043608

 

 

Concierges gardiens et employés d’immeubles

Taxe d’habitation (Département du RhÔne)

Qualification de l’emploi et questions diverses

 

 

Sur la question de la taxe d’habitation, nous reproduisons, à la suite de nos commentaires, l’arrêt de la Cour de cassation du 22 janvier 1997.

 

 

Cour d’appel de Lyon 19 décembre 2006

Conseil de prud’hommes de Lyon du 6 février 2004

N° de pourvoi: 04/01767

 

 

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLEGIALE

R. G : 04 / 01767

 

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES 32 RUE BARREME LYON 69006

C / X...

 

APPEL D’UNE DECISION DU : Conseil de Prud’hommes de LYON du 06 Février 2004

RG : 02 / 05934

 

COUR D’APPEL DE LYON  CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 19 DECEMBRE 2006

 

APPELANT : SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES 32 RUE BARREME LYON 69006

Régie Sauzay  4 rue de la République 69001 LYON

représentée par Me Olivia LONGUET, avocat au barreau de LYON

 

INTIMEE :

Madame Teresa X... 69006 LYON

comparante en personne, assistée de M. Christian Y... (Délégué syndical ouvrier)

 

PARTIES CONVOQUEES LE : 12 mai 2005

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 10 Octobre 2006

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : Non reproduite

 

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 19 Décembre 2006, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

 

EXPOSE DU LITIGE

 

Madame Thérésa X... a été engagée par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble le Véronèse, à compter du 1 / 2 / 1999, en qualité d’employée d’immeuble (articles 18 et 21 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles), catégorie A, niveau 1, coefficient 235. Son temps de travail était fixé à 52 heures par mois, soit 2 heures par jour, y compris le samedi. Elle bénéficiait d’un logement de fonction, constituant un salaire en nature.

Revendiquant la qualification de gardienne-concierge (catégorie B, niveau 2, coefficient 255), elle a saisi le Conseil de Prud’hommes de Lyon, qui, dans sa décision rendue le 6 / 2 / 2004, a dit qu’elle ne pouvait prétendre à cette qualification, a rejeté ses demandes de rappel de salaires et congés payés afférentes, ainsi que ses demandes au titre de la demi-permanence de jour de présence vigilante, mais a condamné le syndicat des copropriétaires à lui verser les sommes suivantes :

-remboursement de la taxe d’habitation : 289. 34 €,

-remboursement de la consommation d’eau froide : 699. 40 €,

-indemnité poubelles de tri sélectif : 822. 96 €,

-retenue sur salaire indue : 449. 70 €,

-dommages-intérêts pour non-respect de l’obligation de fournir une tenue professionnelle : 305 €,

-article 700 du NCPC : 400 €.

 

Les deux parties ont relevé appel de ce jugement.

Dans ses conclusions écrites, reprenant ses observations orales, reçues par le greffe le 11 mai 2006, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble le Véronèse sollicite le rejet de toutes les demandes de la salariée. Il réclame la somme de 1 000 € en application de l’article 700 du NCPC.

Dans ses écritures venant au soutien de ses observations orales, reçues par le greffe le 29 / 9 / 2006, Thérésa X... maintient devoir bénéficier de la qualification de gardien concierge, catégorie B, niveau 2, coefficient 255, réclame le paiement des rappels de salaires afférents de février 1999 à juillet 2003, soit la somme de 19 292. 84 €, outre l’indemnité compensatrice de congés payés afférente, ainsi que la somme de 1 607. 74 € au titre du 13ème mois. Elle sollicite la confirmation du jugement sur tous les autres points, auxquels elle ajoute les demandes suivantes :

-remboursement partiel de la taxe d’habitation 2003 : 75. 60 €,

-rappel de salaire au titre de la demi-permanence de jour de présence vigilante : 3 005. 52 €, outre l’indemnité compensatrice de congés payés afférente, plus 250. 46 €,

-article 700 du NCPC : 1 000 €.

 

DISCUSSION

 

Sur la qualification de gardien concierge :

A l’appui de sa demande, Thérésa X... soutient qu’à la demande de son employeur, elle effectuait des tâches correspondant à celles définies dans le poste repère coefficient 255 défini par la convention collective : surveillance de la chaufferie de l’immeuble, distribution aux copropriétaires du courrier en provenance du syndic, distribution des colis déposés par la poste, services multiples demandés par les copropriétaires.

Le contrat de travail énumère uniquement des tâches simples d’entretien des parties communes de l’immeuble, dans lesquelles sont comprises le remplacement des ampoules. Il appartient donc à la salariée de démontrer qu’elle effectuait des tâches supplémentaires relevant de la surveillance générale de l’immeuble.

Le syndicat des copropriétaires ayant employé dans le passé un gardien-concierge, l’apposition de la plaque “ gardienne “ sur la boîte aux lettres et la porte du logement de fonction n’est pas déterminante, ni la présence dans celui-ci de l’alarme de l’installation de chauffage de l’immeuble. Thérésa X... n’établit ni qu’elle était chargée d’alerter la société assurant l’entretien de l’installation de chauffage ou de toute autre installation technique, ni qu’elle assurait une mission de surveillance de l’immeuble s’ajoutant aux tâches définies dans son contrat de travail.

La réception occasionnelle de colis et la distribution uniquement du courrier en provenance de la régie dans cette petite copropriété (11 logements) ne permettent pas de considérer qu’elle avait la charge de véritables tâches administratives qu’elle n’était pas en mesure de réaliser dans le cadre de son horaire habituel de travail.

Il convient par conséquent d’approuver le premier juge qui a estimé qu’elle ne pouvait prétendre à la qualification de gardien concierge et qui a rejeté ses demandes de rappel de salaires sur la base du coefficient 255 ainsi que celles relatives à la demi-permanence de jour de présence vigilante.

 

Sur la taxe d’habitation :

Il existait dans le département du Rhône un usage local professionnel, et non d’entreprise, selon lequel la taxe d’habitation afférente au logement de fonction était payée intégralement par l’employeur.

Cet usage a été dénoncé le 18 octobre 1993 par les organisations patronales composant la commission paritaire chargée de l’élaboration de la convention collective des gardiens concierges et employés d’immeuble aux différentes organisations représentatives du personnel salarié des syndicats de copropriétaires du Rhône.

Par un avenant du 30 / 1 / 2002, la commission paritaire du Rhône a décidé d’ajouter à l’avenant départemental du Rhône du 18 / 11 / 1981 un article 13, relatif à la taxe d’habitation, ainsi rédigé : “ A compter du 1 / 1 / 2002, la taxe d’habitation sera remboursée par l’employeur à hauteur de 60 % à tout salarié bénéficiant d’un logement de fonction accessoire au contrat de travail. Cette disposition ne remet pas en cause les avantages individuels acquis, les dispositions contractuelles ou les accords d’entreprise plus favorables prévoyant ce remboursement. La quote-part de la taxe d’habitation relative à la partie du logement, qui sert à accueillir du public, à entreposer du matériel, à installer des systèmes de sécurité est remboursée intégralement par l’employeur. Ces nouvelles dispositions négociées par les parties se substituent à l’usage dans le département du Rhône dénoncé par les employeurs les 18 et 21 octobre 1993 “.

L’usage étant par nature supplétif de la volonté des parties, il peut y être mis fin par une convention collective sans mettre en oeuvre la procédure de dénonciation. Peu importe donc la question de la validité de la dénonciation de l’usage effectuée en 1993 par les organisations d’employeurs. L’accord du 30 / 1 / 2002 s’est, par conséquent, substitué à l’usage antérieur même s’il est moins favorable au salarié, à compter du 1 / 1 / 2002.

Il convient donc d’approuver le premier juge qui a accordé à Thérésa X... le remboursement intégral de sa taxe d’habitation jusqu’à celle de l’année 2002, puis son remboursement partiel. Elle a droit en plus au remboursement de la somme de 75. 60 € au titre de l’année 2003.

 

Sur la consommation d’eau froide :

Le contrat de travail précise dans le paragraphe concernant le logement de fonction que “ l’immeuble comporte un service collectif d’eau froide et que Madame X... accepte que le coût des consommations inscrites au compteur du logement de fonction soit déduit de son salaire aussi bien à titre de provision que de solde “. Il ne s’agit pas d’un salaire en nature, ni d’un avantage à titre gratuit, la salariée n’invoquant pas une clause du règlement de copropriété lui accordant à titre gratuit la fourniture d’eau froide. Elle ne conteste pas que pour les besoins de son travail, elle utilisait le robinet du service collectif d’eau froide. En conséquence, il est certain que la consommation apparaissant sur le compteur d’eau froide du logement de fonction correspond uniquement à sa consommation personnelle. C’est donc à juste titre que le coût de celle-ci devait être laissé à sa charge. Le jugement ne peut qu’être infirmé sur ce point.

 

Sur la prime au titre des poubelles sélectives :

Cette prime n’étant accordée qu’au personnel de catégorie B (avenant no 50 du 5 / 2 / 1999), Thérésa X... doit être déboutée de sa demande.

 

Sur les retenues de salaire de 89. 94 € de février à août 2002 :

 

Le 19 / 2 / 2002, Thérésa X... a signé une reconnaissance de dette à hauteur de 590 F pour avoir utilisé “ les fournitures de droguerie à d’autres fins que celles de l’entretien de l’immeuble “.

Cette reconnaissance de dette ne permettait pas à l’employeur d’obtenir la réparation de son préjudice au moyen de retenues sur salaire, alors que la responsabilité pécuniaire de la salariée ne pouvait être engagée qu’en cas de faute lourde. Pour ce motif qui se substitue à celui des premiers juges, le jugement doit être confirmé en ce qu’il a ordonné à l’employeur de rembourser ces retenues illicites.

 

Sur la fourniture d’une tenue professionnelle :

L’article 12 de l’avenant départemental du Rhône prévoit la fourniture d’une blouse une fois par an sans faire de distinction selon qu’il s’agit d’un gardien concierge ou d’un employé d’immeuble. Il convient de confirmer la décision du premier juge qui a alloué à la salariée une indemnité en réparation du préjudice qu’elle a subi du fait du non-respect par l’employeur de cette obligation.

Chacune des parties succombant partiellement dans ses prétentions, il n’y a pas lieu de faire droit à leurs demandes respectives en application de l’article 700 du NCPC, tant en première instance qu’en appel.

 

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme partiellement le jugement entrepris,

Déboute Thérésa X... de sa demande de remboursement des retenues sur salaire correspondant à ses frais de consommation personnelle d’eau froide, et de sa demande en paiement des primes au titre des poubelles sélectives,

Confirme le jugement dans ses autres dispositions, sauf sur la condamnation du syndicat des copropriétaires au paiement d’une indemnité en application de l’article 700 du NCPC,

Le complétant,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’immeuble le Véronèse à payer à Thérésa X... la somme de 75. 60 € au titre de la taxe d’habitation 2003 ;

 

Rejette les demandes respectives des parties en application de l’article 700 du NCPC,

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d’appel.

 

 

Commentaires :

L’arrêt présente un intérêt certain au sujet de différents points controversés du régime des concierges, gardiens et employés d’immeubles.

Nous examinerons tout particulièrement la controverse relative au remboursement de la taxe d’habitation et ses aspects spécifiques à certains usages locaux.

 

Il existait dans le département du Rhône un usage local professionnel, et non d’entreprise, selon lequel la taxe d’habitation afférente au logement de fonction était payée intégralement par l’employeur.

Les organisations patronales ont estimé avoir dénoncé cet usage le 18 octobre 1993 au cours des travaux de la commission paritaire chargée de l’élaboration de la convention collective des gardiens concierges et employés d’immeuble, aux différentes organisations représentatives du personnel salarié des syndicats de copropriétaires du Rhône.

Par un avenant du 30 / 1 / 2002, la commission paritaire du Rhône a décidé d’ajouter à l’avenant départemental du Rhône du 18 / 11 / 1981 un article 13, relatif à la taxe d’habitation, ainsi rédigé : “ A compter du 1 / 1 / 2002, la taxe d’habitation sera remboursée par l’employeur à hauteur de 60 % à tout salarié bénéficiant d’un logement de fonction accessoire au contrat de travail. Cette disposition ne remet pas en cause les avantages individuels acquis, les dispositions contractuelles ou les accords d’entreprise plus favorables prévoyant ce remboursement. La quote-part de la taxe d’habitation relative à la partie du logement, qui sert à accueillir du public, à entreposer du matériel, à installer des systèmes de sécurité est remboursée intégralement par l’employeur. Ces nouvelles dispositions négociées par les parties se substituent à l’usage dans le département du Rhône dénoncé par les employeurs les 18 et 21 octobre 1993 “.

La Cour d’appel juge que l’accord du 30 / 1 / 2002 s’est substitué à l’usage antérieur même s’il est moins favorable au salarié, à compter du 1 / 1 / 2002.

Cette solution semble aller à l’encontre des prétentions des salariés qui continuent à se fonder sur la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation pour demander le paiement intégral de la taxe d’habitation par l’employeur. Nous reproduisons ci dessous l’un des arrêts rendus à propos de cette difficulté par la Chambre sociale de la Cour de cassation.

Il reste acquis que la taxe est remboursable intégralement pour la partie du logement dite « bureau ».

 

 

 

Cassation sociale 22 janvier 1997                                                                                       Rejet

Conseil de prud’Hommes de Lyon  du 14 mai 1993

N° de pourvoi: 93-43606

 

 

Sur le pourvoi formé par la société Régie Régir, société à responsabilité limitée, prise en sa qualité de syndic de la copropriété de l’ensemble immobilier Montmein sis ..., dont le siège est ...,

 

en cassation d’un jugement rendu le 14 mai 1993 par le conseil de prud’hommes de Lyon (section activités diverses), au profit de M. Mario de X..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

 

LA COUR,

 

Sur le moyen unique :

 

Attendu que le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier Montmein représenté par son syndic, la société Régie Régir, fait grief au jugement attaqué (conseil de prud’hommes de Lyon, 14 mai 1993) d’avoir condamné la copropriété à rembourser à M. de X... une somme représentant les montants cumulés des taxes d’habitation afférentes aux années 1987 à 1990 alors, selon le moyen, d’une part, que la commission paritaire de conciliation qui, selon l’article 2 de l’avenant départemental du 18 novembre 1991, a “pour mission l’examen des différends nés de l’application de la convention”, n’était pas compétente pour créer un droit exclu par la convention collective ou par l’avenant ayant fait l’objet d’un arrêté d’extension, qu’ainsi le conseil de prud’hommes qui n’a pas recherché quelles étaient les stipulations de la convention collective ou de son avenant concernant l’éventuel droit accordé aux gardiens d’obtenir le remboursement par leur employeur de la taxe d’habitation n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 131-1 et suivants du Code du travail; et alors, d’autre part, que le procès-verbal de la commission paritaire en date du 16 décembre 1982 énonçait dans des termes clairs et précis que “jusqu’à la parution de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles, l’usage dans le Rhône était que la taxe d’habitation soit payée intégralement par l’employeur” établissant ainsi que cet usage antérieur à la convention collective avait été dénoncé lors de la conclusion de celle-ci, dès lors le conseil de prud’hommes en décidant que l’usage demeurait en vigueur postérieurement à la convention collective a dénaturé les termes du procès-verbal de la commission paritaire, violant l’article 1134 du Code civil;

 

Mais attendu que la convention collective nationale de travail des gardiens, concierges et employés d’immeubles du 11 décembre 1979 et son avenant, ne contenant aucune disposition relative au remboursement par le propriétaire de la taxe d’habitation, n’a pas mis en cause l’existence d’un usage local plus favorable; que, par ce motif de pur droit substitué aux motifs critiqués, la décision se trouve légalement justifiée;

 

PAR CES MOTIFS :

 

REJETTE le pourvoi ;

 

Condamne la société Régie Régir aux dépens ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.

 

 

 

 

 

 

 

Mise à jour

28/06/2008