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Responsabilité du syndicat à l’égard du locataire

Défaut d'entretien des parties communes

Exclusivité conditionnelle de l’action fondée sur l’art. L 14

Carence du bailleur  (en l’espèce : non)

Mis en location d’un logement indécent (oui)

 

CA Montpellier, 5e ch., sect. A., 20 nov. 2008, Serrado / Vanneau:

 

 

Attendu que l'appel, interjeté dans les formes de la loi avant toute signification avérée est recevable;

Qu'il est constant que le trouble dont les locataires demandent réparation fait suite à des infiltrations importantes en toiture;

Que la toiture d'un immeuble en copropriété est une partie commune par nature;

Attendu que si, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, l'action dont le locataire d'un immeuble en copropriété dispose, sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, à l'encontre du syndicat des copropriétaires, pour des troubles provenant des parties communes, exclut que ce preneur dispose à l'encontre du bailleur d'une action fondée sur l'article 1719, 2° et 3° du Code civil ainsi que sur l'article 1721 du même code, le bailleur n'ayant pas qualité pour entreprendre seul les travaux de réparation ou d'entretien touchant aux parties communes et ne pouvant y être contraint, à la condition toutefois qu'il soit prouvé que le bailleur a accompli, à l'égard du syndicat des copropriétaires, toutes les diligences nécessaires pour satisfaire aux demandes du preneur, il en va en revanche différemment, lorsque le bailleur n'a pas satisfait à son obligation de délivrance, c'est-à-dire à l'obligation qui lui est faite, aux termes de l'article 1719 la du Code civil, de délivrer un logement décent, conforme à sa destination, c'est-à-dire, notamment, un logement assurant le clos et le couvert;

Que, s'il apparaît des pièces produites, ce qui n'est d'ailleurs pas discuté par les intimés, que, averti des infiltrations en toiture dont ses locataires ont été victimes dès le mois de septembre 2006, trois mois à peine après leur entrée dans les lieux, neufs d'apparence, Maxime Serrado a fait le nécessaire auprès du syndicat des copropriétaires pour qu'il soit procédé à la réfection de la toiture, et a, par la suite, les travaux étant votés par l'assemblée générale, payé rapidement sa quote-part et veillé à leur exécution, laquelle a eu lieu, en novembre 2007, dans un délai qui n'apparaît pas anormal eu égard aux règles de fonctionnement d'une copropriété et au temps nécessaire à la passation d'un tel marché, mais après la survenance, en mai 2007, d'un nouveau sinistre, il reste que, lorsqu'il a conclu le bail avec les consorts Vanneau-Faizant, Maxime Serrado savait que le clos et le couvert de l'appartement loué, qui se situe en partie sous les toits, n'étaient pas assurés, la connaissance de cette situation de pur fait résultant, d'une part, de la mention apposée dans l'acte de vente, daté du 13 novembre 2003, d'un lot de la même copropriété intervenu entre la SARL Atelier méditerranéen d'aménagement et de gestion (AMAG), qui a acquis l'immeuble et l'a divisé en lots, selon énonciations de l'acte, et Jean Monnet, selon laquelle le vendeur reconnaissait que des travaux de réfection de la toiture, que ce vendeur s'engageait à prendre en charge, devaient être réalisés sur la toiture du lot 18, c'est-à-dire le lot acquis par Maxime Serrado, personnellement, le 26 septembre 2003 et donné à bail aux intimés, de ce que, à la date de conclusion du bail avec les consorts Vanneau-Faizant, ils ne l'étaient toujours pas et que, de dernière part, Maxime Serrado, architecte, connaissait cette situation de fait puisqu'il est le gérant de la société AMAG qui a aménagé et vendu l'immeuble par lots;

Qu'il en ressort que, manifestement, l'appelant n'a pas satisfait à son obligation de délivrance;

Que c'est donc à raison, par ces motifs substitués, que le premier juge a retenu son obligation à indemnisation;

 

 

commentaires

 

Pour beaucoup de praticiens de la copropriété, il est gravé dans le marbre que le locataire d’un lot, étranger à la copropriété, et victime d’un dommage causé par une partie commune ne peut exercer son recours qu’à l’encontre de son bailleur, charge à ce dernier de se retourner contre le syndicat, voire le syndic.

C’est oublier que l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 précise que « le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires. »

Dans ces cas particuliers, le locataire est recevable à agir directement contre le syndicat. Cette voie est-elle pour autant impérative ? Plus clairement encore, une action du locataire contre son bailleur doit-elle être considérée comme irrecevable, du moins mal fondée voire même abusive ?

En l’espèce, la Cour d’appel se prononce en faveur du principe de l’exclusivité de l’action contre le syndicat :

« Attendu que si, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, l'action dont le locataire d'un immeuble en copropriété dispose, sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, à l'encontre du syndicat des copropriétaires, pour des troubles provenant des parties communes, exclut que ce preneur dispose à l'encontre du bailleur d'une action fondée sur l'article 1719, 2° et 3° du Code civil ainsi que sur l'article 1721 du même code, le bailleur n'ayant pas qualité pour entreprendre seul les travaux de réparation ou d'entretien touchant aux parties communes et ne pouvant y être contraint … »

Elle reprend ainsi une solution déjà admise par d’autres juridictions [1]

Mais le bailleur n’est à l’abri d’une action de son locataire « qu’à la condition toutefois qu'il soit prouvé que le bailleur a accompli, à l'égard du syndicat des copropriétaires, toutes les diligences nécessaires pour satisfaire aux demandes du preneur ». C’est donc à son bailleur que le locataire doit en premier présenter ses doléances. Il y a obligation pour le bailleur de les transmettre au syndicat des copropriétaires, pris en la personne du syndic. En cas de carence du bailleur dans le respect de cette obligation, sa responsabilité contractuelle est engagée. [2]

Pour autant, le fondement de la responsabilité du bailleur est autre que celui de la responsabilité du syndicat, et il en va de même du préjudice à réparer. Le syndicat prendra finalement en charge la remise en état des peintures, le bailleur sera condamné à supporter le préjudice causé par le retard apporté à la remise en état des lieux.

Il faut ajouter, sur le plan pratique, que le locataire peut être confronté à des difficultés pratiques (savoir qui est le syndic notamment) et sur le plan juridique qu’il apparaît souhaitable que le bailleur ne soit pas tenu à l’écart d’un litige qui concerne son bien. Il lui reste sans doute la possibilité d’intervenir volontairement dans l’instance. Encore faut-il qu’il en ait connaissance ce qui, dans bien des cas, n’est pas toujours certain.

 

Une particularité de l’espèce est de faire apparaître une autre cause de responsabilité du bailleur : il connaissait le mauvais état de la toiture et il n’aurait pas dû mettre en location le logement, dont la décence n’était pas assurée !

 

Sur l’ensemble de ces difficultés : voir aussi l’étude de M. Abram, Les recours du locataire en cas de déficience des parties communes: AJDI 2002, p. 831 s.

 

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

17/03/2009

 

 

 

 

 



[1] CA Paris,23e ch., 21 nov. 2001: Loyers et copr. 2002, n° 82

[2] Cass. civ. 3e, 11 mars 1992 : Bull. civ. 1992, 1/1, n° 81. – Cass. civ. 3e , 18 nov. 1992: RDI. 1993, p. 123, note Capoulade