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Cour Européenne des droits de l’hommeAFFAIRE
SMOLORZ c. POLOGNE (Requête
no 17446/07) ARRÊT STRASBOURG 16 octobre 2012 Liberté d’expression d’un journaliste ;
condamnation judiciaire prononcée son encontre et constituant une ingérence dans
l’exercice de son droit à la liberté d’expression ; ingérence prévue par
la loi et poursuivant un but légitime – la protection de la réputation
d’autrui. Nécessité de vérifier si la mesure d’ingérence incriminée était
proportionnée au but légitime invoqué et nécessaire dans une société
démocratique CEDH . Smolorz c. Pologne 16-10-2012 ******** Cet arrêt
deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2
de la Convention. Il peut subir des retouches de forme. En l’affaire
Smolorz c. Pologne, La Cour
européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant en une chambre
composée de : […] Après en
avoir délibéré en chambre du conseil le 25 septembre 2012, Rend l’arrêt
que voici, adopté à cette date : PROCÉDURE 1. A
l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 17446/07) dirigée contre
la République de Pologne et dont un ressortissant de cet Etat, M. Michał
Smolorz (« le requérant »), a saisi la Cour le 16 avril 2007 en
vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et
des libertés fondamentales (« la Convention »). 2. Le
gouvernement polonais (« le Gouvernement ») a été représenté par
son agent, M. J. Wołąsiewicz, succédé par Mme J. Chrzanowska du
ministère des Affaires étrangères. 3. Le
requérant alléguait en particulier que sa condamnation civile pour atteinte à
la réputation de J.J. constituait une violation de son droit à la liberté
d’expression. 4. Le
14 mars 2011, la requête a été communiquée au Gouvernement. Comme le permet
l’article 29 § 1 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se
prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond. EN FAIT I. LES
CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE 5. Le
requérant, né en 1955, réside à Katowice. Il est journaliste. 6. Le
requérant tient une rubrique hebdomadaire, Roztomajty, dans l’édition régionale
silésienne du quotidien Gazeta Wyborcza ; il y publie régulièrement
des chroniques. 7. Le
28 mai 2004, le requérant publia dans la Gazeta Wyborcza un article intitulé
« Architekt,
mistrz samozadowolenia » (« Architecte et maître en
autosatisfaction ») ; ce texte était précédé de l’introduction
suivante : « M.
Jurand Jarecki et l’équipe entière des architectes d’alors à Katowice étaient
convaincus qu’ils créaient des choses grandioses et rendaient les gens
heureux. En réalité, ils créaient de la grandeur et du bonheur à la taille
d’un imperméable et d’une cravate sur un élastique. » (« Pan Jurand Jarecki i cala
ekipa katowickich architektów tamtej epoki byli przekonani, ze tworzyli
rzeczy wielkie i uszczęśliwiali ludzi. W rzeczywistości
tworzyli wielkość na miarę płaszcza ortalionowego i
krawata na gumce. ») 8. Un
autre passage de l’article concerné se lisait ainsi : « Qu’est-il
resté à Katowice de cette époque de « joie de démolir » de Jurand
Jarecki et ses camarades ? De ces immeubles construits à l’époque, en
réalité seul le Spodek [littéralement, « la soucoupe »] a résisté à l’épreuve du
temps. Et c’est tout. Tout le reste, censé être symbole de la
« modernité », qui a remplacé l’architecture moderniste détruite et
autres immeubles de valeur n’inspire aujourd’hui que de la honte de par sa
commune laideur et son esthétique pourrie du bolchevisme. Déjà à l’époque de
leur construction les fameux grands magasins Zenit et Skarbek plaisaient uniquement
à l’architecte et aux apparatchiks du parti. De nos jours, ils
éblouissent par leur laideur et défigurent la place du marché.
» (« A co zostało w Katowicach po epoce « radości
burzenia » Juranda Jareckiego i jego kamratów ? Spośród tylu
wzniesionych wówczas obiektów właściwie tylko Spodek przetrwał
próbę czasu. I na tym koniec. Wszystko
inne, co miało być symbolem „nowoczesności” i
zastąpiło zniszczona zabudowę secesyjna oraz inne
wartościowe obiekty, zawstydza dziś swoja pospolita brzydota i
zmurszałą estetyka bolszewizmu. Sławetne domy towarowe Zenit i
Skarbek już w chwili powstania podobały się
wyłącznie architektowi i aparatczykom partyjnym. Dziś raza
oczy i tragicznie szpecą rynek. ») (...) « Comment
peut-on ne pas s’en vouloir alors que des milliers de gens ont été condamnés
à vivre dans la laideur et qu’on a apposé sa signature sous l’anéantissement
du patrimoine matériel de la civilisation silésienne ? ». (« Jak można
sobie nie mieć nic do zarzucenia, choć setki tysięcy ludzki
skazało się na zycie w szpetocie, choć składało
się podpisy pod unicestwianiem dorobku śląskiej
cywilizacji? ») 9. L’article
publié par le requérant était une réplique aux propos tenus par l’architecte
J.J. dans une interview publiée par Gazeta Wyborcza le 21 mai 2004 sous
l’intitulé « Radość burzenia » (« La joie de démolir »). 10. En
juillet 2004, l’architecte J.J. engagea à l’encontre du requérant une action
en protection de sa bonne réputation. Il exigea que le requérant s’excuse
publiquement dans la Gazeta Wyborcza et qu’il verse une somme
au profit d’une institution caritative à titre de réparation. 11. Répliquant
aux allégations du demandeur, le requérant objecta qu’il avait exprimé une
critique légitime de l’activité publique de son adversaire. Ce dernier – l’un
des architectes de premier plan à Katowice pendant environ trente ans – était
directement responsable de l’aspect urbanistique actuel de cette ville. En
tant que personnalité publique, il devrait supporter la critique de son œuvre
publique, même lorsque celle-ci était particulièrement sévère et perspicace.
Le requérant souligna que les opinions qu’il avait exprimées dans son article
s’inscrivaient dans un débat mené depuis 2002 par les lecteurs de la Gazeta Wyborcza et les internautes autour
de l’image urbanistique actuelle de Katowice. Le requérant souligna que cette
image était largement déplorée par les habitants de cette ville et que les
immeubles érigés par son adversaire étaient jugés laids et même embarrassants
par ces derniers. Le requérant souligna qu’en sa qualité de journaliste, il
avait le droit d’émettre une critique très sévère, en particulier sur une question
d’intérêt général ; et de l’autre côté, son adversaire, en tant que
personnalité publique, aurait dû faire preuve d’une plus grande tolérance à
l’égard d’une telle critique le concernant. Le requérant releva que l’objet
visé par sa critique, à savoir la valeur esthétique des œuvres
architecturales réalisées par son adversaire, était, par sa nature, sujet à
des jugements très subjectifs ; ainsi, lui-même en tant qu’auteur de
l’article concerné ne saurait se voir tenu de prouver la véracité de son jugement.
En l’espèce, il avait contesté non pas l’intégralité du bagage professionnel
de son adversaire mais certaines œuvres bien définies que ce dernier et les
autres architectes de Katowice avaient réalisées à l’époque. Le requérant
souligna que l’échange d’opinions entre lui-même et son adversaire s’était
déroulé de manière conforme à la loi sur la presse, dans la mesure où J.J.
avait répliqué dans la presse à la polémique que lui-même avait d’abord
publiée suite à l’interview donnée par son adversaire. 12. Par
un jugement du 15 juillet 2005, le tribunal régional de Katowice accueillit
l’action et condamna le requérant au remboursement à son adversaire des frais
de procédure. Le tribunal ordonna au requérant de publier dans la Gazeta Wyborcza la déclaration
suivante : « Michał
Smolorz demande pardon à l’architecte Jurand Jarecki pour ses expressions
inconvenantes l’ayant humilié aux yeux de l’opinion publique, employées dans
l’article « Architecte et maître en autosatisfaction », publié par Gazeta Wyborcza le 28 mai 2004 sur la
page 17, et lui promet de s’abstenir à l’avenir de toutes actions
susceptibles de porter atteinte à sa bonne réputation, à son honneur et à son
acquis professionnel. » 13. Dans
la motivation de son jugement le tribunal releva que par ses propos le
requérant avait porté atteinte à l’honneur et à la bonne réputation du
demandeur en tant qu’architecte. Dans son article, écrit sur un ton moqueur
et ironisant, le requérant s’était essentiellement moqué de l’attitude de son
adversaire en la présentant comme « l’autoglorification » de ses
propres œuvres, tandis que d’après le requérant, celles-ci n’avaient aucune
valeur artistique et étaient même nocives. Le tribunal releva que le
requérant avait présenté son adversaire comme appartenant à une élite
d’architectes des années 1960-1970 à laquelle il avait imputé, au même titre
qu’aux apparatchiks du parti, la destruction du patrimoine de la civilisation
silésienne par la démolition des anciens immeubles de valeur et
l’instauration, à leur place, d’une architecture laide et dépourvue d’une
telle valeur esthétique. Le tribunal observa que, de façon démagogique et
sans citer d’arguments concrets, le requérant avait critiqué l’avis exprimé
par son adversaire sur la question de l’interprétation, à l’époque où ses
œuvres avaient été conçues, du concept de « modernité », en même
temps, - lui‑même avait qualifié ce concept de « laideur commune
et esthétique pourrie du bolchevisme ». 14. Le
tribunal estima que tant la forme de l’article que les expressions employées
par le requérant indiquaient qu’il s’était moqué non pas d’idées de son
adversaire mais de sa contribution intégrale à l’aspect urbanistique du
Katowice de l’après-guerre. Or, cet apport était reconnu et apprécié, et pas
seulement par les apparatchiks du parti et certains des collègues de
l’architecte, comme l’aurait voulu le requérant. Le ton catégorique sur
lequel le requérant avait formulé son jugement et le fait qu’il l’avait présenté
comme étant partagé par l’ensemble de l’opinion publique avaient eu pour
effet de ridiculiser son adversaire et de porter atteinte à sa bonne
réputation. Le tribunal estima que le requérant avait outrepassé la limite de
la critique légitime de l’activité publique du demandeur et de ses opinions
présentées dans l’article « La joie de démolir ». Bien qu’il n’ait
pas employé d’expressions directement offensantes ou vulgaires, l’impression
qui se dégageait de l’article entier permettait de conclure que l’atteinte à
l’honneur de son adversaire était réelle. 15. Le
requérant fit appel. Il releva que le tribunal n’avait pas suffisamment tenu
compte du fait que son article s’inscrivait dans un débat public auquel son
adversaire avait lui aussi participé, et dans le cadre duquel il s’était
également exprimé sur un ton offensant et agressif. En l’obligeant
à faire publiquement des excuses à son adversaire, le tribunal lui avait
dénié le droit à la critique légitime des activités de ce dernier entrant dans
la sphère publique. Le requérant fit valoir que devant le tribunal régional,
il avait bien tenté de prouver le fait que sa critique reposait sur des
éléments concrets, mais que sa demande tendant à pouvoir produire les preuves
de ses dires en ce sens avait été rejetée. 16. Par
un arrêt du 22 mars 2006, la cour d’appel rejeta l’appel, estimant que le
tribunal régional avait à juste titre conclu à l’atteinte à la bonne
réputation professionnelle de l’adversaire du requérant. 17. La
cour d’appel retint en particulier que le requérant avait tenu son adversaire
pour responsable de l’aspect esthétique actuel d’immeubles publics érigés
dans les années 1960-1970 ; il n’avait pas tenu compte du fait que
ceux-ci, conformes au concept de modernité d’alors, s’étaient usés au fil du
temps et avaient perdu de leur attractivité en rapport avec l’évolution des
goûts esthétiques. 18. La
cour d’appel estima que le fait que l’article du requérant s’inscrivait dans
le débat public ne le dispensait pas de ses obligations au titre de l’article
24 § 1 du code civil ; d’ailleurs, son argument tiré du comportement de
son adversaire était sans pertinence pour l’appréciation de l’attitude du
requérant lui-même. La cour d’appel estima que les débats acharnés dans la
presse, consistant en « une course à l’échange d’arguments offensants ad personam », ne méritaient pas
l’approbation du public ; en tout état de cause, les auteurs de tels
propos ne pouvaient prétendre à la protection du droit civil. La cour d’appel
souligna que seule la critique équitable et honnête (rzetelna), conforme aux règles de
la vie en société (zasady współżycia społecznego), méritait d’être
protégée. En l’espèce, le requérant avait tenu son adversaire pour
responsable de la destruction du patrimoine matériel de la civilisation
silésienne et de la laideur actuelle de Katowice ; toutefois, il n’avait
pas démontré le bien-fondé de ses affirmations. 19. Le
requérant se pourvut en cassation mais, par une ordonnance du 26 octobre
2006, la Cour suprême refusa d’examiner son pourvoi. II. LE
DROIT INTERNE PERTINENT 20. L’article
23 du code civil énonce, dans une liste non exhaustive, un certain nombre de
droits appelés « droits de la personnalité » (dobra osobiste). Cet article est ainsi
libellé : « Les
droits de la personnalité d’un individu, tels que, notamment, le droit à la
santé, le droit à la liberté, le droit à la réputation (cześć), le droit à la liberté
de conscience, le droit au nom ou à un pseudonyme, le droit à l’image, le
droit au secret de la correspondance, le droit à l’inviolabilité du domicile,
les droits sur les œuvres scientifiques ou artistiques, [ainsi que] les
droits sur les inventions et améliorations, sont protégés par le droit civil,
sans préjudice de toute protection énoncée dans d’autres dispositions légales. » 21. L’article
24 du code civil prévoit les modes de réparation des atteintes aux droits de
la personnalité. En vertu de cet article, une personne risquant de subir une
atteinte à l’un de ces droits peut exiger que l’auteur potentiel ne commette pas
l’acte préjudiciable, à moins que l’acte en question ne soit pas illégal. En
cas d’atteinte consommée, la personne lésée peut notamment demander à ce que
l’auteur fasse une déclaration rectificative sous une forme appropriée ou lui
verse une réparation équitable. Si l’atteinte portée à un droit de la
personnalité cause un préjudice financier, la personne lésée peut demander
une indemnisation. EN DROIT I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 10 DE LA CONVENTION 22. Le
requérant allègue que son droit à la liberté d’expression a été violé. Il
cite l’article 10 de la Convention, ainsi libellé : « 1. Toute
personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté
d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des
idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans
considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les Etats de
soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime
d’autorisations. 2. L’exercice
de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être
soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues
par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société
démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la
sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la
protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou
des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations
confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir
judiciaire. » 23. Le
Gouvernement s’oppose à cette thèse. A. Sur
la recevabilité 24. La
Cour constate qu’en ce qui concerne le présent grief, la requête n’est pas
manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 (a) de la Convention et
ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de la
déclarer recevable à ce titre. B. Sur
le fond 1. Thèses
des parties 25. Le
requérant soutient que son droit à la liberté d’expression n’a pas été
respecté. Dans l’article incriminé, qui constituait une polémique avec les
idées de son adversaire exposées dans une interview donnée à la presse, il a
exprimé son avis sur les œuvres conçues par ce dernier dans l’espace
municipal. Ses propos concernaient une question d’intérêt général et visaient
non pas la personne mais les opinions de son adversaire. En outre, les
expressions qu’il a employées n’étaient pas offensantes pour ce dernier. Il
en résulte que la critique qu’il a formulée à son encontre était légitime. 26. Le
Gouvernement reconnaît que la sanction infligée au requérant a constitué
une ingérence dans son droit à la liberté d’expression. Il soutient que cette
ingérence était cependant « prévue par la loi » et poursuivait un
but légitime, à savoir la protection de la réputation et des droits d’autrui. 27. Le
Gouvernement fait observer que les propos incriminés, publiés dans un
quotidien largement distribué, consistaient en une affirmation du requérant
selon laquelle son adversaire était responsable de l’actuel aspect
urbanistique de Katowice. Or, les juridictions internes ont observé que ces
propos du requérant étaient dénués de base factuelle. Plus particulièrement,
contrairement aux principes auxquels doit satisfaire la critique honnête et
légitime, le requérant n’a informé ses lecteurs ni sur les concepts
architecturaux ni sur les procédures en matière d’urbanisme en vigueur à
l’époque. Les propos du requérant ont dévalorisé son adversaire aux yeux du
public, d’autant plus qu’il avait laissé entendre qu’il était le seul
responsable de la situation stigmatisée dans son article. 28. Le
Gouvernement fait observer que les jugements prononcés à l’encontre du
requérant étaient fondés sur un certain nombre de preuves. La sanction
retenue à son encontre ne saurait passer pour excessive, compte tenu du fait
qu’elle consistait seulement en des excuses publiques, assorties de la simple
obligation de rembourser les frais de procédure exposés par son adversaire. 2. Appréciation
de la Cour a) Principes
généraux 29. La
Cour rappelle que la liberté d’expression, consacrée par le paragraphe 1 de
l’article 10, constitue l’un des fondements essentiels d’une société
démocratique, l’une des conditions primordiales de son progrès et de
l’épanouissement de chacun. Sous réserve du paragraphe 2, elle vaut non
seulement pour les « informations » ou « idées »
accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes,
mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent : ainsi le
veulent le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels il
n’est pas de « société démocratique » (voir, parmi bien d’autres
arrêts, Oberschlick
c. Autriche (no 1), 23 mai 1991, série A no 204, § 57, et Nilsen et Johnsen
c. Norvège [GC], no 23118/93, CEDH 1999‑VIII, § 43). 30. La
Cour note que la présente affaire concerne les propos tenus dans un article
publié par un journaliste. Dans le contexte de la liberté de presse,
l’article 10 § 2 de la Convention ne laisse guère de place pour des
restrictions à la liberté d’expression dans le domaine du discours politique
ou de questions d’intérêt général (Sürek c. Turquie (no 1) [GC], no 26682/95, CEDH
1999-IV, § 61). Assurément,
l’article 10 § 2 permet de protéger la réputation d’autrui, c’est-à-dire de
chacun, mais les impératifs de cette protection doivent être mis en balance
avec les intérêts de la libre discussion des questions politiques (Lingens c. Autriche, précité, § 42). 31. Il
ne faut pas oublier le rôle éminent de la presse dans un État de droit. Si
elle ne doit pas franchir certaines bornes fixées en vue, notamment, de la
défense de l’ordre et de la protection de la réputation d’autrui, il lui
incombe néanmoins de communiquer des informations et des idées sur les
questions politiques ainsi que sur les autres thèmes d’intérêt général.
La liberté de la presse fournit aux citoyens l’un des meilleurs moyens
de connaître et juger les idées et attitudes de leurs dirigeants (Castells c. Espagne, 23 avril 1992, série A no 236, § 43). La
liberté journalistique comprend aussi le recours possible à une certaine dose
d’exagération, voire même de provocation (Prager et Oberschlick
c. Autriche, 26 avril 1995, série A no 313, § 38). 32. Si
la liberté d’expression est assortie d’exceptions, celles-ci « appellent
toutefois une interprétation étroite », et le besoin d’une quelconque
restriction « doit se trouver établi de manière convaincante »
(voir l’arrêt précité Observer et Guardian, § 59). Certes, il
revient en premier lieu aux autorités nationales d’évaluer s’il existe un
« besoin social impérieux » susceptible de justifier cette
restriction, exercice pour lequel elles bénéficient d’une certaine marge
d’appréciation. En ce qui concerne la presse, la marge d’appréciation
nationale se heurte à l’intérêt d’une société démocratique à assurer et
à maintenir la liberté de la presse. De même, il convient d’accorder un
grand poids à cet intérêt lorsqu’il s’agit de déterminer, comme l’exige le
paragraphe 2 de l’article 10, si la restriction était proportionnée au but
légitime poursuivi (Worm c. Autriche, 29 août 1997, Recueil 1997‑V, § 47,
et Feldek
c. Slovaquie, no 29032/95, CEDH 2001‑VIII,
§ 78). 33. Un
facteur particulièrement important est la distinction entre les déclarations
de fait et les jugements de valeur. Si la matérialité des premières peut se
prouver, les seconds ne se prêtent pas à une démonstration de leur
exactitude. Pour les jugements de valeur, l’obligation de preuve est donc
impossible à remplir et porte atteinte à la liberté d’opinion elle-même,
élément fondamental du droit garanti par l’article 10. Toutefois, même
lorsqu’une déclaration équivaut à un jugement de valeur, la proportionnalité
de l’ingérence dépend de l’existence d’une base factuelle suffisante pour la
déclaration incriminée puisque même un jugement de valeur peut se révéler
excessif s’il est totalement dépourvu de base factuelle (Turhan c. Turquie, no 48176/99, 19 mai
2005, § 24, et Jerusalem c. Autriche, no 26958/95, CEDH
2001-II, § 43). 34. La
Cour n’a point pour tâche, lorsqu’elle exerce son contrôle, de se substituer
aux autorités nationales, mais de vérifier sous l’angle de l’article 10
les décisions qu’elles ont rendues en vertu de leur pouvoir d’appréciation.
Ce faisant, il lui faut considérer l’ingérence litigieuse à la lumière
de l’ensemble de l’affaire pour déterminer si les motifs invoqués par les
autorités nationales pour la justifier apparaissent « pertinents et
suffisants » et vérifier qu’elles ont appliqué des règles
conformes aux principes consacrés à l’article 10 et ce, de surcroît, en
se fondant sur une appréciation acceptable des faits pertinents (Vogt c. Allemagne, 26 septembre 1995,
série A no 323, § 52, et Jerusalem c. Autriche, précité, § 33). b) Application
de ces principes en l’espèce 35. La
Cour note qu’en l’espèce, il ne prête pas à controverse entre les parties que
les jugements prononcés à l’encontre du requérant ont constitué une ingérence
dans l’exercice de son droit à la liberté d’expression et que cette ingérence
était prévue par la loi et poursuivait un but légitime – la protection de la
réputation d’autrui. Reste à déterminer si la mesure d’ingérence incriminée
était proportionnée au but légitime invoqué et nécessaire dans une société
démocratique. 36. La
Cour observe dans ce contexte que la publication du requérant s’inscrivait
dans un débat et un échange d’opinions entre les lecteurs de son quotidien et
les internautes sur la question de l’aspect urbanistique de Katowice et de
son évolution possible future. Il s’agissait donc incontestablement d’une
question d’intérêt général, domaine dans lequel les restrictions à la liberté
d’expression doivent être strictement encadrées. La Cour doit faire
preuve de la plus grande prudence lorsque, comme en l’espèce, les mesures
prises par les autorités nationales sont de nature à dissuader la presse
de participer à la discussion de problèmes d’intérêt public (Standard Verlags GmbH
c. Autriche, no 13071/03, 2 novembre 2006, §
49 ; Kulis
et Rozycki c. Pologne, no 207209/03, § 37, 6
octobre 2009). 37. La
Cour observe que la publication du requérant entrait dans la polémique entre
lui-même et son adversaire, engagée à la suite de l’interview donnée par ce
dernier aux journalistes et entretenue par voie de presse. Les propos que le
requérant a tenu en sa qualité de journaliste visaient non pas l’intégralité
de l’acquis professionnel de son adversaire mais essentiellement les œuvres
issues de son activité d’architecte municipal. Ceci implique que, dans le
contexte de la présente affaire, tant le requérant que son adversaire étaient
des acteurs de la vie publique. Par conséquent, les limites de la critique
admissible étaient plus larges que dans le cas de simples particuliers (Urbino Rodrigues de Silva
c. Portugal,
no 75088/01, § 30, 29 novembre 2005). 38. La
Cour observe également que dans son article, le requérant réagissait aux
propos de son adversaire, l’un des architectes phares de Katowice durant
l’époque d’après-guerre. Il a exprimé son jugement sur la valeur de son œuvre
conçue à cette époque et sur sa contribution à l’esthétique de la ville.
La Cour estime que le débat dans lequel le requérant et son adversaire
étaient impliqués portait sur des questions qui, de nos jours, peuvent être
qualifiées d’« historiques ». Elle rappelle dans ce contexte qu’en
principe, le recul du temps accroît l’étendue de la liberté d’expression dont
bénéficient les participants à un débat portant sur de telles questions (voir,
mutatis
mutandis,
Chauvy
et autres c. France, no 64915/01, § 69, CEDH
2004-VI Orban
c. France,
no 20985/05, § 52, 15 janvier 2009 ou encore Dink c. Turquie, no 2668/07 et suiv. § 135, 14
septembre 2010). 39. Pour
ce qui est de la nature des propos tenus par le requérant, la Cour observe
que, sans avoir nié pour autant qu’il s’agissait de jugements de valeur, les
juridictions internes lui ont reproché de s’être exprimé « de façon
démagogique et sans citer d’arguments concrets ». Ces
juridictions ont également estimé que, sans en avoir démontré le bien-fondé,
le requérant avait formulé une déclaration catégorique, laissant entendre que
son adversaire était « le seul responsable de la destruction du
patrimoine silésien ». 40. Toutefois,
la Cour estime que les juridictions internes se sont montrées rigides et
n’ont pas suffisamment tenu compte du contexte et du caractère de la
publication incriminée. Elle note que le requérant a exprimé un
jugement, en l’occurrence manifestement négatif, sur la valeur esthétique des
œuvres conçues jadis par son adversaire dans l’espace municipal. Le sujet qui
faisait l’objet de la polémique entre les intéressés relevait d’un domaine
abstrait et très subjectif par sa nature, se prêtant difficilement à une
évaluation concrète et objective. Ainsi, la Cour estime qu’obliger le
requérant à démontrer l’exactitude de ses assertions équivaudrait à le placer
devant une tâche déraisonnable voire impossible (Thorgeir Thorgeirson c. Islande, 25 juin 1992, Recueil A
239, § 65). Par ailleurs, compte tenu du contexte satirique de l’article
entier, ses propos concernant J.J. ne sauraient raisonnablement être perçus
comme une accusation formelle et sérieuse (Sokolowski c. Pologne, no 75955/01, § 46,
29 mars 2005). 41. La
Cour note que les juridictions internes ont retenu que le requérant s’était
exprimé sur un ton ironique, voire moqueur. Elle rappelle à cet égard que la
presse a le devoir de communiquer des informations et des idées sur les
sujets d’intérêt public et que, ce faisant, il lui est permis de recourir à
une certaine dose d’exagération, voire de provocation, ou en d’autres termes,
d’être quelque peu immodérée dans ses propos (Mamère c. France, no 12697/03, CEDH
2006-(...), § 25, et Dąbrowski c. Pologne, no 18235/02,
19 décembre 2006, § 35). Le recours au registre satirique et l’emploi de
l’ironie se concilient parfaitement avec l’exercice de la liberté
d’expression d’un journaliste. La Cour note, à l’instar du tribunal régional
de Katowice, que le langage employé par le requérant n’était ni vulgaire ni
sciemment outrageux. Le requérant ne visait pas les qualités personnelles de
son adversaire mais seulement les éléments précis de son acquis
professionnel. La Cour estime que, compte tenu du contexte de la publication
incriminée, le style et les moyens d’expression employés par le requérant
étaient en rapport avec la nature des questions abordées dans son article. 42. Enfin,
ce qui compte n’est pas le caractère mineur de la sanction retenue à
l’encontre du requérant, mais le fait même qu’il avait été contraint de
s’excuser publiquement pour ses propos (voir, par analogie Urbino Rodrigues da Silva ci-dessus, § 35). 43. Compte
tenu de ce qui précède, la Cour estime qu’en l’espèce il y a eu violation de
l’article 10 de la Convention. II. SUR
LES AUTRES GRIEFS 44. En
invoquant l’article 6 de la Convention, le requérant se plaint du rejet par
les juridictions des éléments de preuve qu’il souhaitait produire. En outre,
sous l’angle de cette même disposition, le requérant se plaint du refus de la
Cour suprême d’examiner son pourvoi, exprimé par une ordonnance dépourvue de
motivation et rendue sans audience préalable. 45. La
Cour rappelle qu’aux termes de l’article 19 de la Convention, elle a pour
tâche d’assurer le respect des engagements résultant de la Convention pour
les Parties contractantes. Spécialement, il ne lui appartient pas de
connaître des erreurs de fait ou de droit prétendument commises par une
juridiction interne, sauf si et dans la mesure où elles pourraient avoir
porté atteinte aux droits et libertés sauvegardés par la Convention. Par
ailleurs, si la Convention garantit en son article 6 le droit à un procès
équitable, elle ne réglemente pas pour autant l’admissibilité des preuves ou
leur appréciation, matière qui relève dès lors au premier chef du droit
interne et des juridictions nationales (Schenk c. Suisse du 12 juillet 1988,
série A no 140, p. 29, §§ 45-46, ou Ciesielczyk c. Pologne, no12484/05, § 54, 26
juin 2012). 46. Quant
au grief relatif au refus de la Cour suprême d’examiner le pourvoi du
requérant, la Cour rappelle ses décisions dans les affaires Zmalinski (Zmaliński c. Pologne ((déc), no 52039/99, 16 octobre
2001) et Walczak (Walczak c. Pologne ((déc), no 77395/01, 7 mai 2002), où
il a été dit que le fait que la Cour suprême puisse refuser, par une décision
prise à l’issue d’une séance tenue en chambre du conseil et non motivée,
d’examiner un pourvoi jugé manifestement infondé, ne portait pas atteinte au
droit à un procès équitable. 47. Compte
tenu de ce qui précède, la Cour juge les griefs du requérant manifestement
mal fondés, au sens de l’article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention, et les
rejette. III. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION 48. Aux
termes de l’article 41 de la Convention, « Si la
Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et
si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer
qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la
partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. » A. Dommage 49. Le
requérant réclame 10 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral qu’il
aurait subi. 50. Le
Gouvernement estime que ce montant est excessif. 51. La
Cour considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 2 000 EUR au titre
du préjudice moral. B. Frais
et dépens 52. Le
requérant demande également 310 EUR pour les frais et dépens engagés devant
les juridictions internes ainsi que la totalité des frais engagés devant la
Cour. 53. Le
Gouvernement demande le rejet de ces prétentions, au motif que le requérant
n’a pas démontré la réalité de ses dépenses. 54. Selon
la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de
ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité,
leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce et
compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour
estime raisonnable la somme demandée par le requérant au titre des frais et
dépens de la procédure nationale et la lui accorde. En revanche, étant donné
que le requérant n’a ni indiqué le montant des frais engagés dans la
procédure à Strasbourg, ni établi leur réalité, la Cour rejette sa demande
dans cette mesure. C. Intérêts
moratoires 55. La
Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux
d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne
majoré de trois points de pourcentage. PAR CES
MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ, 1. Déclare la requête recevable
quant au grief tiré de l’article 10 de la Convention et irrecevable pour le
surplus ; 2. Dit qu’il y a eu violation de
l’article 10 de la Convention ; 3. Dit a) que
l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois, à compter du
jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément
à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes
suivantes, à convertir dans la monnaie de l’Etat défendeur au taux applicable à la
date du règlement : i) 2
000 EUR (deux mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre
d’impôt, pour dommage moral ; ii) 310
EUR (trois cent dix euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt
par le requérant, pour frais et dépens ; b) qu’à
compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants
seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de
prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette
période, augmenté de trois points de pourcentage ; 4. Rejette la demande de
satisfaction équitable pour le surplus. Fait en
français, puis communiqué par écrit le 16 octobre 2012, en application
de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement. commentaires Nous diffusons cet arrêt de la
CEDH parce qu’il traite de questions qui sont au premier plan de notre
actualité. Qu’il s’agisse de personnalités
politiques ou de notables divers, -
au sens moderne du terme -, on
constate au pénal que les procès-verbaux d’audition sont reproduits
dans une certaine presse quelques heures après leur établissement. Ce qui
semble être un viol du secret de l’instruction est au contraire approuvé
chaleureusement au nom de la nécessité qu’il y aurait à informer la
population sans délai. Dans nombre de cas, on constate plusieurs mois, - voire
années - , après que le peuple a été induit en erreur. Le mis en examen, - de
droit ou de gauche, patron ou salarié -, obtient au mieux un non lieu, au pis
une relaxe. D’une autre manière, hors de toute
instance judiciaire, certains se répandent en appréciations inappropriées sut
tel ou tel. D’autres sont au contraire bâillonnés. Il faut savoir que dans ce genre
d’affaires les solutions divergent selon qu’il y a eu ou non, - d’une manière
ou d’une autre -, intervention d’un journaliste. C'est la loi du 29
juillet 1881 qui protège les personnes et les institutions publiques ou
privées contre les informations et commentaires qui leur ont porté préjudice,
à charge pour elles d'en demander réparation. Un autre intérêt de l’affaire est
qu’il s’agit d’avis émis au sujet de la qualité de diverses œuvres
architecturales, urbanistiques ou environnementales réalisées en Pologne à
l’époque du « rideau de fer ». On lit par exemple : « M. Jurand Jarecki et l’équipe entière des architectes
d’alors à Katowice étaient convaincus qu’ils créaient des choses grandioses
et rendaient les gens heureux. En réalité, ils créaient de la grandeur et du
bonheur à la taille d’un imperméable et d’une cravate sur un
élastique. ». Le requérant, M. Michal Smolorz a
été condamné au civil pour atteinte à la réputation de M. Jurand Jarecki. Il a considéré que sa condamnation constituait une
violation de son droit à la liberté d’expression. Il a saisi la Cour le 16
avril 2007 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits
de l’homme et des libertés fondamentales. C’est
l’occasion de citer l’article 10 de la Convention, qu’il faut
connaître : « 1. Toute
personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion
et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées
sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans
considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les Etats de
soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un
régime d’autorisations. 2. L’exercice
de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être
soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions
prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société
démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la
sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la
protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou
des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations
confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir
judiciaire. » En 29, La
Cour rappelle que la liberté d’expression, consacrée par le paragraphe 1 de l’article
10, constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique,
l’une des conditions primordiales de son progrès et de l’épanouissement de
chacun. Sous réserve du paragraphe 2, elle vaut non seulement pour les
« informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou
considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui
heurtent, choquent ou inquiètent : ainsi le veulent le pluralisme, la
tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels il n’est pas de « société
démocratique » Nous vous
recommandons la lecture des paragraphes 30 à 34. La Cour y expose assez
clairement les grands principes qui doivent régir actuellement les
interventions de la Presse. |
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