043608

 

 

Licenciement économique

Cadre comptable (administrateur de biens)

Absence de proposition d’un reclassement (oui)

Faute de l’employeur

 

 

COUR D’APPEL DE PARIS  22ème Chambre C  20 décembre 2007

N° de pourvoi : 06/07774

Numéro d’inscription au répertoire général : S 06/07774

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 novembre 2005 par le conseil de prud’hommes de Paris (2o Ch) - section encadrement - RG no 03/09613

 

 

 

APPELANTE

S.A.R.L. YYY

 

 

INTIMEE

 

Madame Leila X...

 

 

ARRET : - CONTRADICTOIRE

 

Vu l’appel régulièrement interjeté par la SàRL YYY à l’encontre d’un jugement prononcé le 29 novembre 2005 par le conseil de prud’hommes de PARIS ayant statué sur le litige qui l’oppose à Madame Leila X... sur les demandes de cette dernière relatives au licenciement dont elle a été l’objet.

 

Vu le jugement déféré qui a condamné la SàRL YYY à payer à Madame Leila X... la somme de 18 100 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et 450 € par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l’audience aux termes desquelles :

 

La SàRL YYY, appelante, poursuit l’infirmation du jugement déféré et le débouté des demandes de Madame Leila X... avec paiement de 1 000 € par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

Madame Leila X..., intimée, conclut à la confirmation du jugement sur la qualification du licenciement, au paiement de la somme de 30 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 1 800 € par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

CELA ÉTANT EXPOSÉ

 

Par contrat écrit à durée indéterminée en date du 2 janvier 1995, Madame Leila X... a été engagée par la SàRL YYY en qualité d’assistante de recouvrement. En 1997, Madame Leila X... a été promue responsable de recouvrement, statut cadre. Sa rémunération mensuelle était fixée en dernier lieu à la somme de 2 769,37 €.

 

Le 6 mars 2003, la SàRL YYY convoquait Madame Leila X... pour le 19 mars 2003 à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

 

Le licenciement était signifié le 2 avril 2003 pour motif économique.

 

SUR CE

 

Sur le licenciement.

 

Sans qu’il soit nécessaire d’analyser le motif économique invoqué par la SàRL YYY, il apparaît que cette dernière n’a pas rempli à l’égard de Madame Leila X... les obligations qui lui incombaient en matière de reclassement.

 

En effet la SàRL YYY s’est contentée de proposer à Madame Leila X... un poste d’employée de gestion/copropriété qui venait de devenir vacant par démission de sa titulaire. Madame Leila X... a très logiquement refusé ce poste qui lui faisait perdre son statut de cadre, acquis depuis plusieurs années, et se traduisait par une diminution très substantielle de salaire.

 

En revanche, la SàRL YYY n’a pas proposé à Madame Leila X... le poste de “comptable copropriété” qu’elle a pourtant pourvu par une embauche en juin 2003, alors que Madame Leila X... se trouvait encore dans son délai de préavis.

 

La SàRL YYY fait valoir que le suivi du recouvrement des impayés de loyers, dont était jusque là chargée Madame Leila X..., et la comptabilité des copropriétés, contenu du nouveau poste, sont deux tâches très différentes, la seconde nécessitant un niveau de qualification que n’avait pas atteint Madame Leila X... et qu’elle ne pouvait acquérir qu’au moyen d’une formation très lourde. Elle produit le curriculum vitae du candidat qu’elle a recruté établissant que celui-ci dispose d’une formation et d’une expérience professionnelle dans le domaine de compétence recherché.

 

Il résulte toutefois des propres écritures de la SàRL YYY que le comptable engagé, dont elle ne produit pas le contrat de travail, a en partie repris les tâches qu’accomplissait l’employée démissionnaire dont le poste avait été proposé à Madame Leila X..., c’est à dire des tâches moins qualifiées que celles de cette dernière. Pour le reste ce nouveau salarié devait “décharger la comptabilité copropriété exécutée par le gérant de XXX, lequel assurait également les tâches de recouvrement de loyers exécutées par Madame X....” Cette présentation alambiquée ne permet pas de définir le contour précis du poste et ne fait pas apparaître en quoi cet emploi nouveau se distinguait dans la pratique de celui de Madame Leila X... par une technicité inaccessible à cette dernière. Au demeurant Madame Leila X... indique sans être contredite que son travail ne se limitait pas au recouvrement d’impayés et qu’elle avait toujours participé aux travaux de comptabilité.

 

En n’étudiant pas de manière circonstanciée avec Madame Leila X... si elle était apte, soit d’emblée soit après une formation de mise à niveau, à occuper le poste de “comptable copropriété” pour lequel un nouveau salarié a été embauché dans un temps proche du licenciement, la SàRL YYY a manqué à son obligation de reclassement, ce qui prive la mesure prise à l’égard de l’intéressée de tout caractère réel et sérieux.

 

 

Sur le montant de l’indemnité.

 

Compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l’entreprise et de l’effectif de celle-ci, l’indemnité fixée par le conseil de prud’hommes constitue une juste réparation du préjudice de Madame Leila X... et il a lieu à confirmation de ce chef.

 

La juste indemnisation du retard de paiement souffert par Madame Leila X... nécessite qu’il soit fait application à sa créance des dispositions de l’article 1154 du code civil.

 

 

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens.

 

Succombant en son appel, la SàRL YYY sera condamnée aux dépens de ce dernier et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés.

 

La somme qui doit être mise à la charge de la SàRL YYY au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Madame Leila X... peut être équitablement fixée à 1 000 euros, cette somme complétant celle allouée en première instance.

 

PAR CES MOTIFS

 

LA COUR

 

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

 

Y ajoutant,

 

Dit que les intérêts échus sur le capital de 18100 € (dix huit mille cent euros) pour une année entière produiront eux-mêmes des intérêts.

 

Condamne la SàRL YYY aux dépens et à payer à Madame Leila X... la somme de 1 000 € (mille euros) par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

 

 

 

 

commentaires

 

Par contrat écrit à durée indéterminée en date du 2 janvier 1995, Madame Leila X... a été engagée par la SàRL YYY en qualité d’assistante de recouvrement. En 1997, elle a été promue responsable de recouvrement, statut cadre.

Le 6 mars 2003, la SàRL YYY convoquait Madame Leila X... pour le 19 mars 2003 à un entretien préalable à un éventuel licenciement économique.

La SàRL YYY a proposé à Madame Leila X... un poste d’employée de gestion/copropriété qui venait de devenir vacant par démission de sa titulaire. Madame X... a refusé ce poste qui lui faisait perdre son statut de cadre et se traduisait par une diminution très substantielle de salaire.

Au même moment un comptable copropriété était embauché.

La Cour juge que la présentation cet emploi faite par la société appelante ne permet pas de définir le contour précis du poste et ne fait pas apparaître en quoi cet emploi nouveau se distinguait dans la pratique de celui de Madame Leila X... par une technicité inaccessible à cette dernière.

L’intimée prétend sans être contredite qu’elle effectuait également des travaux de comptabilité.

 

La Cour d’appel juge finalement que l’emploi ainsi pourvu par l’embauche d’un nouveau salarié aurait pu être proposé à Madame X dans le cadre de l’obligation de reclassement. Elle ne précise toutefois pas si l’emploi en question permettait le maintien de la position « cadre ».

 

Les syndics professionnels sont ainsi appelés à une grande prudence à l’occasion d’un licenciement économique. Par ailleurs les instituts de formation professionnelle doivent veiller à étendre le domaine de compétence des étudiants ou salariés (au titre de la formation continue).

 

 

 

 

Mise à jour

07/05/2008