00043608 CHARTE Ne sont
autorisées que 2) les analyses et courtes citations
dans un but d’exemple et d’illustration 3) l’insertion d’extraits dans un
ouvrage de formation associées, pour 2) et 3) à la citation du site |
Location d’un lot à un consulat étranger Apposition sur la façade de l’emblème national
étranger Travaux
effectués par le locataire sans autorisation Convention
diplomatique bilatérale franco-algérienne Privilège diplomatique opposable au syndicat (oui) Cour d’appel de Toulouse 1ère Chambre Section 1 9 mai 2006 Décision déférée du 17 Février 2005 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE N° RG 05/03020: REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS de la convention consulaire signée le 24 mai 1974 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, publiée au Journal officiel par décret du 3 avril 1980 et communiquée par l’appelant qui l’a visée dans ses conclusions; APPELANT CONSULAT DE LA REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET X... INTIMES SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE 25, RUE ROQUELAINE pris en la personne de son syndic en exercice de la SARL NNN Société SOCOGI-FINANCIERE RIQUET FAITS ET PROCÉDURE : Suivant contrat du 11 juillet 2002, les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET S.A. ont donné à bail au Consulat de la République algérienne démocratique et populaire un ensemble de lots de copropriété à usage de bureaux dont elles sont propriétaires dans l’immeuble du 25 rue Roquelaine à Toulouse. Le Consulat qui avait procédé sans autorisation à un certain nombre de travaux affectant les parties communes et l’aspect extérieur de l’immeuble, n’a obtempéré que partiellement à une décision de remise en état de l’assemblée générale des copropriétaires. Par acte d’huissier du 17 juin 2003, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble 25 rue Roquelaine a fait citer ses bailleurs les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET devant le tribunal de grande instance de Toulouse aux fins de remise en état sous astreinte. Les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET ont appelé en cause et en garantie le Consulat de la République algérienne démocratique et populaire pris en la personne de son Consul. Par le jugement déféré du 17 février 2005, le tribunal, constatant que le consulat avait renoncé à son immunité de juridiction, a rejeté les demandes afférentes à l’annexion d’un local commun dont la jouissance privative avait été votée à l’unanimité au profit du précédent propriétaire des lieux, et à l’enlèvement du pavillon national algérien dont l’apposition constitue un droit consacré par la convention de Vienne, mais fait droit, sous la garantie du consulat, aux demandes de remise en état concernant l’enlèvement de grilles de protection maintenues sur les fenêtres du rez-de-chaussée, le rétablissement de tous les persiennes et l’enlèvement d’une caméra de surveillance dans le porche d’entrée. Le Consulat de la République algérienne démocratique et populaire pris en la personne de son Consul, régulièrement appelant, conclut à l’infirmation de cette décision, à la nullité de l’assignation d’appel en cause pour violation de l’article 688 du nouveau code de procédure civile, et par voie de conséquence de toute la procédure à son égard, subsidiairement à l’irrecevabilité de l’action en vertu de l’immunité de juridiction, et réclame la somme de 5.000 ç à titre de dommages-intérêts pour procédure et résistance abusives contre son bailleur ou toute autre partie succombante. Il fait notamment valoir que, émanation de l’Etat d’Algérie, il n’a pas la personnalité juridique et n’est pas habilité à recevoir directement les actes de procédure. Les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET concluent à la confirmation du jugement dont appel sauf en ce qu’il les a condamnées à remettre en l’état d’origine les façades extérieures et intérieures de la résidence et en ce qu’il les a condamnées à l’article 700 et aux dépens. Elles soutiennent que l’exception de nullité qui n’a causé aucun grief et a été couverte en première instance est irrecevable, que le consulat a expressément renoncé à son immunité de juridiction lors de l’audience, sur le fond que l’apposition de l’écusson national et d’un système de sécurité sont l’accessoire indissociable d’une activité qui n’est pas interdite par le règlement de copropriété. Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble 25 rue Roquelaine conclut au rejet de l’ensemble des demandes du Consulat qui a couvert la nullité de procédure et renoncé à son immunité de juridiction, et demande à la Cour de condamner sous astreinte de 200 ç les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET ainsi que le Consulat de la République algérienne démocratique et populaire à remettre en leur état d’origine l’intégralité des parties communes utilisées actuellement par le Consulat de manière privative et sans autorisation préalable du syndicat, ainsi que l’ensemble des façades extérieures et intérieures. Il fait valoir, en ce qui concerne le pavillon national, que la convention de Vienne prévoit que son exercice doit tenir compte des règlements et usages de l’Etat de résidence, et donc en l’occurrence du règlement de copropriété. MOTIFS DE LA DÉCISION : Attendu que c’est à juste titre que le Consul d’Algérie fait valoir que le Consulat, émanation de l’Etat d’Algérie, n’a pas la personnalité juridique et n’est pas habilité à recevoir directement les actes de procédure; que seul en effet, l’Etat algérien pouvait être assigné alors que l’assignation a été délivrée au Consulat; Attendu que le moyen ainsi articulé s’analyse en droit en un défaut de qualité passive et constitue un moyen de nullité des actes pour irrégularité de fond au sens de l’article 117 du nouveau code de procédure civile; que le moyen peut être proposé en tout état de cause et ne requiert pas la justification d’un grief; Attendu en conséquence que c’est à bon droit que la nullité de l’assignation est soulevée; Attendu pour autant que la résistance des parties adverses aux moyens de nullité et irrecevabilité avancés par l’appelant ne peut être qualifiée abusive alors qu’elles étaient fondées à défendre comme elles l’ont fait devant la Cour en l’état des qualifications juridiques proposées à l’appui de ses moyens par l’appelant qui d’une part n’avait excipé d’aucune nullité en première instance et ne pouvait par conséquent utilement se prévaloir d’une exception de nullité pour vice de forme pour la première fois en appel après avoir défendu au fond, et d’autre part ne peut contester, sauf inscription de faux, les constatations faites par le juge dans sa décision concernant les déclarations faites devant lui par le représentant du Consulat relativement à sa renonciation à l’immunité de juridiction; Attendu en conséquence que les dispositions du jugement dont appel, en ce qu’elles concernent le Consulat d’Algérie ne peuvent qu’être annulées, et les demandes des parties à l’encontre de ce dernier rejetées; Attendu, sur le fond du litige opposant le syndicat des copropriétaires et les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET, que le syndicat des copropriétaires ne conteste pas utilement le jugement dont appel en ce qui concerne le local du rez-de-chaussée donnant sur la cour intérieure sans s’expliquer aucunement sur le moyen admis par le premier juge, tiré d’une délibération adoptée à l’unanimité en conférant la jouissance privative au propriétaire à l’époque des lots acquis par les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET; Attendu que les règles concernant les signes extérieurs apparents de la représentation consulaire algérienne en France, drapeau et écusson aux armes de l’Etat d’envoi, sont régies non pas par la Convention de Vienne mais par les dispositions spéciales de la convention consulaire signée le 24 mai 1974 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, publiée au Journal officiel par décret du 3 avril 1980 et communiquée par l’appelant qui l’a visée dans ses conclusions; qu’au rang des privilèges convenus figure en l’article 10 de la convention ceux de placer sur la clôture extérieure de l’immeuble consulaire un écusson aux armes de l’Etat d’envoi et d’arborer le drapeau de l’Etat algérien sur l’édifice consulaire, sans aucune restriction; qu’aucune stipulation de la convention ne conduit en particulier à restreindre l’usage de ce privilège aux seuls édifices dont l’Etat algérien est propriétaire; qu’il ne s’agit pas d’un droit mais d’un privilège ressortant d’une convention internationale bilatérale à valeur supra-légale dont les premiers juges ont exactement analysé la portée et tiré les conséquences pour le syndicat des copropriétaires en rejetant la demande d’enlèvement; Attendu que les autres remises en état poursuivies par le syndicat des copropriétaires suivant une formulation générale en dispositif de ses conclusions sont spécifiées dans le corps des motifs de ses conclusions comme visant les grilles non conformes existant sur les façades extérieure et intérieure, les grilles de protection empiétant sur les parties communes, les caméras de surveillance disposées dans les parties communes, et sont celles admises précisément par les premiers juges outre la repose des persiennes; que les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET ne discutent pas utilement les motifs précis, complets et pertinents par lesquels les premiers juges ont fait droit à la demande les concernant au seul motif, simplement affirmé, qu’un système de sécurité serait indissociable d’une activité dont l’exercice n’est pas interdit dans l’immeuble par le règlement de copropriété, sans s’expliquer sur le fait que ces travaux ont été engagés sans que l’autorisation de l’assemblée générale ait été sollicitée; PAR CES MOTIFS : La Cour, Prononce la nullité de l’assignation d’appel en garantie délivrée au Consulat de la République algérienne démocratique et populaire; Annule en conséquence toutes les dispositions du jugement visant le Consulat de la République algérienne démocratique et populaire; Confirme la décision déférée en toutes ses autres dispositions; Déboute les parties de leurs demandes dirigées contre du Consulat de la République algérienne démocratique et populaire; Déboute le Consulat de la République algérienne démocratique et populaire de sa demande de dommages-intérêts; Y ajoutant, Vu l’article 700 du nouveau code de procédure civile, Rejette les demandes formées par les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET ainsi que le Consulat de la République algérienne démocratique et populaire; Condamne les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble 25 rue Roquelaine la somme supplémentaire de 1.500 ç (mille cinq cents euros) ; Condamne les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET aux entiers dépens de l’instance, en ce compris ceux exposés tant en premier ressort qu’en appel, et reconnaît pour ceux d’appel, à la SCP CHATEAU-PASSERA et la SCP NIDECKER & PRIEU-PHILIPPOT, avoués qui en ont fait la demande, le droit de recouvrement direct prévu à l’article 699 du nouveau code de procédure civile. Le présent arrêt a été signé par H. MAS, président et E. KAIM-MARTIN, greffier. LE GREFFIER : commentaires Suivant contrat du 11 juillet 2002, les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET S.A. ont donné à bail au Consulat de la République algérienne démocratique et populaire un ensemble de lots de copropriété à usage de bureaux dont elles sont propriétaires dans l’immeuble du 25 rue Roquelaine à Toulouse. Le consulat a fait effectuer sans autorisation de l’assemblée des copropriétaires différents travaux : Apposition sur la façade du pavillon national algérien Installation d’une caméra de surveillance dans le porche d’entrée Pose de grilles de protection sur les fenêtres du rez-de-chaussée Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble 25 rue Roquelaine a fait citer les bailleurs, soit les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET, devant le tribunal de grande instance de Toulouse aux fins de remise en état sous astreinte Les sociétés SOCOGI et FINANCIÈRE RIQUET ont appelé en cause et en garantie le Consulat de la République algérienne démocratique et populaire pris en la personne de son Consul. Le TGI a fait droit, sous la garantie du consulat, aux demandes de remise en état concernant l’enlèvement de grilles de protection maintenues sur les fenêtres du rez-de-chaussée, le rétablissement de tous les persiennes et l’enlèvement d’une caméra de surveillance dans le porche d’entrée. Il n’a pas fait droit à la demande d’enlèvement de l’emblème national algérien. Sur la demande en nullité de l’assignation en garantie délivrée contre le consulat, nous nous bornons à relever que la Cour d’appel retient qu’un consulat peut faire valoir qu’il est une émanation de son État, qu’il n’a pas la personnalité juridique et qu’il n’est pas habilité à recevoir directement les actes de procédure. Sur la demande d’enlèvement de l’emblème national
algérien, la Cour d’appel fait référence aux dispositions spéciales de
la convention consulaire signée le 24 mai 1974 entre le Gouvernement de la
République française et le Gouvernement de la République algérienne
démocratique et populaire, publiée au Journal officiel par décret du 3 avril
1980. Elle écarte celles, plus générales, de la Convention de Vienne. Elle fait valoir « qu’au rang des privilèges
convenus figure en l’article 10 de la convention ceux de placer sur la
clôture extérieure de l’immeuble consulaire un écusson aux armes de l’Etat
d’envoi et d’arborer le drapeau de l’Etat algérien sur l’édifice consulaire,
sans aucune restriction; » Les copropriétaires faisaient valoir que l’usage de ce
privilège devait être limité aux seuls édifices dont l’État concerné était
propriétaire ; la Cour d’appel répond que la Convention bilatérale ne
comporte aucune disposition restrictive venant à l’appui de cette prétention. En ce qui concerne les autres travaux, le lien aux
privilèges diplomatiques était moins évident. La Cour d’appel confirme la décision des premiers juges
obligeant les bailleurs à faire procéder à la remise en état des lieux.
L’annulation de l’assignation en garantie délivrée contre le consulat
entraîne l’impossibilité pour les bailleurs d’obtenir la garantie par le
consulat de ces condamnations. Deux questions méritent finalement des observations. Le première concerne la légèreté fréquemment manifestée
par les bailleurs d’un lot de copropriété à l’occasion de sa mise en location
à un preneur pour une destination autre que l’habitation. Ils doivent en
effet vérifier, préalablement à la régularisation de l’acte, ses besoins
spécifiques pour l’exercice de son
activité. On connaît bien les problèmes posés par les locations pour une
activité de restauration (évacuation des fumées, isolation phonique,
entreposage des bacs à ordures, etc.). D’une autre manière la location à une représentation ose
des problèmes particuliers. L’apposition de l’emblème national en est un. La
fréquentation souvent importante des locaux loués en est un autre qui n’est
pas évoqué dans la présente espèce. L’opposabilité à un syndicat de copropriétaires des
dispositions d’une convention bilatérale alors qu’elle est générée par la
location de l’un des lots seulement méritera un étude plus approfondie. Il
était sans doute mal venu de prétendre que l’usage du privilège diplomatique
devait être restreint aux seuls édifices dont l’État concerné est
propriétaire. On pourrait mieux prétendre qu’il fût restreint aux seuls cas
dans lesquels la location porte sur un immeuble entier appartenant à un
propriétaire unique. Nonobstant le particularisme justifié des conventions
diplomatiques, on peut songer à l’inopposabilité de clauses de ce type à des
particuliers totalement étrangers à l’opération immobilière permettant la
mise en œuvre d’un tel privilège. Le règlement de copropriété d’un immeuble pourrait-il
comporter une clause interdisant la location d’un lot à une représentation
diplomatique pour l’exercice de son activité ? ou, d’ailleurs, plus
généralement, l’exercice dans l’immeuble d’une telle activité par une
représentation diplomatique dont l’État aurait acquis un lot ? |
Mise à jour |