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Recouvrement des charges

Les cellules  spécialisées de cabinets d’avocats

 

 

 

L’Association des Responsables de Copropriétés (ARC) a publié sur son site Internet un « abus » n° 2851 relatif aux modalités adoptées par l’assemblée générale d’un syndicat de copropriétaires pour le recouvrement des charges impayées. (Lien vers le site de l’ARC au pied de l’article)

L’ARC relève à juste titre des éléments contestables dans le document soumis à l’approbation de l’assemblée. Mais l’association critique à tort un mode d’organisation des recouvrements qui est tout à fait légal et conforme aux intérêts bien compris d’une copropriété dès lors qu’il est débarrassé de certains vices propres à la rémunération de l’avocat.

Le texte de l’article est tramé jaune. Nos observations viennent à la suite.

 

 

« Quand les syndics et les avocats font illégalement de l’argent avec le recouvrement des charges »

 

 

La résolution qui suit a été mise au point par le cabinet  XXX, syndic.

Admirez, amateurs de « délinquance subtile ».

 

« Point 10 : Recouvrement des charges impayées - suivant barème ci-joint

Décision à prendre concernant le recouvrement des éventuels impayés, donnant au syndic de façon permanente les pouvoirs nécessaires pour procéder au recouvrement des provisions et charges dues par les copropriétaires débiteurs, ceux-ci devant supporter tous les frais nécessaires à cette démarche (dépens, frais et honoraires d'avocats, frais irrépétibles, etc.) en application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

L'assemblée générale, autorise expressément le syndic à traiter au nom et pour le compte de la copropriété avec le Cabinet d'avocats YYYY, selon les honoraires négociés suivants :

-  Mise en demeure pour recouvrement auprès des copropriétaires : * 119,60€ TTC par copropriétaire unique * + 50€ TTC par copropriétaire indivis d'un même lot suivant * + Honoraire résultat : 10% sur sommes recouvrées.  Frais de port et copies inclus.

-  Assignation et audience(s) (jusqu'à 3) devant le Tribunal d'Instance /JEX : * 1 350€ TTC par défendeur unique * + 200€ TTC par copropriétaire indivis d'un même lot concluant séparément * + Complément pour audience supplémentaire : 180 €,TTC * + Complément par conclusions supplémentaires : 250€ TTC.

-  Assignation et audience devant le Tribunal de Grande Instance :  * 1 500 € TTC  par défendeur unique *+ 200€ TTC par copropriétaire indivis d'un même lot concluant séparément * Jeu de conclusions : 400€ TTC * Complément supplémentaire si difficultés et incident * Au fond : supplément honoraire de postulation avocat du barreau * + Complément par audience supplémentaire : 1806 TTC * + Complément par  conclusions supplémentaires : 250€ TTC.

-  Suivi d'exécution après obtention d'un titre (hors procédure devant le juge de l'exécution) : Jusqu'à 10 courriers (Syndic ou mandataire / client / Huissier / administration) * 350€ TTC honoraires de base (par ensemble de 10 courriers) * + complément en fonction de la difficulté du dossier au temps passé.

-  Procédure devant la Cour d'Appel : *1 800€ TTC honoraire de l'avocat + complément en fonction de la difficulté du dossier au temps passé. * Si procédure avec représentation obligatoire d'un avoué : honoraires et frais de l'avoué selon Facture et / ou taxation par les services du Greffe en sus - Toutes procédures de première instance ou d'appel : Complément éventuel en fonction de la difficulté du dossier.

-  Honoraire de résultats sur affaires complexes ou enjeux supérieurs à 6 000 : 10% des sommes recouvrées et indemnités TTC.

-  Droit de plaidoirie acquitté par affaire : 8,84€ suivant tarif officiel, non soumis à TVA.

Inscription d'hypothèque : 380€ + frais et droits d'inscription en sus. Frais d'huissier : selon facture de l'huissier

 

Résultat du vote : 

 - Votent POUR : 628 , représentant 11 copropriétaire(s)

- Votent CONTRE : néant

- ABSTENTIONS: néant La résolution est adoptée avec 628/628 (Article24) ».

 

A noter que cette résolution est un concentré d’illégalisme :

-  délégation totale par le syndic à un cabinet d’avocats de tous les actes de recouvrement ;

-  mise en demeure à 119 € + 10 % sur les sommes recouvrées !

-  honoraires de résultat sur affaires complexes, etc.

A noter aussi que le contrat de syndic prévoyant déjà des frais de syndic, nous avons affaire (répétons-le, tout à fait illégalement) à la « double peine ».

Rappelons que les copropriétaires qui votent ce genre de frais abusifs prennent un risque pour leurs voisins qui peuvent être en difficulté mais surtout pour eux-mêmes : si le juge refuse ces frais (ce qu’il fera si l’affaire vient devant lui), tous les frais seront transférés aux syndicats des copropriétaires (c’est-à-dire supportés par TOUS les copropriétaires), sans que cela gêne le moins du monde le syndic et l’avocat qui - eux - prélèveront - quoi qu’il arrive - leurs honoraires abusifs sur les comptes individuels...

Comme disent les syndics quand ils se rencontrent : « L’aveuglement des copropriétaires, c’est sympathique, ça fait la santé financière des syndics ».

 

 

Commentaires de JPM-COPRO

 

Dans la résolution,  l’exposé préalable est un peu alambiqué.

Il n’y a pas lieu de donner « au syndic de façon permanente les pouvoirs nécessaires pour procéder au recouvrement des provisions et charges dues par les copropriétaires débiteurs » puisqu’il détient ces pouvoirs sans être astreint à la formalité prévue par l’article 55 du décret du 17 mars 1967.

La mention que ceux-ci [les copropriétaires débiteurs] devront supporter tous les frais nécessaires à cette démarche (dépens, frais et honoraires d'avocats, frais irrépétibles, etc.) en application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965  n’a pas tant pour objet d’effrayer les débiteurs potentiels que de faire croire aux bons payeurs qu’ils n’auront finalement aucun frais à supporter du fait des procédures de recouvrement. Cette affirmation est trompeuse. Une procédure de recouvrement de charges parfaitement menée et couronnée de succès peut finalement laisser à la charge du syndicat des frais non indemnisés. Cela reste vrai pour n’importe quel créancier.

 

On arrive à la décision avec « L'assemblée générale, autorise expressément le syndic à traiter au nom et pour le compte de la copropriété avec le Cabinet d'avocats YYYY, selon les honoraires négociés suivants : …. »

L’ARC parle à ce propos « d’une délégation totale par le syndic à un cabinet d’avocats de tous les actes de recouvrement ». Il n’existe aucune délégation dans tout cela mais simplement le choix d’un cabinet d’avocats déterminé pour réaliser les procédures de recouvrement judiciaire nécessaires. On peut seulement admettre que l’expression « traiter au nom et pour le compte de la copropriété avec le Cabinet d'avocats YYYY » relève plus de la pratique des marchés publics ou du droit des foires que des relations avec un avocat.

L’ARC laisse entendre que le syndic remettrait les dossiers à l’avocat sans avoir même envoyé une mise en demeure au débiteur.

Il est vrai que le barème de l’avocat comporte en premier lieu : Mise en demeure pour recouvrement auprès des copropriétaires : * 119,60€ TTC par copropriétaire unique * + 50€ TTC par copropriétaire indivis d'un même lot suivant * + Honoraire résultat : 10% sur sommes recouvrées.  Frais de port et copies inclus.

Mais il s’agit là de ce que certains appellent improprement un « commandement d’avocat ». Tout simplement une lettre recommandée avec accusé de réception invitant le débiteur à payer sans délai. L’expérience montre que les « mises en demeure d’avocat » sont assez efficaces. Le paiement est effectué sans autre forme de procès dans 30 à 40 % des cas. Ces « mises en demeure » sont réalisées par l’avocat alors que le syndic a déjà notifié une mise en demeure au débiteur.

 

Revenons au mécanisme proposé.

Pour faire simple  : le syndic propose à l’assemblée de confier le soin des procédures de recouvrement au cabinet d’avocats XXX et donne connaissance du barème des honoraires de ce cabinet.

On ne peut rien reprocher au syndic à cet égard. Il est admissible qu’il présente à l’assemblée un cabinet d’avocats spécialisé dans la branche très particulière des recouvrements de charges de copropriété et il est normal qu’il présente le barème des honoraires.

Il ne semble pas y avoir de convention au sens propre du terme entre le syndicat et le cabinet d’avocats. De toute manière la convention ne serait pas illicite.

 

Nous rejoignons l’ARC à propos de certaines des clauses de rémunération figurant dans le barème.

Dans notre domaine, on ne peut pas admettre dans la rémunération de l’avocat un pourcentage sur les sommes recouvrées ou un honoraire de résultat. C’est un mode de calcul de la rémunération qui doit être réservé à des affaires d’un autre genre. En outre ce type de prélèvement à la charge du syndicat ne pourrait entrer ni dans la catégorie des frais visés par l’article 10-1 ni dans celle des frais justifiant une indemnité au titre de l’article 700 du CPC.

Cette observation vaut pour la mise en demeure par avocat pour laquelle il n’existe aucun seuil d’application et pour les autres procédures sur affaires complexes ou enjeux supérieurs à 6 000.

 

Il existe une rubrique «  Suivi d'exécution après obtention d'un titre (hors procédure devant le juge de l'exécution)  : Jusqu'à 10 courriers (Syndic ou mandataire / client / Huissier / administration) * 350€ TTC honoraires de base (par ensemble de 10 courriers) * + complément en fonction de la difficulté du dossier au temps passé ».

Dès lors qu’un huissier a été chargé de l’exécution de la décision judiciaire obtenue, il faut considérer que l’intervention de l’avocat n’est plus nécessaire. Le syndic peut suivre seul les opérations de l’huissier. Occasionnellement une difficulté d’exécution peut se présenter. C’est le cas lorsqu’il faut envisager une procédure de saisie immobilière du lot du débiteur. Il ne faut pas hésiter alors à reprendre contact avec l’avocat.

 

Le barème de rémunération présenté par le cabinet d’avocat est confus. Il est préférable, dans le cas des recouvrements de charges de copropriété, de détailler plus complètement la rémunération des différentes phases de la procédure devant le tribunal d’instance ou le juge de proximité. Il est fréquent que le débiteur procède au règlement en cours d’instance (après introduction de l’action judiciaire mais avant le jugement). Il faut alors déterminer les conditions dans lesquelles le syndicat peut obtenir du débiteur, outre le paiement du principal, le remboursement de tout ou partie des frais engagés, pour retirer sa demande et faire supprimer l’instance.

 

 

L’ARC écrit «  A noter aussi que le contrat de syndic prévoyant déjà des frais de syndic, nous avons affaire (répétons-le, tout à fait illégalement) à la « double peine ».

Il n’existe en l’espèce aucune double peine.

Pour le recouvrement des charges le syndic peut établir une lettre de relance simple et doit faire notifier une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception.

A défaut de paiement il doit procéder à la constitution d’un dossier permettant

- la mise en œuvre des garanties dont bénéficie le syndicat des copropriétaires

- l’engagement d’une procédure judiciaire de recouvrement

C’est la constitution du dossier qui justifie l’octroi d’une rémunération exceptionnelle aux syndics, et non sa « remise à l’avocat ou à l’huissier » comme il est indiqué dans les contrats de syndic. Il n’y a donc aucune cumul de rémunération pouvant être assimilé à une double peine.

 

On peut affirmer pour conclure

Que le recours à un cabinet d’avocats ayant constitué une « cellule » de recouvrements des charges de copropriété peut présenter un intérêt certain pour les différents syndicats administrés par un syndic professionnel et pour le syndic lui-même. Il est souhaitable que la « cellule » puisse intervenir dans un secteur géographique assez étendu en fonction des aires de compétence des tribunaux d’instance notamment.

Une telle organisation doit permettre une réduction sensible des coûts de fonctionnement par la voie d’une mutualisation des interventions. Le cabinet d’avocat doit présenter un barème de rémunération assez séduisant. Le syndic peut bien entendu faire approuver son initiative par l’assemblée générale.

De nos jours, cette organisation implique un outil informatique de bonne qualité. Il doit permettre tous les traitements électroniques de communication avec les juridictions et la clientèle.

La qualité des prestations juridiques doit être aussi au rendez-vous !

On doit pouvoir compter avant tout sur un contrôle préalable et minutieux de la constitution satisfaisante des dossiers. Il est tout à fait normal que des Magistrats accueillent avec une plus grande bienveillance les dossiers présentés par un cabinet ayant bonne réputation à cet égard.

 

Il n’y a pas lieu pour autant d’écarter systématiquement le recours à des avocats travaillant de manière plus artisanale. Il est très justifié pour les « syndics-copropriétaires », bénévoles ou coopératifs, mais aussi pour des professionnels  de quartier lorsque les immeubles de leurs mandants sont inscrits dans une localisation restreinte.

 

Lien vers l’abus dans le site de l’ARC

http://www.unarc.asso.fr/site/abus/1011/abus2851.htm

 

 

 

 

Mise à jour

10/10/2011