaire s’est indûment approprié n’est pas soumise à la prescription de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 et, d’autre part, que même réservée à la jouissance privative d’un copropriétaire, une partie commune ne peut faire l’objet d’aucune appropriation et que l’action individuelle d’un copropriétaire, en vue du respect du règlement de copropriété, est recevable sans qu’il soit astreint à démontrer qu’il subit un préjudice personnel et spécial distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

 

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le quatrième moyen :

 

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 29 octobre 1998, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles.

 

 

commentaires   (Mis à jour au 20/06/2014)

 

L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 est ainsi conçu en son premier alinéa :

« Sans préjudice de l’application des textes spéciaux fixant des délais plus courts, les actions personnelles nées de l’application de la présente loi entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans. »

Ce délai de prescription est spécifique aux actions personnelles. Elles tendent à l’exercice d’un droit personnel résultant d’un contrat ou d’un quasi-contrat, d’un délit ou d’un quasi-délit ou de la loi elle-même, opposable à une personne déterminée.

Encore faut-il que l’action personnelle soit née de la présente loi (du 10 juillet 1965) ; le contentieux de la copropriété, au sens large, peut comporter des actions fondées sur les dispositions du Code civil par exemple. La loi ALUR comporte des dispositions qui ont été insérées dans le Code de la construction et de l’habitation. La prescription de dix ans ne sera pas applicable aux actions fondées sur ces dispositions.

Il faut enfin que l’action oppose des copropriétaires entre eux ou un copropriétaire au syndicat.

Ce délai n’a pas été modifié par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile.

 

Les actions réelles sont au contraire fondées sur un droit réel. Il s’agit par exemple de faire reconnaître et protéger le droit de propriété. La loi du 17 juin 2008 a fixé à trente ans la durée de la prescription pour les actions réelles. Elle a ainsi écarté la solution jurisprudentielle de la perpétuité de l’action réelle.

 

Il n’est pas toujours très simple de déterminer la nature de l’action exercée dans certains cas. On comprend aisément l’importance de cette détermination puisque la durée de recevabilité de l’action varie de 10 à 30 ans selon la solution adoptée.

 

L’arrêt commenté apporte des enseignements nouveaux en cette matière.

 

M X… est propriétaire d’un lot dans une copropriété. Il n’existe que deux autres lots qui appartiennent à la Sté Arthème Fayard. Il existe une courette intérieure et d’autre part une cour commune qui est à l’usage exclusif de la société en vertu du règlement de copropriété

Celle-ci a réalisé certains aménagements. Elle a modifié les locaux du rez-de-chaussée et des deux premiers étages, transformés en bureaux alors qu’ils étaient à usage de magasins et dépôt de livres, et aussi les locaux des troisième et quatrième étages. Elle a construit un escalier en surplomb de la courette avec emprise sur deux niveaux de 1,75 m².

Ces aménagements ont généré une emprise sur les parties communes mais de plus une absorption du COS (ancien Coefficient d’occupation du sol) résiduel qui est lui aussi commun à tous les copropriétaires.

 

M. X… a assigné la société pour obtenir la suppression des modifications effectuées et la remise des lieux en l’état antérieur.

 

 

Attendu que pour retenir qu’était acquise la prescription

 

 

En ce qui concerne la modification des locaux du rez-de-chaussée et des deux premiers étages, la Cour d’appel a jugé que les transformations opérées à ces trois niveaux sur des locaux à usage de dépôt de livres et de magasins, à l’effet de leur donner un usage de bureaux, ont bien utilisé les droits à construire attachés à l’immeuble réglementé par le COS, ces modifications ont été réalisées entre 1966 et 1976 ; que la prescription prévue par l’article 42 était donc acquise.

La Cour de cassation considère au contraire qu’il s’agit bien d’une action réelle et que le prescription n’est pas acquise

« Qu’en statuant ainsi, alors que la réalisation par un copropriétaire de modifications dans l’utilisation de locaux existants ayant une incidence sur le COS constitue l’exercice d’un droit accessoire aux parties communes, et que l’action fondée sur un tel droit exercée par M. X... contre un autre copropriétaire est dès lors une action réelle née de la réglementation de l’urbanisme, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; »

 

 

 

En ce qui concerne les locaux des troisième et quatrième étages la Cour d’appel déclare irrecevable l’action de M. X... tendant à la condamnation de la société Arthème Y... à remettre  les lieux dans leur état antérieur aux travaux réalisés. Elle juge que c’est de façon régulière que cette société a conféré un usage de bureaux à l’ensemble de ses locaux situés dans les lots 2 et 3 anciennement à usage de magasin et d’habitation ;

La Cour de cassation accueille au contraire ce moyen de cassation :

Qu’en statuant ainsi, alors que le droit à transformation de l’usage d’un appartement lorsqu’il est limité par un COS calculé sur le sol, partie commune de l’immeuble, est un droit accessoire à une partie commune, que ce droit ne peut être exercé qu’après autorisation de l’assemblée générale et qu’un copropriétaire peut agir en justice pour obtenir la restitution aux parties communes de ce qu’un autre copropriétaire s’est indûment approprié, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

Il faut rappeler ici que pour une copropriété classique (art. 1er alinéa 1 de la loi de 1965) le coefficient d’occupation des sols est calculé en fonction de la superficie du terrain d’assiette de l’immeuble (CE 24/07/1987 SCI 46 Quai de Jemmapes JCP N 1987 II p. 269 note Vandermeeren).

 

 

 

Sur la demande de restitution des parties communes appréhendées, la Cour d’appel déclare irrecevables les demandes en restitution de parties communes. L’arrêt retient,

d’une part, que l’action en démolition de l’emprise en surplomb de 1,75 mètre carré sur la courette au niveau du premier et du deuxième étages est prescrite par application de l’article 42 de la loi de 1965, les actes constitutifs de cette emprise remontant à une période antérieure à 1971 et,

d’autre part, que la cour est, selon le règlement de copropriété, à l’usage exclusif de la société Arthème Y... et que M. X... n’a pas caractérisé l’intérêt légitime à agir à raison d’un préjudice personnel éprouvé dans la jouissance ou la propriété des parties communes ;

 

La Cour de cassation accueille encore ce moyen de cassation :

« Qu’en statuant ainsi, après avoir constaté la création d’un escalier ayant une emprise sur deux niveaux de 1,75 mètre carré sur la courette intérieure et l’extension des bureaux de la société Arthème Y... sur une certaine superficie de la cour commune, alors,

d’une part, que la construction de l’escalier en surplomb de la courette a pour effet de priver l’ensemble des copropriétaires de la jouissance d’une fraction de parties communes et que l’action ayant pour but de restituer aux parties communes ce qu’un autre copropriétaire s’est indûment approprié n’est pas soumise à la prescription de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 et,

d’autre part, que même réservée à la jouissance privative d’un copropriétaire, une partie commune ne peut faire l’objet d’aucune appropriation et que l’action individuelle d’un copropriétaire, en vue du respect du règlement de copropriété, est recevable sans qu’il soit astreint à démontrer qu’il subit un préjudice personnel et spécial distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Il n’est pas douteux que l’action ayant pour but de restituer aux parties communes ce qu’un autre copropriétaire s’est indûment approprié est une action réelle ;

Mais en outre la Cour de cassation juge que le copropriétaire demandeur n’a pas à démontrer qu’il subit un préjudice personnel et spécial distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat. Elle confirme une évolution satisfaisante de la jurisprudence supérieure.

 

 

Voir aussi Loyers et copropriété 2001 n° 105 note Vigneron

AJDI 2001p. 438 note Giverdon

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

20/06/2014