Assemblée générale

Ordre du jour

Encadrement des pouvoirs de l’assemblée

Notion d’amendement ; conception restrictive (oui)

Décision sur une question non inscrite ; nullité (oui)

 

Question évoquée dans les commentaires :

Les modalités d’exercice par le syndic de son obligation de conseil au cours d’une assemblée générale.

 

Cassation  civile 3e   7 novembre 2007       Cassation partielle

Cour d’appel d’Aix-en-Provence (4e chambre C) 30-05-2006

N° de pourvoi : 06-18882

 

 

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 mai 2006), que la société civile immobilière Le Lys (la SCI), propriétaire du lot de copropriété n° 103, a assigné le syndicat des copropriétaires de “l’ensemble immobilier Le Cézanne à Cassis” en annulation de deux décisions de l’assemblée générale des copropriétaires du 3 juillet 1998, la première donnant mandat au syndic pour engager une procédure contre la SCI sur ce lot, faire cesser les dégradations provoquées sur les parties communes, en empêcher l’usage privatif et exiger la remise en état des lieux, et la seconde disant que ce lot en l’état de terrasse délimitée en partie privative sur la toiture de l’immeuble C1 devait être maintenu en terrasse ;

 

Sur le second moyen, ci-après annexé :

 

Attendu qu’ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que l’article 11 du règlement de copropriété indiquait que “les copropriétaires qui bénéficient de la jouissance exclusive des terrasses devront les maintenir en parfait état” et constaté que la SCI payait à proportion de millièmes correspondant à une terrasse et non à un appartement, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a pu en déduire, sans se contredire, que les terrasses étaient des parties communes à usage privatif et condamner la SCI à remettre dans son état initial le lot n° 103 et les gaines parties communes modifiées ;

 

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

 

Mais, sur le premier moyen :

Vu l’article 13, alinéa 1er, ensemble l’article 9, du décret du 17 mars 1967 dans sa rédaction applicable à la cause ;

 

Attendu que l’assemblée générale ne délibère valablement que sur les questions inscrites à l’ordre du jour et dans la mesure où les notifications ont été faites conformément aux dispositions des articles 9 à 11 du présent décret ;

 

Attendu que pour débouter la SCI de cette demande, l’arrêt retient qu’elle ne saurait invoquer la nullité en soutenant qu’il existait une différence entre l’ordre du jour figurant sur la convocation et les questions posées à l’assemblée générale, que l’ordre du jour était clair et explicite et concernait les travaux d’aménagements effectués sur la terrasse et à son usage, que les résolutions portées au procès-verbal de l’assemblée générale répondaient aux questions évoquées dans la convocation, que l’assemblée générale était en droit d’amender ou d’améliorer les résolutions qui lui étaient soumises et que la deuxième résolution était une suite logique de la première résolution qui n’était nullement dénaturée mais complétée ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors qu’une décision qui a été votée conformément à l’ordre du jour ne peut être complétée par une autre qui n’y était pas inscrite, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

 

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a rejeté les demandes d’annulation du procès-verbal de l’assemblée générale du 3 juillet 1998, l’arrêt rendu le 30 mai 2006, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;

 

Condamne le syndicat des Copropriétaires de l’ensemble immobilier Le Cézanne à Cassis aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne le syndicat des Copropriétaires de l’ensemble immobilier Le Cézanne à Cassis à payer à la SCI Le Lys la somme de 2 000 euros ;

Rejette la demande du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier Le Cézanne à Cassis ;

 

 

 

commentaires :

 

Cet arrêt présente l’intérêt de condamner à nouveau les emballements excessifs d’une assemblée générale, en rappelant qu’il ne faut pas confondre « amendement » et « improvisation »

 

En présence d’une SCI détentrice d’un droit de jouissance exclusif sur la terrasse de l’immeuble, qui ne respectait pas les conditions d’usage stipulées dans le règlement de copropriété, l’assemblée était appelée à conférer au syndic l’habilitation d’agir en justice pour obtenir le respect de ces obligations.

 Elle a pris deux décisions :

-  la première donnant mandat au syndic pour engager une procédure contre la SCI sur ce lot, faire cesser les dégradations provoquées sur les parties communes, en empêcher l’usage privatif et exiger la remise en état des lieux

- la seconde disant que ce lot en l’état de terrasse délimitée en partie privative sur la toiture de l’immeuble C1 devait être maintenu en terrasse

 

Faute d’indication précise de l’arrêt, qui se borne à rappeler la motivation de la Cour d’appel, selon laquelle « l’ordre du jour était clair et explicite et concernait les travaux d’aménagements effectués sur la terrasse et à son usage », on peut raisonnablement supposer que l’autorisation d’agir à donner au syndic, seule, était inscrite à l’ordre du jour.

 

La Cour de cassation valide l’adoption de la première question et la condamnation de la SCI à remettre en son (sic !) état initial la terrasse et les gaines parties communes modifiées.

 

Mais l’assemblée, dans la foulée, a décidé en outre que « ce lot en l’état de terrasse délimitée en partie privative sur la toiture de l’immeuble C1 devait être maintenu en terrasse ». Cette décision était dépourvue d’intérêt réel. Le syndicat aura été, sans doute, satisfait amplement par le rejet du pourvoi sur la question principale.

 

Les assemblées ont la mauvaise habitude de pratiquer des ajouts de ce genre après l’adoption d’une décision incontestable. Il n’est pas toujours facile pour les syndics d’user à cet égard de leur obligation de conseil. Preuve en est ici que la Cour d’appel d’Aix avait considéré « que l’assemblée générale était en droit d’amender ou d’améliorer les résolutions qui lui étaient soumises et que la deuxième résolution était une suite logique de la première résolution qui n’était nullement dénaturée mais complétée ».

 

Le droit d’amendement d’une résolution est reconnu. Mais l’amendement doit rester dans le cadre strict de la question inscrite à l’ordre du jour. Dans le cas d’un ravalement, l’assemblée peut modifier les modalités de préfinancement proposées, mais elle ne peut pas décider d’étendre l’objet du chantier à une partie commune non prévue dans le projet, dès lors que cette extension entraînerait une augmentation du coût prévu.

 

L’arrêt donne l’occasion d’évoquer les problèmes posés par l’obligation qui est faite au syndic d’user de son devoir de conseil pour attirer l’attention des copropriétaires réunis en assemblée sur un risque de fourvoiement.

La lecture d’une certaine presse et la consultation de certains sites montrent qu’il est souvent conseillé aux présidents des assemblées générales de veiller à maintenir le syndic, en principe secrétaire de l’assemblée, dans un rôle effacé. Il ne pourrait alors que répondre aux questions qui lui sont posées. Il faudrait éviter toute initiative de sa part et a fortiori lui interdire de prendre d’autorité la parole pour tenter de recadrer un débat erratique.

À l’encontre, la jurisprudence ne manque pas de retenir la responsabilité du syndic n’ayant pas signalé les risques d’une décision manifestement illégale ou illicite. Il y a d’autres cas justifiant une intervention du syndic usant de son expérience pour signaler le caractère inopportun d’un choix technique par exemple.

Heureusement, nombreux sont les syndics dotés de l’autorité nécessaire pour écarter les obstacles. Mais d’autres, plus soucieux de la conservation de leur mandat, sont moins audacieux.

 

Un autre problème est que le syndic doit veiller à la conservation d’une trace de son intervention. Or certains présidents refusent de signer un projet de procès verbal comportant la mention nécessaire. Ils commettent alors une faute grave.

Le syndic peut alors (et doit, à notre avis), joindre au procès-verbal une note rappelant son intervention et ses réserves éventuelles et le refus qui lui a été opposé.

 

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

06/12/2007